Je ne trouve pas de titre (partie 1)

Publié par parisien-breton_en_ligne le 28.12.2008
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C'est un peu mon histoire sur quelques soixante douze heures que je vais tenter de relater, même si, en fait, c'est beaucoup plus l'histoire de quelqu'un d'autre et moi, je l'ai vécue un peu comme dans le film « fenêtre sur cour »

Un dimanche soir, je rentre d'une séance de cinéma au MK2 Bibliothèque dans le 13ème. Arrivé à la maison vers 19h00, je mets une machine de linge à laver. Alors que je mets le linge dans le tambour, je mate chez mes voisins d'en face, côté cour, moi vivant au troisième étage et eux au second (vue plongeante dans leur cuisine). Depuis deux ans que je vis dans cet appartement, je les ai vus s'exhiber plus d'une fois, seul ou tous les deux, plus ou moins dénudés... Ce soir, un des deux est dans la cuisine à fumer sa clope en peignoir. Un aller retour dans la chambre chercher d'autres linges et quand je reviens dans la cuisine, il a passé son peignoir, les manches nouées à la taille (je ne me plains pas : il est plutôt bien foutu ...). Un mouvement de sa part et ... le peignoir tombe, il se retrouve nu dans sa cuisine. Et bien sûr, je ne rate rien du spectacle qu'il m'offre... Je reconnais que j'ai trainé dans ma cuisine plus que de raison pour mater. Et j'ai eu le droit à la totale : nu, puis en peignoir ou en slip, lumière allumée ou éteinte... voire clignotante s'il voyait que je ne regardais plus...

Je me laisse à croire que si j'avais fait un quelconque signe, il m'aurait peut être proposé la botte...  mais bon , c'est mon voisin, il ne vit pas seul... tous les clichés qui nous bloquent ; bref, j'ai quitté la pièce...

Quand ma machine à laver a terminé son programme, je suis revenu dans la cuisine sortir le linge pour le mettre à sécher. Forcément, j'ai jeté un oeil par la fenêtre : la fenêtre de sa cuisine était ouverte, la lumière allumée et personne dans la pièce. Par contre, un fond sonore me fait dresser l'oreille : il y a quelqu'un qui « prend son pied » ou qui écoute un film X dans le bâtiment. Un peu concierge, j'ouvre ma fenêtre : le bruit vient bien de chez mon voisin et avec le sourire, je me dis que j'aurais pu être chez lui à cette heure...

La soirée se passe, je me couche... Dans la nuit vers deux heures du matin, je me lève direction les toilettes et  je ne sais pas pourquoi (en deux ans, je ne l'avais jamais fait auparavant), je retourne mater sa fenêtre. Et là, je me suis inquiété : aucun bruit mais la fenêtre de sa cuisine est toujours ouverte et la lumière allumée ; eux qui éteignent toujours quand ils quittent la pièce...

Je me recouche et au lever vers sept heures trente, je retourne voir la fenêtre ; je suis rassuré : la fenêtre est fermée et la lumière éteinte.

La journée se passe ; cet épisode m'a interpellé ; j'en parle à deux collègues de boulot à la machine à café...

Le soir, alors que je me prépare à manger, j'ai la sensation que quelqu'un fait des photos dans un appartement en face ou dans la cour... Quand je regarde, je réalise que c'est chez mon voisin : les flashes sont dans leur salle de bain (les vitres sont en verre martelé) je vois les flashes mais pas la ou les personnes. Par contre dans leur cuisine, il y a trois policiers en tenue et quatre hommes en civil qui font des relevés d'empreintes sur des verres et des bouteilles.

Ma première pensée : il s'est fait agressé pendant la nuit passée en faisant une rencontre malheureuse. Je suis envahi de sentiments confus entre et si j'avais appelé la police dans la nuit, mais pourquoi , parce que la fenêtre était ouverte et la lumière allumée, ça fait maigre, non ?

Et puis, et si j'avais répondu à ses avances, j'aurais pu être sur place...

En tout cas, je suis mal, je ne sais pas quoi faire, je ne sais d'ailleurs pas si je dois faire quelque chose...

Dans la foulée, le lendemain, je me rappelle que dans cet immeuble, habite le fils d'un ami. Je l'appelle le mardi pour lui demander s'il sait ce qui s'est passé. Il me confirme que les pompiers sont intervenus le lundi matin, que son ami l'aurait trouvé inanimé en rentrant de week end. Je lui raconte ce que j'avais vu dans la nuit du dimanche au lundi. Lui, me conseille de le signaler aux policiers... Je ne sais vraiment pas quoi faire.

Un peu plus tard dans la soirée, il me rappelle en me disant qu'il y a enquête de voisinage. Les policiers sont chez lui et une femme policier souhaiterait me parler si je suis d'accord. On échange au téléphone quelques minutes et elle me demande comment me joindre le lendemain, s'ils souhaitent m'auditionner. En fait, encore plus tard dans la soirée, elle me rappelle pour me demander de passer à l'hôtel de police le lendemain matin. Je me doute que ce doit être sérieux, je lui demande si elle peut m'en dire un peu plus et elle me précise qu'elle me le dira le lendemain...

Commentaires

Portrait de parisien-breton_en_ligne

 

Donc le mercredi matin, je vais pour neuf heures trente à l'hôtel de police à Bastille. J'y suis resté deux heures, leur ai raconté ce que je savais. Et alors que je leur faisais mon récit, un des autres policiers parlait au téléphone avec les pompiers et c'est comme ça que j'ai appris le décès de mon voisin... même si je crois que je le savais déjà, j'ai pris une douche froide, je crois que si je m'étais laissé aller, j'aurais pleuré. La femme flic l'a vu ; elle ne savait plus comment rattraper le coup...

Ils ont été prévenants ; ils m'ont expliqué que dans la nuit, il devait aller bien, en tout cas, il était vivant quand son ami est rentré le lundi matin et quand les pompiers l'ont emporté... pourquoi leur enquête : parce que mort suspecte... Et ils m'ont confirmé que rien ne laissait croire à une agression dans l'appartement. Je ne sais trop pourquoi mais de le savoir ça m'a soulagé : l'idée d'une mort violente par sévices homophobes m'effrayait...  même si l'issue est identique...

Depuis, sur internet, j'ai trouvé qui était mon voisin : son métier en faisait quelqu'un de mondialement connu. J'y ai trouvé des photos, je confirme c'était un beau mec de quarante trois ans.

Je ne le connaissais pas et pourtant, je le connaissais bien, lui et son ami... je ne sais toujours pas, aujourd'hui, ce que je ressens. Par contre, le vendredi suivant cet épisode, je suis sorti et rentré très tard... Vers deux heures du matin, une femme, sa mère d'après le voisin, faisait le grand ménage dans la cuisine...

Ca m'a fait craquer : en effet que pouvait elle faire d'autre au milieu de la nuit quand on vient de perdre son fils et que le sommeil ne vient pas ?

Comme je le disais au début, ce n'est pas mon histoire et j'ai pourtant besoin d'évacuer...

J'appellerais bien les flics pour savoir ce qu'a dit l'autopsie mais à quel titre, je ne suis rien que celui qui a partagé une partie de ses derniers instants.

pourquoi cet échange avec lui ce dimanche soir alors qu'avant nous avions exclusivement ce rôle défini d'exhib et de voyeur, tout cela plutôt soft ?  pourquoi cette inquiétude au mileu de la nuit , Pourquoi quand j'ai vu les flics dans l'appart, je l'ai pris comme une suite logique ? Je pense que je ne le saurai jamais... J'ai plein d'interrogations et peu de réponses et je crois que je n'en aurai pas...

Alors, vais essayer d'enfouir au plus profond de mes souvenirs... Mais cette fenêtre où je ne le verrai plus m'attire chaque fois que je rentre dans ma cuisine.

Portrait de maya

yvon tu n'en parles pas ?

 

 

 

Portrait de parisien-breton_en_ligne

mélange de substances (d'après les flics) pris  de son gré ou à son insu...

l'autopsie l'a certainement dit mais je ne me sens pas très légitime à appeler les policiers pour leur demander... donc je n'en sais rien...

Portrait de maya

ce qu'on doit ressentir dans une tlle situation, je comprends ton malaise.

c'est etrange ces affaires de voisinage ou on sait sans savoir, je me souviens que lors de ma defenestration, j'habitais un studio aux 4 chemins. Nul doute que les voisins savaient que je menais une vie' hors normes', dormir la journée, vivre la nuit , toujours décalquée etc

à l'hopital j'ai reçu des cartes de 2 de mes voisins qui se sentaient coupables de n'avoir pas parlé , rien fait  , c'est pas tout à fait ton cas de figure ou tu te sens plus ou moins intégré dans le film même en extérieur mais je peux imaginer ...

un gros bisou à toi. 

Portrait de plumeauplafond

Il y a du roman noir dans ta manière de raconter. J'aime bien. Malheureusement ce n'est pas du roman... Ca fait froid dans le dos... Et j'imagine bien que ça doit te rendre très triste quand tu regardes cette fenêtre... sur le cours de la mort.

  • Dans un stupide moment de distraction, Plume marcha les pieds au plafond, au lieu de les garder à terre...