Le grand classique. Les aveux de Pline le Jeune

Publié par jl06 le 15.04.2020
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Le grand classique. Les aveux de Pline le Jeune

organisée par FEDERICO CORDELLO et IVANO DIONIGI
 
 
 
Pline le Jeune réprimandé , gravure sur cuivre de Thomas Burke (1749-1815) 
Pour ces jours nous avons choisi de proposer une pièce d'un auteur "classique", grec ou latin, à lire en cette période complexe. De Platon à Sénèque, nous recommandons des textes d'auteur et des lectures qui traitent de thèmes toujours présents, tels que la relation avec l'État ou celle avec nos parents. Le choix et les lectures proviennent du "Centre d'études pour la permanence du classique", signé par Ivano Dionigi, ancien recteur de l'Université de Bologne, et Federico Condello, philologue qui enseigne à l'Université de Bologne
 
Le souci de sa femme malade, la perturbation épuisante de la séparation, mais aussi les consolations qui peuvent donner - en l'absence - des mots d'amour et d'affection confiés à l'écriture: ce sont les sentiments qui animent les messages de Pline à sa femme Calpurnia de Pline le Jeune, Lettres

 
Calpurnia chérie,
je n'ai jamais autant détesté mes engagements professionnels: à cause d'eux, je n'ai pas pu t'accompagner au départ du voyage en Campanie que tu as fait pour des raisons de santé; je n'ai pas pu non plus vous suivre immédiatement après. Maintenant plus que jamais j'aurais aimé être avec vous, voir par vous-même si vous reprenez des forces, si votre corps délicat se rétablit, si vous passez sans aggraver cette période de votre isolement.
Même si vous vous portez bien, ma nostalgie ne serait pas sans inquiétude: ne pas avoir de nouvelles de la personne que vous aimez de tout votre cœur est en soi un motif d'appréhension et d'anxiété. Mais maintenant au loin s'ajoute le fait que tu es malade, et pour m'effrayer c'est l'incertitude de mes pensées. J'ai peur de tout, je fais toutes sortes d'hypothèses et je vais imaginer les choses qui me terrifient le plus: c'est comme ça que ça marche, la peur.
Alors, plus encore, n'hésitez pas à m'écrire: écrivez-moi tous les jours ou même deux fois par jour. En vous lisant, je serai plus détendu et ne commencerai à avoir peur que lorsque j'aurai fini.
Je vous embrasse,
votre
 
chère Pline Calpurnia,
Je ressens un immense désir pour toi. La première raison est que je t'aime. La seconde est que nous n'étions pas habitués à nous absenter. C'est pourquoi je reste éveillé presque toute la nuit à penser à toi; c'est pourquoi, pendant la journée, dans les moments où je viens habituellement vous chercher, mes pieds me portent - comme ce dicton est vrai! - oui, mes pieds m'emmènent dans ta chambre. C'est pourquoi, triste et souffrant, comme si j'avais été rejeté, je m'éloigne de cette pièce vide. Le seul moment où je ne suis pas au courant de cette torture est ce que je passe dans le forum et devant les clients des tribunaux.
Vous jugez comment ma vie est réduite: je trouve du repos dans le travail, je trouve du réconfort dans la misère des querelles quotidiennes.
Je vous embrasse,
votre
 
chère Pline Calpurnia,
Vous m'écrivez au sujet de la grande douleur que ma distance vous donne et que votre seul réconfort est de serrer mes draps et de les placer là où vous me trouvez habituellement. Cette recherche de moi me plaît aussi bien que cette forme de consolation. Moi aussi, à mon tour, je continue à lire vos lettres, je les prends toujours dans ma main comme je les voyais pour la première fois. Mais cela déclenche encore plus de nostalgie pour vous. Parce que la douceur que je trouve dans vos pages est aussi grande que lorsque vous me parlez en personne. Mais tu m'écris, tu écris très souvent! Peu importe si cela me fait me réjouir et souffrir ensemble.
Je vous embrasse,
votre Plinio


Centro Studi La permanence du classique de l'Université de Bologne
Traduction de Bruna Pieri
Pour la lecture de Sonia Bergamasco