LE SEXE SELON MAÏA , !

Publié par jl06 le 24.05.2020
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FINI DE COURIR DANS LES ENDROITS CHAUD ....Wink....Mais quelque chose me dit .......Cool

Coronavirus : cet été, sexualité rimera avec austérité - Maïa Mazaurette

Pandémie oblige, les aventures érotiques sont reportées à des jours meilleurs et la spontanéité en prend un coup. Transparence, prudence et romance s’annoncent comme les nouveaux piliers de la séduction, estime Maïa Mazaurette, chroniqueuse de « La Matinale ».

Publié aujourd’hui à 00h29, mis à jour à 10h09   Temps deLecture 5 min.

 

 

L’été, saison de toutes les expérimentations érotiques ? Pas cette année ! Les rencontres comme la spontanéité sont reportées à un monde post-vaccination : non seulement la transmission du Covid-19 par la salive nous interdit de nous embrasser, mais en Chine, des chercheurs semblent avoir trouvé des traces de virus dans le sperme. Les optimistes noteront que ces menaces libèrent une autoroute pour les massages érotiques, mais en attendant, désolée : le cocktail des vacances sera l’Old Fashioned, pas le Sex on The Beach.

Toutes proportions gardées, nous voici revenus aux angoisses des années sida, quand certains refusaient même de serrer des mains. Le Covid-19 n’a d’ailleurs pas effacé le VIH de nos préoccupations : pour accompagner le déconfinement, l’association Aides vient de lancer une campagne #RetrouvonsNousProtegeonsNous. D’où un constat un peu déprimant : un vent de gravité souffle à nouveau sur le désir.

Or ce soudain retour de la gravité, en sexualité, constitue une rupture dans la promesse. Nous préférons considérer les aventures érotiques comme un territoire d’absolue légèreté : notre idéal d’une première nuit amoureuse, c’est qu’elle se passe sans accroc (pour ne pas dire : sans cerveau). Tout ce qui abîme cette fluidité est suspect, même quand les précautions sont nécessaires ou éthiques : on avait observé les mêmes réticences avec le préservatif (« qui ruine tout ») ou le consentement (« qui casse l’ambiance »).

La gravité fait mauvais ménage avec la sexualité : elle grignote les libidos les plus solides, atomise les érections, contraint au repli. Symboliquement, c’est encore pire : jusque dans notre langage, les galipettes et la bagatelle évoquent un monde de désinvolture. Qu’on grimpe aux rideaux ou qu’on s’envole au septième ciel, c’est l’apesanteur qui nous guide. Qu’on fusionne avec notre partenaire, et nous voici même débarrassés des limites de notre corps, flottant tels de purs esprits !

Ce retour de gravité est d’autant plus incontournable qu’il met dans le même panier les pratiques soft et les pratiques (considérées comme) hard : en 2020, le tendre baiser avec son amoureux devient potentiellement aussi dangereux qu’une pénétration vaginale avec un parfait inconnu. On peut mourir. On peut tuer. Repose en paix, insouciance !

Si la situation perdure, une génération entière pourrait bien tergiverser avant d’embrasser ou d’enlacer quelqu’un lors d’un premier, deuxième ou quarantième rendez-vous. Avec une conséquence logique : même si les moins frileux d’entre nous sont prêts à reprendre les rencontres « physiques », il y a fort à parier que la spontanéité des rapports va avoir du plomb dans l’aile. Cette évolution s’articulera alors autour de plusieurs axes : transparence, prudence, romance (mères co-parentes de sûreté).

1. Transparence : oubliez le flou artistique

Dans The Atlanticla journaliste Ginny Hogan évoque ainsi la fin du « casual dating » – l’art typiquement américain du papillonnage, qui permet aux amants de faire connaissance sur la durée tout en gardant leurs options ouvertes. Aujourd’hui, plus question de rester le cul entre deux chaises ! On est soit célibataire, soit en couple – et entre ces deux mondes, les frontières restent étanches.

Pour accéder au couple, il faudra non seulement montrer patte blanche, mais peut-être faire des tests… comme quand on arrête le préservatif. En espérant que personne ne se mette à exiger la copie intégrale du dossier médical ! Prévoyons aussi une solide dose de patience, pas forcément désagréable. On peut trouver érotique de s’attendre, de faire monter la pression à distance – comme dans les romans de Jane Austen. Si faire connaissance plus longtemps constitue un sacerdoce, l’affaire est de toute manière mal engagée !

2. Prudence : après le « slow sex », la « slow séduction »

En revanche, il y a fort à parier que le ralentissement de nos vies sexuelles se double d’une grande prudence, donc de gros gestes barrières à l’entrée. Parmi les lecteurs et lectrices qui m’envoient des messages, plusieurs m’ont confié qu’ils auraient des rapports sexuels « seulement si ça en vaut la peine »… Et c’est bien normal : en ce moment, on a besoin d’être rassurés. Cette réassurance devrait entraîner une sélection drastique des partenaires, avec une prime aux prétendants, justement, les plus sérieux.

En corollaire, on peut prévoir une accentuation de la « privatisation de la rencontre » chère à la sociologue Marie Bergström, car les rencontres dans des lieux privés (au travail, chez des amis…) permettent de limiter les risques. Ce rétrécissement du nombre de partenaires potentiels produit moins de mixité sociale… mais on aurait tort de mettre sur le dos du Covid-19 une tendance déjà enclenchée il y a longtemps (les couples français sont très homogames, c’est-à-dire qu’ils se marient le plus souvent dans leur classe sociale).

3. Romance : « Love is in the air »

Cette sélection passera par un retour en grâce des sentiments : s’il paraît téméraire de tomber le masque pour un demi-orgasme alcoolisé, il demeure socialement acceptable de risquer sa santé pour le grand amour. Et les romantiques parmi nous, injustement méprisés hier (« arrête avec ton sentimentalisme béat, Jean-Patrick »), pourraient être les mieux armés face aux défis de l’été. Les représentations culturelles valident d’avance leur choix : pour prendre un risque vital, il faut de l’amour, parce que l’amour est plus fort que la mort (n’essayez pas de reproduire cette cascade à la maison).

Ce retour du romantisme est encore augmenté par la présence d’un élément narratif incroyablement propice à la cristallisation : l’obstacle. Citons encore une sociologue, en l’occurrence Eva Illouz, sur France Culture le 14 février 2019 : « On peut dire que l’idée de grand amour, c’est une idée de société où la relation entre les jeunes gens est très régulée. » Ici, la pandémie et les interdictions de déplacement font office de régulateurs.

Par ailleurs, le risque est lui-même lié à l’excitation sexuelle. Non seulement le désir favorise la mise en danger (Archives of Sexual Behavior, 2016), mais l’autre devient terriblement désirable justement parce qu’il incarne un danger (jurisprudence Twilight… ou Tristan et Iseult). La boucle est bouclée.

Le désir sexuel recouvre alors son potentiel de transgression, comme les données les plus récentes l’ont confirmé. Ainsi les personnes confinées loin de leur partenaire ont-elles volontiers « oublié » les règles du confinement (52 % de resquilleurs dans cette catégorie, contre 37 % chez les célibataires et 29 % chez les couples cohabitants, selon des chiffres récents Ifop/Charles.co).

Enfin, du côté des pratiques, à quoi s’attendre ? Le retour en grâce de l’amour avec un grand A devrait s’accompagner d’un retour du cool pour le baiser avec un grand B – réinvesti comme un espace fantasmatique interdit, donc hautement convoité. On s’arrêtera au b.a.-ba : à la lettre C, il y a le Covid…