Les effets normaux d'être simplement humain

Publié par Achille le 17.12.2008
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À 19 ans, apprendre qu'on a le VIH, c'est déjà tout un choc. Si on en meurt plus, alors quoi?  Qu'est-ce qui se passe?

Ce qui a été le plus dur à l'époque pour moi, cette imprécision dans laquelle me laissait la science  quant à ce qui allait m'arriver.  J'allais mourir un jour, mais quand?  Dans un futur proche ou éloigné?  Dans quelles conditions?  J'avais maintenant le VIH, et puis après?

Ce n'est pas tant que la nouvelle a détruit les rêves que j'avais à l'époque, je crois plutôt qu'elle a créé un flou sur les possibilités qui s'offraient à moi et que sans certitude ni réponse, j'ai eu longtemps l'impression d'avancé dans ces espèces de modules mous pour enfant, sans possibilité d'avoir une vraie prise pour me stabiliser et y construire mon chateau de carte. 

C'est une chose que de réaliser que je ne vais pas mourir malgré tous les discours désuets sur le sida, c'en est une autre que de savoir s'il me fallait côtiser à un REER ou à un fond de retraite. 

À 25 ans, la question que je me pose maintenant c'est : mais quelles sont mes limites?

Qu'est-ce qui dans mon corps n'est que le simple résultat de vieillir et qu'est-ce qui est le fait de la maladie?

J'ai de la difficulté à cerner les limites.  Il me semble que cette question est fondamentale pour moi puisque je me dépense énormément ces temps-ci dans différentes activités qui probablement m'épuisent.

J'ignore si je dois adapter mon rythme au virus, ou si mon corps est capable de résister à ce que je lui demande. 

D'autant qu'à la base, j'ai bien remarqué qu'il ne sert à rien pour moi de me comparer à d'autres de mon âge : quand j'ai commencé mes expériences d'adolescent, j'ai bien vu que mon métabolisme était incapable de supporter les quantités parfois phénoménales de drogues et cannabis que mes amis pouvaient consommer. Et cela sans que ça ne semble affecter leur santé générale ou leur énergie à la longue. 

 Il me semble que dans le fond, je suis toujours dans cet espace de flottement sans réponse qui fait que je me sens quelque peu différents des autres homos et hétéros que je côtoie.  Des fois j'ai l'impression d'être un vieillard avec mes pilules ou dans mes sujets de réflexion.  D'autres fois, je me sens totalement naïf face à la vie.   

J'ai appris à dealer avec cette espèce de vision flou.  Après tout, on est dans un monde post-moderne de subjectivité absolue et de déconstruction des illusoires normes, mais parfois, j'ai l'impression que l'univers est trop fragile et la construction de réseaux humains si difficile que je me demande parfois comment cela ce fait que je ne suis pas encore un grand cynique désabusé. 

Commentaires

Portrait de romainparis

Bonjour Achille, je crois que tu es en train de passer du stade de l'Homme à celui de l'Humain. J'ai souvent du mal à faire comprendre la différence entre les deux. Disons : l'Homme est celui qui vit selon les normes morales de la société, l'Humain est celui qui s'est en détaché et qui n'a plus a vivre selon des préceptes qui le limite. Je lis que tu as déja compris que la construction des réseaux humains sont difficiles, c'est exact ! Mais pas impossible !

Le parcours pour devenir Humain n'a rien d'évident mais c'est un bonheur de n'être entouré que de personnes sincères qui ne te jugent pas pour ce que tu es au profond de toi, des personnes qui t'acceptent et pas qui te tolérent.

A 25 ans, tu as tout à gagner. Franchement, j'aurai aimé avoir ton niveau de reflexion à ton âge. Mon éveil à la réalité sans fard n'a débuté qu'à 30 ans.

Demain sera humain ou ne sera pas

Romain

Portrait de jh24ans63000

Moi aussi est 24 ans apris ma seropositivité a 24 mais sans traitement mais je vit les meme chose que toi au quotidien, marre d'etre fatigué tout le temps,marre de me demander si c'é moi ou cette maladie,...

Bref mes relation humaines sont difficile également et bien d'autre chose,cette maladi te rend fous , t'arrette pas de cogité,...

Mais heureusement que je me dit que tout vas s'arranger et que je vé réussir a cobstruire mon chateau de carte,construire ma vie et enfin vivre vraiment comme je suis bien avec les autre et surtout bien avec moi meme.

mem si c'est dur je crois qu'on doit vraiment y croire,faire des efforts pour s'accepter,se fare accepter

bye

Portrait de nikita

J'ai 56 ans et suis séro+ ou - depuis 10 ans. Divorcée depuis 3 ans. Séparée depuis 6 ans.

Pour la fatigue, c'est pas une question de nombre d'années alors, car j'ai les mêmes problèmes que vous. Donc ça me rassure.

Non, je ne suis pas plus fatiguée qu'avant. Si ! Enfin je m'explique ou je vais tenter.

En ce moment je suis à 300 % car j'ai un nouveau job qui prend de l'ampleur et qui me plait à fond. J'y vais de bon coeur et non pas à reculon. Alors j'ai la pêche et si je suis parfois fatiguée, je sais pourquoi. Je me défonce dans mon travail. Je peux comparer avec les 4 années de galère à gérer un divorce + une absence d'emploi.

J'étais alors plus fatiguée que maintenant et je faisais bcp moins de choses. Je gérais un divorce qui a failli me détruire.

Now je suis hyper cool, en accord avec moi-même et je croque la vie à pleines dents.

Bizoux à vous deux les petits jeunes.