Ou la spirale infernale du petit commerce

Publié par jl06 le 21.11.2019
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Pour les fêtes de fin d’année, 20 milliards d’euros devraient être dépensés sur Internet

La journée du Black Friday, le 29 novembre, marquera le coup d’envoi des courses de Noël. La France compte désormais 40,5 millions d’acheteurs en ligne - Par 

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Internet devrait être, cette année encore, le terrain de jeu des courses de Noël. Plus de 20 milliards d’euros devraient ainsi être dépensés sur le Web à l’occasion des fêtes de fin d’année, soit près de 20 % des ventes annuelles réalisées par ce circuit, a prédit, jeudi 21 novembre, la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad). Cela représente un peu plus qu’à la même période de 2018, lorsque 18,3 milliards d’euros avaient été déboursés. La France compte désormais 40,5 millions d’acheteurs en ligne – près de 1,7 million de plus qu’il y a un an.

En 2018, plus de deux tiers des cyberacheteurs avaient effectué leurs achats de Noël en ligne. Cette année, près de huit acheteurs sur dix ont l’intention d’acheter leurs cadeaux sur Internet, d’après Médiamétrie. Ils envisagent de dépenser en ligne 171 euros, sur un budget total de 255 euros qu’ils ont prévu pour les fêtes (en magasin et sur Internet). C’est la même somme que l’an passé pour 70 % d’entre eux. Parmi les cadeaux les plus plébiscités pour les achats en ligne figurent les jeux et jouets (pour 36 %), suivis des produits culturels (34 %), des vêtements et des chaussures (29 %) et des cosmétiques (26 %).

Une grande partie des achats devrait être réalisée à compter du 29 novembre, lors du Black Friday, et des journées promotionnelles qui suivront. Au total, 87 % des internautes interrogés par Mediamétrie déclarent qu’ils procéderont à leurs achats de Noël à cette occasion. En 2018, 71 % d’entre eux avaient profité de cette période de bonnes affaires pour acheter leurs cadeaux de Noël, contre 69 % en 2017.

Paradoxe du Black Friday

Les ventes en ligne pourraient représenter 1,7 milliard d’euros sur cette période du Black Friday, selon l’étude menée par Médiamétrie pour le compte de la Fevad. A la faveur du Black Friday 2018, le chiffre d’affaires moyen par jour avait triplé pour les sites Internet étudiés par la Fevad.

Le Black Friday, qui a traversé l’Atlantique pour arriver dans l’Hexagone en 2013, s’ancre lentement mais sûrement dans les habitudes de consommation des Français, estime l’Observatoire Société et Consommation (L’ObSoCo). En effet, 13 % des consommateurs (soit plus de 5,5 millions de personnes) se retiennent de réaliser des achats et les réservent pour l’occasion, selon l’institut.

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Il relève tout le paradoxe de cet événement commercial « associé à la surconsommation, mais malgré tout apprécié par plus des deux tiers des consommateurs ». De fait, 66 % des Français considèrent que le Black Friday permet de faire des bonnes affaires et 57 % considèrent la démarche comme une incitation à acheter des produits dont ils n’ont pas vraiment besoin. Une « bonne illustration des tensions qui travaillent la société d’hyperconsommation, entre intensification des incitations à consommer et montée de la critique », estime L’ObSoCo.

Avec un chiffre d’affaires de 74 milliards d’euros sur les neuf premiers mois de l’année, le marché du e-commerce devrait, au dire de la Fevad, dépasser les 100 milliards d’euros sur l’ensemble de l’année, conformément aux attentes du marché.

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Pour un emploi créé chez Amazon", le commerce de proximité perd 2,2 emplois, selon une étude de Mounir Mahjoubi

Le géant américain Amazon a détruit 7 900 emplois en France en 2018, selon une note publiée par l'ex-secrétaire d'État au numérique.

Mounir Mahjoubi, lors d\'une session de questions au gouvernement, à l\'Assemblée nationale, à Paris, le 12 novembre 2019.Mounir Mahjoubi, lors d'une session de questions au gouvernement, à l'Assemblée nationale, à Paris, le 12 novembre 2019. (BERTRAND GUAY / AFP)

franceinfoRadio France

Mis à jour le 22/11/2019 | 09:23
publié le 22/11/2019 | 06:15

Dans une note d'analyse publiée vendredi 22 novembre, et que franceinfo a pu consulter, Mounir Mahjoubi, ex-secrétaire d'État au Numérique et député LREM de Paris, estime que 7 900 emplois ont été détruits en France en 2018 par Amazon. Cette année-là, l'entreprise de Jeff Bezos a réalisé un volume d'affaires en France de 6,6 milliards d'euros selon Kantar Worldpanel, cité dans cette étude.

C'est "en déduisant les embauches d'Amazon et des vendeurs tiers (12 337 emplois créés) aux suppressions d'emplois dans le commerce physique à cause des activités du site d'achat (20 239 emplois perdus)", que Mounir Mahjoubi aboutit à ce chiffre de 7 900 emplois perdus en France. Une formule résume cette constatation, "pour un emploi créé chez Amazon"le commerce de proximité a perdu 2,2 emplois. Une étude américaine réalisée en novembre 2016 par l'Institute for Local Self-Reliance avait abouti au ratio de "deux emplois supprimés aux États-Unis pour un emploi créé par Amazon".

Consommer est un acte "citoyen et politique"

Dans son étude, Mounir Mahjoubi met en cause la "productivité élevée" chez Amazon où un seul salarié "supporte un chiffre d'affaires d'environ 600 000 euros", contre "270 000 euros" pour un salarié d'une boutique. Cette compétitivité d'Amazon est due "à des pratiques managériales contestées", dénonce-t-il. "Les hommes et les femmes des centres logistiques (de la plateforme) travaillent à un rythme effréné et minuté", avec "des tâches répétitives et physiquement pénibles". Cette logique sera poussée jusqu'au bout par Amazon, qui considère ses salariés "comme des robots". La société "les remplacera demain par des machines autonomes", ce qui pourrait augmenter davantage la productivité de la plateforme et aboutir à détruire plus d'emplois dans les commerces traditionnels, redoute Mounir Mahjoubi.

Les petits commerces n'ont pas les moyens de résister face au rouleau compresseur américain et ne peuvent appliquer les mêmes méthodes : "une automatisation poussée" et "une forme de déshumanisation des relations commerciales", selon cette étude de Mounir Mahjoubi. Le député pointe par ailleurs les stratégies d'optimisation fiscale mises en place par Amazon "qui enregistre ses ventes françaises directement auprès de sa filiale luxembourgeoise""Consommer est aussi un acte citoyen et politique", rappelle l'ex-secrétaire d'État au Numérique, pour qui "les internautes doivent cliquer en connaissance de cause. Leurs achats pèsent sur l'emploi national", explique-t-il. "Les Français doivent penser aux PME françaises pour leurs achats", car "elles sont foncièrement plus humaines".

"Pas un appel au boycott, mais un appel à la diversité économique"

Pour proposer une alternative, le député de Paris va lancer "la seconde édition du Noël des PME", il a créé "un annuaire d'entreprises locales, maîtrisant leur impact social et environnemental auprès desquelles les Français peuvent réaliser leurs achats". Invité sur franceinfo vendredi, le député LREM de Paris insiste sur la nécessité d'avoir une "responsabilité collective sur : où est-ce que j’envoie mon argent ?". Mounir Mahjoubi précise qu'il ne lance "pas un appel au boycott, mais un appel à la diversité économique""Cette année, c'est 100 milliards d'euros dépensés en ligne" annoncés pour les fêtes. "Moi je dis au consommateur : décidez où ils vont, s'ils vont à l'emploi près de chez vous."

Le pire qu'on peut faire à Noël, c'est offrir des cadeaux made in China chez une entreprise américaine qui ne paie pas ses impôts en France.Mounir Mahjoubià franceinfo