Truvada - “ Les antirétroviraux ne sont qu’un aspect de la prévention ” ?

Publié par bernardescudier le 09.10.2014
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Voici un article du Nouvel Observateur du 24 Juillet 2014 - N° 2594,

intitulé : Sida. “ Les antirétroviraux ne sont qu’un aspect de la prévention ”.

Ce sont des propos recueillis par Bérénice Rocfort-Giovanni.

Le sujet :

Les homosexuels doivent-ils prendre à titre préventif ces médicaments,

comme le suggère l’OMS ? L’avis de Gilles Pialoux, vice-président de la

Société française de Lutte contre le Sida.



Le Nouvel Observateur  Que pensez-vous de la préconisation de l’OMS, qui

recommande la prise d’antirétroviraux pour prévenir l’infection par le VIH ?

Gilles Pialoux : L'OMS est dans son role en donnant une recommandation, qui

n’est en rien une injonction. Mais je ne comprends pas bien son timing.

Aucune donnée nouvelle ne semble justifier une telle annonce. La dernière

étude sur le traitement préventif du sida par des antirétroviraux date de

2010 : l’essai américain Iprex a alors démontré que le Truvada, un

médicamentcombinant deux antirétroviraux, faisait chuter de 44% le taux

d’infection par le VIH chez les hommes homosexuels. Depuis, plus rien.

L’étude française, dont je suis coinvestigateur en double aveugle du Truvada

chez des hommes homosexuels à risque, NDLR], elle, est en cours. En juillet

2012, on pouvait déjà s’étonner que les autorités sanitaires américaines

autorisent la mise sur le marché du Truvada sur la foi de cette seule étude.

Bio

    

Gilles Pialoux est chef du service des maladies infectieuses et tropicales à

l’hôpital Tenon à Paris. Il est le coauteur en 2009 du rapport Lert-Pialoux sur

les nouvelles méthodes de prévention du VIH.Tous les hommes

homosexuels doivent-ils prendre des antirétroviraux ? Quid du préservatif ?

Non, pas du tout. Tout dépend de leurs pratiques, et il y a d’autres moyens de

prévention. En fait, le message de l’OMS est ambigu. Il s’adresse à toute la

population homosexuelle masculine, sans faire de cas par cas. L’OMS veut

dire que, lorsqu’on utilise mal ou pas du tout le préservatif, on pourrait

prendre des antirétroviraux. Ces médicaments ne sont qu’un aspect de la

prévention combinée, qui doit s’accompagner d’un dépistage régulier du

VIH et des autres infections sexuellement transmissibles. Ce que je redoute,

c’est qu’en promouvant uniquement de nouveaux outils de prévention

l’OMS n’aide pas à donner une image moins « ringarde » du préservatif.

Certains pays administrent-ils déjà des antirétroviraux à titre préventif ?

Seuls les Etats-Unis autorisent, depuis deux ans, la prise de Truvada par des

sujets sains, mais on n’a pas assez de recul pour évaluer cette pratique.

Il y a quelques jours, les Nations unies estimaient que la pandémie de sida

pourrait prendre fin dans quinze ans. Les recommandations de l’OMS ne

sont-elles pas surprenantes, dans ce contexte ? Non. Car même si l’épidémie

a reculé dans plusieurs pays, il est nécessaire de faire remonter le niveau de

protection chez les populations à haut risque, comme certains gays ou les

travailleurs du sexe. Les chiffres sont alarmants. En 2009, une étude menée

dans des établissements gays parisiens a ainsi révélé que 18% des

homosexuels testés étaient séropositifs. Pourquoi les contaminations

continuent-elles chez les hommes homosexuels ? Parce qu’ils ont un plus

grand nombre de partenaires et des pratiques à risque. Le barebacking

( rapports sexuels non protégés ) existe toujours. Sur les sites de rencontres

gays, certains assument totalement de ne pas mettre de préservatif. A cela

s’ajoutent de nouveaux comportements dangereux apparus il y a peu avec la

consommation de drogues de synthèse. Et puis, dans la communauté gay,

beaucoup banalisent la maladie. On le voit à l’hôpital : lorsqu’on annonce à

certains homosexuels qu’ils sont contaminés, cette nouvelle ne les

ébranle pas forcément. Où en est la recherche sur un vaccin, dont on parle

depuis quinze ans ? Un vaccin testé lors du dernier essai de grande ampleur

en 2009 en Thaïlande montrait une diminution de 31% du risque d’être

infecté. Dans le cadre d’une prévention combinée, cet outil, même imparfait,

pourrait être utile chez les personnes très exposées.


(1) ANRS-Ipergay.

 NB = Les comprimés de Truvada.

Aux Etats-Unis, ils sont autorisés chez les sujets sains depuis deux ans

damien meyer:afp - kerr y sheri dan /afp

INFORMATIONS

Si vous voulez des informations supplémentaires sur le Truvada et la

Prep consultez le site de la radio en ligne du comité des familles qui est

partenaire de Aides.

 Un débat a été organisé sur ce theme avec des interventions différentes :

d'un infectiologue, de membres d'association partenaires du projet Ipergay et

des auditeurs sous la houlette d'une journaliste Sandra Jean-Pierre.

Vous pouvez Podcastez l'émission du 10 juin 2014 en suivant ce lien :

http://comitedesfamilles.net/nos-emissions-de-radio/emission-de-radio-du-mardi-10-juin/article/bernard-escudier-derriere-l-essai

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Portrait de bernardescudier

Compléméént d'information sur l'essai Ipergay et la Prep : le professeur Pialloux est le coinvestigateur de l'essai ANRS-Ipergay.