Un jubilé émail diamant

Publié par Ferdy le 08.02.2012
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On m'a laissé entendre que ces dernières chroniques avaient quelque chose d'ennuyeux et de morbide depuis le début de l'année. Il est vrai qu'entre la solitude, les soins funéraires et les sans-abri, il commençait à flotter dans ces Turbulences une pesanteur assez préjudiciable à leur réputation.
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Aussi ai-je dû aller fouiner dans l'actualité la plus récente, à la recherche d'un sujet consensuel, drôle et distrayant. Quelque chose de léger. Pas facile. Sans doute, devrais-je modifier la liste de mes abonnements. Dans tout ce que je reçois, il n'est question que de catastrophes, de désastres climatiques ou industriels, de malheurs en tout genre parsemés d'affrontements sanglants.

C'était oublier la cour d'Angleterre. Avec Monaco, le seul refuge pour un chroniqueur de base en quête de sujets aimables et croustillants.

Donc, en ce 6 février 2012 devrait être célébré, avec toute la sobriété requise, le soixantième anniversaire de l'accès d'Elizabeth Alexandra Mary Windsor au trône d'Angleterre (1952), couronnée un 2 juin 1953, en l'abbaye de Westminster.

Je vous passe les détails que tout cet héritage lui confère (longue liste de seize pays appartenant au Commonwealth, chef de l'Amirauté britannique, gouverneur suprême de l’Église anglicane, commandant en chef des armées, etc.).

Peut-on réellement tricoter un article amusant à partir de ce non-événement ?

Née le 21 avril 1926, dans le très chic quartier de Mayfair (Londres), épouse de Philip Mountbatten, duc d’Édimbourg (auparavant prince de Grèce et de Danemark), la reine Elizabeth II réside officiellement entre Buckingham Palace et le château de Windsor. Elle possède en outre plusieurs résidences secondaires, dont les châteaux de Sandringham (Norfolk) et de Balmoral (Écosse).

Sa famille s'illustre surtout par ses mariages, ses scandales, ses divorces, ses accidents de voiture parfois mortels et ses privilèges.

Aussi inutile que populaire, Sa Majesté, âgée de 85 ans, règne en fait principalement sur le cheptel des cygnes et des corbeaux du royaume. N'ayant aucun pouvoir réel, elle s'en remet à son Premier ministre, actuellement le très conservateur David Cameron, auquel on aura appris à faire la révérence et à marcher à reculons.

On la dit excessivement snob et glaciale. Ne fréquente que la haute noblesse ou la grande bourgeoisie. Jamais ne se fâche. Vénérant les usages établis, toute innovation la dérange. N'apprécie rien tant que la compagnie de ses chiens et de ses chevaux. S'obstine à travailler inlassablement, et en pure perte, chaque jour assise au même secrétaire Chippendale depuis 1945, au premier étage de Buckingham. Experte en matière de protocole, lorsqu'il lui reste encore un peu de temps libre, elle inspecte et modifie le plan de table d'un banquet.

Classée quarante et unième femme la plus puissante du monde par le magazine Forbes, sa fortune personnelle demeure quant à elle inestimable, tant sa collection d'art ferait baver plus d'un musée prestigieux.

Souvent comparée à une ruche infructueuse et fainéante, la famille royale toujours nous fait sourire. Elle nous rappelle notre propre ancienne monarchie, son faste et son arrogance. Il n'y a que la reine au monde pour pouvoir encore entretenir des écuyers, afin de circuler parfois en carrosse ou en calèche, lorsque les Rolls-Royce du Palais viendraient à manquer de panache à l'occasion d'un cortège officiel.

Son goût vestimentaire nous a toujours paru assez désuet ou ridicule. C'est peut-être en cela qu'elle est touchante. Elle attire les touristes.

Si le gouvernement lui octroie une petite allocation annuelle pour ses dépenses courantes (la liste civile), celle-ci est bloquée depuis 1990 à environ 9,2 millions d'euros, lorsque le budget alloué à l'ensemble de la famille royale (the Royal Household) se trouve à la baisse cette année (moins 14%), plafonnant autour de 34 millions d'euros.

Certes, la reine bénéficiera exceptionnellement cette année d'une petite facilité de caisse de 1,14 million d'euros, afin de couvrir une partie des frais générés par le 60ème anniversaire de son règne. Autant dire, une goutte d'eau dans les fontaines des palais et châteaux de la souveraine. Même si les dépenses somptuaires prévues pour les cérémonies et les réceptions ont dû être revues à la baisse.

Le Royaume-Uni affiche un taux de chômage record dans son histoire (8,3%, soit 2,64 millions de personnes), soumis à un plan d'austérité drastique, un record mondial des déficits publics, une croissance quasi nulle, une économie au bord de la récession et un taux d'inflation estimé à 5%.

Aussi, les frasques de la famille royale pourraient finir par lasser les sujets de Sa Gracieuse Majesté qui voient disparaître progressivement la plupart des services publics.

J'avais annoncé un papier léger. Effectivement j'aurais pu m'en tenir au cheptel des cygnes et autres corbeaux de Buckingham. Mais non, il a fallu que j'aille traquer les mauvaises nouvelles en provenance d'Outre-Manche. Incorrigible.

Commentaires

Portrait de frabro

Je ne peut m'empêcher après avoir lu cet article de penser à l'infortuné Charles, Prince de Galles, héritier du trône depuis plus de 60 ans, et dont l'avenir semble bouché par la santé insolente de sa vénérable mère.

Passer sa vie à attendre le décès de sa génitrice pour enfin accéder à un emploi auquel on est destiné  depuis sa naissance, ça doit être particulièrement horrible, sans compter tout ce qu'il a du subir en matières d'obligations, dont celle d'épouser une femme qu'il n'aimait pas et dont la popularité à très vite éclipsé sa terne existence.

Comble de malchance : voici que son propre fils le dépasse largement en notoriété et que nombre de ses futurs sujets verraient bien le témoin (pardon, le sceptre) passer directement de la grand mère au petit fils, en courcircuitant l'héritier en titre.

Du coup, j'aimerait bien crier "Longue vie à la Reine !" mais je me retient : ce serait trop dur pour Charles...

Perplexe