AAH : la Cour des comptes au apport

18 Décembre 2019
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Fin novembre, la Cour des comptes a publié un rapport thématique sur l’allocation aux adultes handicapées (AAH). L’AAH a été créée en 1975. Elle est destinée à assurer un minimum de ressources aux personnes en situation de handicap qui ne disposent pas de revenus d’activité. Financé intégralement par l’État, ce minimum social, d’un montant mensuel de base de 900 €, est perçu par plus de 1,1 million de personnes, pour un coût de 9,7 milliards d’euros en 2018. Depuis six ans, le nombre de personnes allocataires de l’AAH rapporté à la population a augmenté de manière très rapide. Logiquement, sa part dans le budget de l’État progresse également à un rythme « soutenu » : elle est passée de 2,8 % en 2007 à 4,5 % en 2017, soit une hausse annuelle de 400 M€ en moyenne, note la cour des comptes. Ces deux paramètres ont conduit l’institution à « examiner les mécanismes d’attribution et de renouvellement de cette prestation ».  Il existe deux types d’AAH mis en place en 2005 qui évoluent de manière très différente : « L’AAH-1, attribuée aux personnes dont l’incapacité reconnue est supérieure à 80 %, est relativement stable en pourcentage de la population. Á l’inverse, l’AAH-2, qui est attribuée aux personnes dont l’incapacité se situe entre 50 % et 80 %, et qui sont en même temps reconnues comme durablement et substantiellement empêchées d’accéder à un emploi, augmente, elle, à un rythme très rapide », rappelle la Cour. L’élargissement de la notion de handicap introduit en 2005, qui prend désormais en compte « l’interaction entre la personne, ses altérations de fonction et son environnement, vient se heurter au besoin de disposer de critères d’attribution les plus objectifs possibles », admet le rapport. Selon la définition large retenue par la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS), il y aurait ainsi 12 millions de personnes concernées par le handicap en France. L’outil actuel d’évaluation – un guide-barème par type de déficience – ne paraît plus totalement cohérent et nécessite de ce fait d’être revu, estime la Cour. Dans son rapport, la Cour pointe des difficultés concernant les critères d’appréciation du niveau de handicap (chaque département semble agir différemment). « Les obligations légales en matière de connaissance statistique des types de handicap ne sont pas respectées par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Ainsi, le suivi des types de handicap des allocataires de l’AAH (moteur, sensoriel, viscéral, psychique, etc.) est très insuffisant et ne permet pas d’approche de type épidémiologique, contrairement à la volonté du législateur en 2005 », note d’ailleurs la Cour des comptes. Dans son rapport, la Cour indique que, depuis 2007, les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ont fait face à une augmentation massive des demandes concernant l’AAH, mais aussi les cartes de stationnement et d’invalidité, la prestation compensatoire du handicap, l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, etc. ». En 2017, les MDPH ont été saisies de 4,5 millions de demandes de toutes catégories et ont préparé 550 000 décisions relatives à l’AAH. Dans son rapport, la Cour indique que les « modalités d’attribution de l’AAH laissent de grandes marges d’appréciation aux équipes des MDPH. Il en résulte d’importantes disparités de pratique entre départements, qui posent une question d’équité territoriale et d’égal accès à ce dispositif de solidarité nationale ». Dans son rapport, la Cour des comptes formule neuf recommandations pour « améliorer le fonctionnement de l’AAH, afin notamment de garantir une meilleure équité territoriale, un égal accès à ce dispositif, une amélioration des liens entre AAH et accompagnement médico-social ou professionnel des bénéficiaires, et un renforcement des procédures de contrôle ». Alors que préconise la Cour des comptes ? Il y a des mesures budgétaires comme le fait de présenter de manière distincte les crédits prévus pour l’AAH-1 et l’AAH-2. Il est aussi recommandé » de « rétablir la cohérence du guide-barème entre ses principes généraux introductifs est les développements par déficience, en précisant que le seuil de 50 % d’incapacité n’est atteint qu’en cas de gêne notable dans les trois domaines de la vie quotidienne, sociale et professionnelle ». La Cour demande aussi de hausser le ton vis-à-vis des MPDH, notamment en les sanctionnant financièrement en cas d’ « absence de mise en œuvre par les MDPH de leurs obligations légales en matière de suivi statistique ». Autre point important : le fait de « conditionner l’attribution de l’AAH-2 à une prise en charge médico-sociale adaptée, quand celle-ci est possible ». La Cour demande aussi d’instaurer « un entretien d’évaluation de l’employabilité préalablement à l’attribution de l’AAH-2. La Cour avance aussi sur plus de contrôle puisqu’elle demande que soit instituée a minima une « contre-visite médicale obligatoire avant toute première attribution de l’AAH. Renforcement encore du contrôle dans la recommandation suivante : « Mettre en place des mécanismes de contrôle et d’attribution à bon droit, en systématisant le contrôle interne au sein des MDPH et en créant une mission nationale de contrôle, compétente sur le plan médical ».