Abus sexuels : Tony Anatrella sanctionné

24 Juillet 2018
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Des années durant, Tony Anatrella, prêtre et psychanalyste, a été la figure de proue d’une virulente homophobie cléricale. De tribune en ouvrage, d’interview en prêche, il a passé des décennies à pourfendre les demandes de reconnaissance et d’égalité des droits et à entretenir un discours homophobe largement repris. Et puis, au fil des ans, celui qui était surnommé le "psy de l'Église" a été mis en cause dans des affaires présumées d'abus sexuels sur de jeunes hommes… comme un boomerang. Le 4 juillet dernier, l'archevêque de Paris, monseigneur Michel Aupetit, a sanctionné le prêtre et psychanalyste Tony Anatrella, soupçonné d'abus sexuels. Tony Anatrealla est désormais interdit de ministère, de confession et d’activité thérapeutique, indique l’AFP. Tony Anatrella, 77 ans cette année, doit définitivement renoncer à "toute activité thérapeutique", une exigence du cardinal André Vingt-Trois confirmée par son successeur à la tête du diocèse de Paris. Il faut dire qu’on lui reproche d’avoir justement dans le cadre de son activité thérapeutique eu des relations sexuelles présumées avec de jeunes hommes qu’il était supposé aider à ne pas être homosexuel ! Par ailleurs, "Monseigneur Aupetit lui a signifié qu'aucun ministère sacerdotal ne lui serait plus confié. Il lui a demandé de ne pas entendre la confession des fidèles, de renoncer à la pratique de la direction ou de l'accompagnement spirituel et également de renoncer à toute intervention publique sans son accord", a détaillé le diocèse dans un message adressé à l'AFP. C’est en 2016, dix ans après de premières plaintes, que de nouvelles révélations contre lui avaient été rendues publiques à l'encontre de ce prêtre du diocèse de Paris accusé de "thérapies déviantes" sur de jeunes hommes dans son cabinet de psychanalyste. L'AFP rappelle qu’elle avait recueilli le témoignage d'un accusateur qui avait évoqué une "bonne dizaine" de "séances spéciales" en 2010-2011: "une demi-heure d'attouchements", suivie d'"une demi-heure de débriefing sur le ressenti, les émotions". De son côté, Tony Anatrella a toujours nié avoir eu le moindre geste déplacé… ce qui est logique vu le rôle d’homophobe de service qu’il a endossé durant des années. Reste que trois plaintes devant la justice pénale de la République pour "agressions sexuelles" n'avaient pas abouti, en 2008, notamment parce que les faits étaient prescrits. Faute de résultat devant la justice laïque, plusieurs accusateurs se sont alors tournés vers l'Eglise. Tony Anatrella a longtemps été bien en cour auprès de la haute hiérarchie catholique. Son cas était donc très délicat. "Spécialiste en psychiatrie sociale", Tony Anatrella bénéficie d'un titre de "Monseigneur" sans être évêque. Connu pour ses écrits sur la sexualité des adolescents, il a été "consulteur" auprès de deux conseils pontificaux (famille et santé) au Vatican. Associé à la préparation du premier guide de l'épiscopat français "Lutter contre la pédophilie" en 2000, ce pourfendeur de "l'idéologie du genre" fut l'un des inspirateurs de l'instruction romaine visant à écarter de la prêtrise les hommes présentant une orientation homosexuelle. Interrogé par l'AFP, l'avocat (laïc) du prêtre-psy a dénoncé une "décision politique scandaleuse" de la part du nouvel archevêque de Paris, qui selon lui "se protège" après les scandales d'abus sexuels ayant touché plusieurs évêques ces derniers mois. "Je me réserve aujourd'hui le droit d'une action en justice contre Michel Aupetit", a souligné Me Benoît Chabert, faisant valoir que la sanction de son client allait "contre les faits". En outre, "il y aura un recours" devant la justice de l'Eglise, introduit par l'avocat ecclésiastique du prêtre, contre la sanction décidée par l'archevêque, a ajouté Benoît Chabert. Tony Anatrella, qui continue de clamer son "innocence", n’exerce plus comme thérapeute depuis mai dernier.