Addictions : l'alcool n'est pas financé

22 Octobre 2018
4 188 lectures
Notez l'article : 
0
 

L'alcool est « le grand absent du financement » du fonds de lutte contre les addictions aux substances psychoactives, s'insurgent des médecins dans une lettre ouverte à la ministre de la Santé, Agnès Buzyn. Dans ce courrier du jeudi 11 octobre,  les signataires lui demandent de faire participer l'alcool — en le taxant plus fortement — au financement de ce fonds de prévention, dans le cadre du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2019 (PLFSS 2019). Le projet prévoit que le champ d'intervention de ce fonds, constitué de 100 millions d'euros provenant des taxes du tabac, soit élargi aux addictions liées aux substances psychoactives (alcool, cannabis), explique le professeur Michel Reynaud, président d'Actions addictions, cosignataire de cette missive, cité par l’AFP. Dans le cadre de la prévention, le projet de financement de la Sécurité sociale prévoit de faire bénéficier ce fonds de nouvelles ressources « correspondant au produit des amendes forfaitaires sanctionnant la consommation de cannabis (dix millions d'euros en 2019) ». Cette augmentation de dix millions d'euros « relève d'un effet d'annonce sans commune mesure avec la dimension du problème » de l'alcool en France, estiment les huit signataires. Au-delà des 49 000 décès par an directement causés par sa consommation, l'alcool est la deuxième cause de cancer, la première cause de mortalité chez les 15-30 ans, la première cause de démence précoce. De plus, rappellent les signataires, l'alcool est aussi impliqué dans plus de la moitié des violences faites aux femmes et aux enfants. La prévention gouvernementale en matière d'alcool se limite à une « discussion picrocholine », dérisoire, sur la taille en millimètres du pictogramme « interdit aux femmes enceintes », déplorent les signataires. La loi de financement de la Sécurité sociale doit intégrer dès 2019 « une taxe sur les boissons alcoolisées » proportionnelle au degré d'alcool « pour financer les soins » et « une taxe sur les dépenses de publicité, y compris sur Internet, pour financer la prévention », expliquent-ils. Outre le Pr Reynaud, les signataires sont l'épidémiologiste Catherine Hill, les professeurs Amine Benyamina (psychiatrie, addictologie), Gérard Dubois (santé publique), Serge Hercberg (nutrition), Albert Hirsch (pneumologue), ainsi que le président et vice-président de l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA) Nicolas Simon et Bernard Basset.