Afrique occidentale : du nouveau côté drogues

27 Septembre 2018
1 168 lectures
Notez l'article : 
0
 

Le 11 septembre dernier, à Dakar (Sénégal), le projet de « loi type sur les drogues » a été présenté. Il a pour but de « guider les décideurs politiques de la région pour mieux structurer leur législation en matière de drogues », explique un communiqué de l’Onusida. Comme le pointe l’institution onusienne, il est « de plus en plus communément admis que les lois actuelles sur les drogues ne sont pas efficaces et engendrent des coûts énormes ». La loi type sur les drogues montre « que les pays peuvent modifier leurs lois de manière à protéger la santé et le bien-être des personnes, tout en permettant de cibler la mise en application de la loi sur les délits les plus graves en matière de stupéfiants », autrement dit, on peut concilier objectifs de sécurité et impératifs de santé publique. « Le risque de contracter le VIH est 23 fois plus élevé chez les consommateurs-trices de drogues injectables, et pourtant ils sont toujours confrontés à des violations de leurs droits, à des environnements juridiques répressifs, et ils sont exclus des programmes sur la santé et le VIH », a rappelé Michel Sidibé, directeur exécutif de l’Onusida, à Dakar. « Il est capital que les pays adoptent une approche fondée sur les droits de l’homme, qui s’appuie sur des preuves scientifiques et englobe des services de réduction des risques afin de protéger la santé et le bien-être des consommateurs de drogues injectables et de leurs communautés ». D’où l’idée de ce projet type de loi dont le texte a été rédigé par la Commission Ouest-Africaine sur les drogues. Le texte qui a été produit indique que les obstacles qui empêchent les consommateurs-trices de drogues d’accéder aux services de santé doivent être levés. Mais le texte ne se borne pas à demander, il explique pourquoi. « Les consommateurs-trices de drogues injectables font partie des groupes les plus exposés au risque d’infection à VIH, mais ils restent marginalisés et souvent hors de portée des services sanitaires et sociaux », indique le texte de la loi type. Le texte propose de supprimer les sanctions pénales pour les consommateurs-trices de drogues et de mettre à disposition des mesures de réduction des risques. La RDR est, globalement, peu mise en application sur le continent alors qu’elle a fait ses preuves : quand de tels services sont accessibles, les nouvelles infections à VIH baissent radicalement. En ce qui concerne la consommation de drogues et la détention de drogues à des fins de consommation personnelle, la loi type prévoit des alternatives à la condamnation et à la répression. « Nos lois actuelles sur les drogues stigmatisent et pénalisent les consommateurs-trices de drogues. Pourtant, les rejeter en marge de la société ou les enfermer en nombre (…) ne résoudra pas le problème. Au contraire, la situation sanitaire ne fait qu’empirer et une pression énorme est exercée sur des systèmes de justice pénale déjà débordés », a expliqué Olusegun Obasanjo, ancien président du Nigeria et président de la Commission Ouest-Africaine sur les drogues.  La loi type sur les drogues vise aussi à améliorer l’accès aux médicaments essentiels comme la morphine et d’autres opiacés destinés à soulager la douleur. En Afrique occidentale, de nombreuses personnes se voient refuser l’accès aux antalgiques dont ils ont besoin car les médecins et les autres professionnels-les de santé ne prescrivent pas d’opiacés par crainte d’être poursuivis en justice. La loi type sur les drogues propose une protection spécifique pour le personnel médical afin de contribuer à lever les obstacles à l’accès aux antidouleurs. Reste à voir désormais ce que les États feront de ce texte… qui n’est qu’une recommandation.