Asile, immigration : le gouvernement dévoile ses projets de réforme

15 Août 2014
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Le gouvernement a présenté (23 juillet) en Conseil des ministres deux projets de loi, un sur l’asile, l’autre sur l’immigration. Ces deux textes pourraient lui valoir des attaques à droite et suscitent déjà des critiques dans le milieu associatif. Comme le pointe l’AFP, c’est la première réforme significative sur le droit des étrangers depuis l’élection de François Hollande. Les deux projets, préparés par Manuel Valls lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, sont défendus par son successeur Bernard Cazeneuve. Ces deux textes ont fait, en amont, l’objet de rapports parlementaires, de concertations et même de reports pour cause d’élections municipales : ces sujets sont trop sensibles. Ils sortent donc en plein été, histoire d’apaiser le débat. "Nous avons voulu apporter des solutions à des problèmes concrets, et non se cantonner aux positions de principe", explique une source gouvernementale à l’AFP.

Premier problème identifié : l’engorgement du système d’asile. Depuis sept ans, le nombre des demandeurs a presque doublé, pour atteindre plus de 66 000 dossiers en 2013.  Les structures d’hébergement sont totalement saturées (il manque 40 000 places pour héberger les demandeurs d’asile) et la moitié des demandeurs doivent se débrouiller par leurs propres moyens, ce qui aboutit à l’ouverture de squats dans certaines régions (Lyon, Grenoble, etc.). Le traitement des demandes prend deux ans en moyenne, ce qui complique l’expulsion des personnes déboutées. Le premier objectif de la réforme est donc de raccourcir les délais de traitement pour les ramener à neuf mois en procédure normale, à l’horizon 2017. Pour ce faire, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) bénéficieront de "recrutements supplémentaires", confirmés par le ministre de l’Intérieur lors d’une interview sur France Inter (23 juillet).

Le second projet de loi, celui sur l’immigration s’attaque à d’autres dysfonctionnements. La France attire peu de professionnels qualifiés parmi les 200 000 étrangers hors Union européenne qu’elle accueille légalement chaque année. Le gouvernement propose donc de créer un nouveau titre de séjour, le "passeport talents" valable quatre ans qui simplifiera la vie des bénéficiaires et de leur famille.

Autre problème : l’obligation de renouveler son titre de séjour tous les ans crée d’immenses files d’attente en préfecture et complique le quotidien des étrangers. Puisque 99 % des demandes de renouvellement sont acceptées, le ministère de l’Intérieur suggère de délivrer automatiquement une carte de séjour allant de deux à quatre ans après le premier titre de un an. Mais ce titre pluriannuel ne sera délivré que si l’étranger a bien suivi ses cours de français. Et la délivrance d’une carte de résident après les cinq premières années sera conditionnée à la capacité à lire et à comprendre des textes simples. Ce "parcours d’intégration" a suscité des critiques chez les défenseurs des étrangers, d’autant que le gouvernement ne revient pas sur la loi dite Besson de 2011, très décriée à l’époque dans les rangs socialistes car elle avait reculé l’intervention du juge judiciaire lors du placement en rétention de sans-papiers. Le projet de loi reste "marqué par l’obsession de la lutte contre l’immigration irrégulière et l’injonction à "l’intégration" et n’apporte pas de progrès substantiels sur le terrain des droits fondamentaux", tacle le Gisti. La Cimade estime que le gouvernement a fait le choix de "la continuité dans la répression" par rapport aux précédents gouvernements. Pour éviter "un feuilleton", le ministre de l’Intérieur souhaite que les deux textes soient examinés "dans la même séquence parlementaire". La date n’est pas encore fixée, mais cet examen ne devrait pas intervenir avant l’automne, encombré par les discussions budgétaires.