Bilans et résultats d'analyses : comment décrypter ?

19 Avril 2016
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Sorte de tableau de bord de notre santé, les bilans issus des prélèvements sanguins et urinaires informent sur l'état général et l'efficacité des traitements. Ils accompagnent les visites dans le cadre du suivi du VIH ou d'une hépatite et malgré leur régularité, les résultats d'analyses peuvent rester plus ou moins obscurs. Terminologie, valeurs, intervalles de référence, au milieu des ASAT, des polynucléaires éosinophiles et autres acronymes, on peut renoncer à lire ou à chercher à comprendre son bilan. Certain-e-s s’en remettent entièrement à l'expertise du médecin, d'autres sollicitent de sa part un éclairage ponctuel quand une valeur s'affole et tout le monde peut se référer au site ameli.fr qui explique précisément chaque ligne. Le droit du patient garantit en théorie l'accès aux résultats, sous format papier, mais dans la pratique qu’en est-il vraiment ? Quel est votre rapport à ces valeurs chiffrées ? Quelle relation tissez-vous avec votre médecin autour du bilan et cela se fait-il au détriment d’autres sujets de discussion ? Venez surfer sur les chiffres mardi 19 avril à partir de 21h, pendant le chat thématique en compagnie d’Ernesto.

Commentaires

Portrait de ernesto-seronet

Supérieur-e-s en nombre mais sous huitaine, nous avons tenté dès réception de nous emparer des bilans, des chiffres, et de leur lecture souvent déroutante pour celles et ceux qui en sont pourtant la source. Si pour une moitié des personnes la lecture des bilans biologiques ne pose pas de problèmes, pour les autres, le cerveau "n'imprime rien", passe sur les détails, et si le bilan présenté par le médecin est bon, on se contente de la synthèse qu'il donne, pour ne retenir éventuellement que le nombre de CD4, ou une valeur alertant sur la fonction rénale. Quelques fois c'est l'infectiologue qui occulte l'information et qui informe au bout d'un an la personne qu'elle est en fait HIV-controller. Pourtant, et plus généralement, le fait de se focaliser sur la charge virale (surtout quand l'indétectabilté peut être, sans incidence, temporairement perdue), et les CD4 peut occulter des problèmatiques ignorées du médecin. Celui-ci n'est pas infaillible et peut passer à côté d'un résultat important. Quand l'infectiologue semble négliger des constantes biologiques comme les triglycérides par exemple, la personne se saisit de l'information pour interroger un cardiologue averti et chercher à prévenir la répétition ou de survenue d'incidents cardio-vasculaires. Plus globalement certain-e-s, conscients que les séropositif-ve-s peuvent présenter des risques plus élévés de cancers, d'AVC, d'infarctus, militent pour une prise en charge plus globale et pluridisciplinaire par les équipes médicales, mais également une capacité à lire les résultats d'analyses : une véritable éducation thérapeutique qui confère le statut d'acteur d'une autovigilance sur sa santé, avec la conscience qu'on adhère mieux à un traitement, un suivi, si on le comprend. Alors, si pour quelques-un-e-s seuls les premiers bilans reçus au début du suivi incitent à s'informer et explorer Internet, d'autres poursuivent ainsi leur recherche : un numéro de Remaides, le site ameli.fr, sidainfoplus, des militants d'Act Up ... et c'est l'occasion d'associer le médecin à cette démarche de compréhension et d'engager un dialogue sur les avancées de la recherche. Et justement le cadre de la participation à un protocole de recherche, sur le HPV par exemple, amène à se prêter à des analyses plus complètes dont les résultats sont en théorie communiqués à la personne et constituent un plus. Il arrive cependant que le protocole ne le prévoie pas, et que, dans une cohorte comme CODEX "Extrême", qui suit les séropositifs qui contrôlent la présence du virus dans leur organisme, la restitution des données personnelles ne soit communiquée que si le participant insiste pour l'obtenir.

Quelques liens (et rappels) sur les points évoqués :

 - ameli.fr

 - sidainfoplus (les données pouvant être un peu datées)

 - Actions Traitements et une vidéo de la réunion  "VIH et Qualité de vie" : "Les bilans biologiques, un allié pour sa santé", du 19 mai 2015

 - le n° 91 du printemps 2015 de Remaides sur les bilans hépatites (pages 22 à 27)

 - la cohorte CODEX "Extrême" de l'Anrs et un blog de bernardescudier sur les derniers résultats

Vous êtes invité-e-s comme d'habitude à poster sur ce thème vos commentaires et réactions à la suite de celui-ci , et à exprimer ici vos suggestions de thèmes que vous souhaiterez aborder dans les mois à venir, ou d'évolution du "format" de ces chats thématiques.

La semaine prochaine, plongé-e-s dans ces méandres et incompréhensions, loin cependant de nous mettre la rate au court-bouillon, nous effeuillerons de singulières "Fleurs du malade" et écouterons Charles Baudelaire nous dire : J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans, un gros meuble à tiroirs encombré de bilans … A moins que, pour dissiper tous ces secrets, Alan Turing, avant de croquer le Fruit du mal, ne nous livre la clé de l'Enigma. Alors entre la piste du décryptage et celle de l'apocalypse, nous laisserons Jean Cocteau nous rappeler : "puisque ces mystères nous dépassent, feignons d'en être l'organisateur".