Drogues : L'Assemblée vote l’expérimentation des salles de consommation

12 Avril 2015
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C’est une des mesures phare de la future loi Santé. De celles qui font office de chiffon rouge à droite. L'Assemblée nationale a adopté le 7 avril dans la soirée, après plus de 4 heures de vifs débats entre la gauche et l'UMP, le principe de l'expérimentation de salles de consommation de drogue à moindre risque (SCMR), que l’opposition s’obstine à appeler "salles de shoot", pendant six ans maximum. Soutenu par tous les groupes de gauche, l'article 9 du projet de loi Santé, porteur de cette mesure, a été adopté par 50 voix contre 24, en première lecture. "Aidez plutôt les toxicomanes à guérir qu'à s'autodétruire", a lancé le député UMP de Paris Philippe Goujon, un farouche opposant à cette mesure depuis des années. Le député UMP de Vendée, Yannick Moreau, a, quant à lui atteint le point Godwin en évoquant à propos de ces salles des "antichambres de la mort". Ces salles, déjà expérimentées dans une dizaine d'autres pays (depuis plus de 30 ans en Suisse), sont destinées à des personnes consommatrices de produits majeures et précarisées, qui consomment dans des conditions d'hygiène très mauvaises. Outre une réduction des risques liés aux injections (infection par le VIH, hépatites virales, abcès, etc.) et une amélioration de l'accès aux soins des usagers de drogues les plus marginalisés, ces salles ont aussi entre autres objectifs une diminution des nuisances dans l'espace public (pas de seringues dans les lieux publics, pas de consommation dans la rue, etc.). L’article crée donc un dispositif expérimental avec des locaux gérés par les professionnels des centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques chez les usagers de drogue (Caarud), où sera autorisée la consommation de drogues apportées par les consommateurs, sous la supervision d'une équipe pluridisciplinaire, avec des professionnels de santé et du secteur médico-social. Les consommateurs détenant pour leur seul usage et consommant des stupéfiants dans ces salles ne pourront être poursuivis pour usage et détention illicite. De même, les professionnels intervenant dans ces salles ne pourront pas être poursuivis pour complicité d'usage illicite de stupéfiants notamment, s'ils agissent conformément à leur mission de supervision. Le coût de ces salles est estimé à environ 800 000 euros par an, si l'on se base sur le projet d'expérimentation parisien, a indiqué la ministre de la Santé Marisol Touraine, soulignant face aux critiques de la droite que le gouvernement consacrait, par ailleurs, 388 millions d'euros par an à la prévention et à la lutte contre les addictions. En séance, l'UMP a défendu des palanquées d’amendements de suppression et prôné le sevrage et l’abstinence. Ces salles devraient être expérimentées à Paris et à Bordeaux.