Féminicides : un Grenelle annoncé et critiqué

9 Juillet 2019
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Sous pressions. Le gouvernement a annoncé dimanche 7 juillet le lancement en septembre d'un Grenelle des violences conjugales, sans convaincre les associations en colère alors que la terrible liste des féminicides - 75 cette année selon un dernier décompte - s'allonge inexorablement. À ce Grenelle, une demande de la société civile,  s'ajouteront « une grande consultation citoyenne et une campagne » de communication « pour interpeller toute la société », a indiqué la secrétaire d'État à l'Égalité femmes-hommes, Marlène Schiappa, dans un entretien au Journal du dimanche. La veille, un rassemblement à Paris de féministes (2 000 selon les organisatrices) s’était tenu, réclamant des mesures immédiates. Dans un message sur Facebook, Emmanuel Macron a reconnu (6 juillet) que la République n'avait « pas su (...) protéger » les victimes de meurtres commis par des conjoints ou anciens compagnons. Le « Grenelle des violences conjugales », qui sera introduit par Édouard Philippe et réunira à Matignon ministres, administrations, associations et familles de victimes, s'ouvrira « le 3/9/19, en écho au numéro 3919 », la ligne téléphonique consacrée aux femmes victimes de violences, relève Marlène Schiappa dans son interview. L'annonce ministérielle a suscité une réponse cinglante des féministes de #NousToutes : « une réunion dans deux mois et des résultats dans cinq (après l'adoption du budget de l'État). Le décalage entre la mobilisation inédite de la société contre les féminicides et les réponses apportées est flagrant », estime ce collectif dans un communiqué intitulé : « Monsieur le président, les violences ne prennent pas de vacances ». « Des femmes sont en danger, en ce moment même », insiste #NousToutes après qu'une femme trentenaire a été retrouvée morte étranglée samedi à son domicile des Yvelines. Ce décès a été comptabilisé comme le 75e féminicide depuis le 1er janvier par la page Facebook qui les recense. Les chiffres de ces crimes sont particulièrement élevés : 130 femmes sont mortes en 2017 en France, tuées par leur conjoint ou ex, contre 123 en 2016, selon les données du ministère de l'Intérieur.  De son côté, le gouvernement explique « agir sans relâche ». Marlène Schiappa a rappelé le lancement d'une plateforme de signalement, le « recrutement de 73 psychologues dans les commissariats », l'augmentation des moyens du 3919 « pour donner un objectif de réponse à 100 % » des appels, l'attribution de « 100 000 euros en plus à une application, App-Elles », qui permet d'envoyer des messages d'appel à l'aide depuis son smartphone. Au total, cette politique publique mobilise « 530 millions » d'euros « cette année, un record », explique la ministre. Reste que les chiffres des crimes indiquent bien que les mesures actuelles ne suffisent pas. De son côté, la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, a reconnu sur BFMTV que l'Etat ne faisait « pas assez, et surtout pas assez vite », et rappelé avoir lancé une mission d'inspection pour détecter d'éventuelles défaillances dans les dossiers de plainte classés sans suite… alors que des plaignantes ont, par la suite, été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint.