L’OMC avance sur les vaccins

27 Juin 2022
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Il y a quelques jours s’est tenue la 12e conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Dans une tribune publiée dans Le Monde (15 juin), le politiste Cédric Leterme a rappelé que cette réunion majeure visait à sauver une institution « engluée dans la crise de la mondialisation, à rebours des urgences actuelles en matière de justice économique, écologique et sociale ». Son argumentation est claire : les crises actuelles qui se succèdent (climat, guerre en Ukraine, Covid-19…) mettent, à chaque fois, en lumière la « faillite complète de la mondialisation néolibérale ». « En effet, quand celle-ci n’est pas directement à l’origine de la crise, elle en aggrave les conséquences, particulièrement pour les populations et régions les plus vulnérables de la planète », tacle Cédric Leterme. Il note que l’institution, créée en 1994, est « l’une des institutions-clés de la mondialisation néolibérale » qui vise « avant tout à promouvoir la libéralisation commerciale (et les intérêts des multinationales qui en profitent), y compris au détriment de l’environnement, des droits des travailleurs ou encore du droit au développement des pays du Sud ». Parallèlement, l’institution est aussi « réputée pour être particulièrement fermée à la participation de la société civile, même à titre consultatif ». Du fait des pressions de la Chine, des États-Unis, etc., l’institution est, aujourd’hui, dans une situation de crise. Dans ce contexte, il était beaucoup attendu de la 12e conférence ministérielle de juin, dont le programme était chargé, puisqu’il était question de sécurité alimentaire, de pêche et des brevets sur les vaccins anti-Covid. La directrice générale de l’OMC, Ngozi Okonjo-Iweala, s’était fixé comme objectif : un accord entre pays sur au moins un ou deux sujets au programme. Dans les faits, ce sont deux textes en lien avec la Covid-19 qui ont été discutés : un premier texte visait à faciliter le commerce des biens médicaux nécessaires à la lutte contre les pandémies, tandis qu'un second texte — de plus grande envergure —demandait la levée temporaire des brevets sur les vaccins anti-Covid ; une demande forte de l’Inde et du Brésil, mais aussi des États-Unis, depuis l’arrivée de Joe Biden à la présidence. Dans sa tribune, Cédric Leterme prend cet exemple pour démontrer un des problèmes actuels de l’OMC : la non-prise en compte des demandes des pays émergents, y compris sur des sujets où c’est une « question de vie ou de mort ». « C’est le cas en ce qui concerne les négociations autour d’une levée temporaire des brevets dans le cadre de la lutte contre la Covid-19, dans lesquelles les pays riches, à commencer par ceux qui composent l’Union Européenne, affichent un cynisme criminel », dénonce le chercheur. Alors que s’est-il passé sur ce sujet au terme de cinq longues journées d’échanges ? Après deux ans et demi de lutte contre la pandémie de Covid-19, les États membres ont réussi à s’accorder sur la « facilitation du commerce des biens médicaux nécessaires à la lutte contre les pandémies ». Un sujet d’importance pour éviter que le commerce des ingrédients et matériels ne soit restreint au moment où on en a le plus besoin, note Le Monde. Grande avancée : la levée temporaire des brevets protégeant les vaccins anti-Covid-19 destinés aux pays en développement a également été adoptée. Ce sujet a été le cadre de vives batailles entre le lobby pharmaceutique (opposé à cette mesure), les demandes de certains pays et les revendications de nombreuses ONG. L’idée est de faciliter la production de sérums pour tendre vers un accès universel à la vaccination anti-Covid ; sans cela, il ne sera pas possible de mettre fin à l’actuelle pandémie et à ses incessantes vagues. C’est « un ensemble de résultats sans précédent. Il y a longtemps que l’OMC n’avait pas obtenu un nombre aussi important de résultats multilatéraux. Les résultats démontrent que l’OMC est capable de répondre aux urgences de notre époque », a déclaré, satisfaite, Ngozi Okonjo-Iweala, devant les chefs-fes de délégation des 164 pays membres de l’organisation. Il n’en demeure pas moins que les succès du jour n’annulent pas les problèmes de fonds auxquels l’OMC reste confrontée.