Mayotte : quelques vérités utiles à rappeler

15 Mars 2018
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Dans un communiqué (14 mars), la Cimade commente les événements de Mayotte et rappelle "quelques vérités utiles". "Les problèmes d’insécurité sont réels à Mayotte, et nous exprimons notre solidarité envers toutes les personnes victimes d’agressions", avance l’organisation non gouvernementale. "Cependant, les affirmations reliant violences et immigration ne reflètent pas la complexité de la situation sur l’île (…) Il faut rappeler que les difficultés du département sont essentiellement d’ordre socio-économique, avec 84 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté, sans distinction de nationalité. Mayotte est le département français le plus pauvre, et pourtant le coût de la vie y est plus cher qu’en métropole", pointe la Cimade. "Mayotte est le département où l’Etat investit deux à trois fois moins dans la santé et l’éducation par rapport à la métropole", explique-t-elle. De fait, Mayotte souffre d’un "sous-investissement en matière de services publics : il n’existe qu’un seul centre hospitalier, celui de Mamoudzou, avec des antennes dispersées sur le territoire, et les services de santé manquent cruellement de moyens". Pour la Cimade : "Renforcer les forces de l’ordre est une chose, mais augmenter le nombre de personnels médicaux et d’enseignants serait une solution bien plus pérenne". Par ailleurs, rappelle la Cimade, "Mayotte est également un département où les lois françaises ne s’appliquent pas de la même manière, notamment en termes de droits sociaux : il n’y a ni  couverture maladie complémentaire servie par l’assurance maladie, le revenue de solidarité active (RSA) est deux fois moins élevé qu’en métropole… pour toutes et tous, le système est dérogatoire à bien des niveaux". Dans son communiqué, la Cimade revient aussi sur quelques éléments particulièrement caricaturés ces derniers temps… Ainsi si 40 % de la population est étrangère à Mayotte, plus de la moitié est en situation administrative régulière ; ce qui n’est pas souvent dit. "A Mayotte donc, étranger ne signifie pas être dans l’illégalité, malgré les affirmations péremptoires de responsables locaux et nationaux qui alimentent ces fantasmes sur "l’invasion" et l’explosion des flux migratoires", dénonce la Cimade. D’ailleurs, les rapports de l’INSEE montrent que les flux migratoires et la part de personnes étrangères sont relativement stables entre 2012 et 2017. "Par ailleurs, si certaines personnes restent en situation irrégulière pendant des années, c’est surtout parce qu’il est très difficile d’obtenir un titre de séjour, quelle que soit l’intensité ou l’ancienneté des liens avec l’île, note la Cimade. Certains critères restrictifs de régularisation n’existent dans aucun autre département français, notamment pour les jeunes majeurs. Les démarches en préfecture sont extrêmement laborieuses et durent au moins un an voire plusieurs années". Même l’aide médicale d’Etat, levier essentiel de santé publique dans tous les autres départements français, n’existe pas. Face aux enjeux réels auxquels fait face Mayotte, La Cimade plaide pour : un développement durable du département, et une coopération qui profite véritablement au développement de la région ; permettre une régularisation des personnes étrangères présentes dans le département ; supprimer les régimes dérogatoires pour toutes et tous et aligner la législation applicable à Mayotte sur le régime de droit commun ; investir dans la santé et l’éducation pour toutes les personnes habitantes de l’île.