Médecins et labos en grève

2 Décembre 2022
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« Un coup de semonce », voire le combat de « la dernière chance pour sauver la médecine de terrain » : des milliers de médecins et biologistes libéraux-les ont fermé leurs cabinets ou laboratoires les 1er et 2 décembre 2022, les uns-es pour réclamer des hausses de tarifs, les autres pour s'élever contre une ponction de leurs bénéfices prévue dans le PLFSS 2023. Ce « mouvement historique » a été initié par le jeune collectif « Médecins pour demain », explique l’AFP. Un collectif qui a rassemblé en quelques semaines près de 15 000 membres sur Facebook, symptôme d'une colère qui se répand parmi les 110 000 praticiens-nes libéraux-les en exercice. Avec pour revendication le doublement du tarif de la consultation (de 25 à 50 euros), ce groupe a rallié les syndicats à sa cause. Ceux-ci y voient un moyen de peser dans la négociation ouverte avec l'Assurance Maladie en vue d'un nouvel accord pour les cinq prochaines années. La pression passe aussi par la rue, avec des rassemblements organisés dans les grandes villes. À Toulouse comme à Rennes et Marseille, environ 200 personnes se sont réunies. À Nantes, ils étaient 450, tandis qu'en Corse un tiers des 300 médecins libéraux de l'île s'étaient déclarés-es grévistes. À Paris, les blouses blanches étaient « un bon millier », selon les organisateurs-rices, 700 selon la préfecture de police devant le ministère de la Santé. La présidente du syndicat FMF, Corinne Le Sauder, a affirmé que « donner des moyens à la médecine libérale, c'est aussi sauver l'hôpital ». « Cinquante euros, ça peut paraître complètement fou, mais c'est un point sur l'horizon pour s'approcher de la moyenne européenne » du tarif de consultation, autour de 45 euros, fait valoir Jérôme Marty, du syndicat UFML, avançant « 75 % à 80 % » de cabinets fermés, quand le collectif Médecins pour demain en recense « plus de 10 000 ». Des chiffres à « prendre avec du recul », relativise Thomas Fatôme, qui attend les données de remboursement « en tout début de semaine prochaine » pour « mesurer la réalité du mouvement ». Le patron de l'Assurance Maladie a indiqué à l'AFP « prendre avec sérieux » les attentes des médecins, tant « sur leurs conditions de travail » qu'en termes de rémunérations. Mais s'il entend « proposer des revalorisations » dans le cadre des négociations, il souhaite aussi « répondre aux attentes de la population » en matière d'accès aux soins. Doubler la consultation à 50 euros coûterait 7 milliards d'euros à la Sécurité sociale, alors qu'avec les divers forfaits versés aux praticiens-nes, ceux-ci perçoivent déjà 35 euros en moyenne par acte. De leur côté, les syndicats de médecins présentent la hausse des tarifs comme un « choc d'attractivité » vers une médecine de ville en manque criant d'effectifs, écrasée par les tâches administratives au détriment du soin, et qui n'attire plus les jeunes. « Si nous ne sommes pas entendus, nous appellerons à la grève dure et illimitée à partir du 26 décembre », a déjà prévenu Médecins pour demain. Les médecins ne sont pas seuls-es dans ce mouvement. Pointés du doigt pour leurs profits record liés aux tests Covid-19, les laboratoires d'analyses refusent, eux, la ponction de 250 millions d'euros par an inscrite dans le budget de la Sécurité sociale. « Ce coup de rabot entraînera une fermeture des laboratoires de proximité », s'est alarmé François Blanchecotte (Syndicat des biologistes), au nom d'une profession qui emploie 52 000 salariés-es et pourrait perdre selon lui 400 de ses 4 200 sites actuels. Le secteur, qui revendique « 90 à 95 % » de laboratoires en grève, a proposé de « rendre » 685 millions d'euros sur quatre ans, soit « près de 80 % » de ses bénéfices depuis 2020. Leur mouvement de fermeture était prévu sur trois jours. « Si le gouvernement ne saisit pas la possibilité de dialoguer, son entêtement va nous obliger à (...) prendre des dispositions encore plus graves et difficiles à supporter », a d’ailleurs menacé François Blanchecotte.