Migrants : les associations mettent la pression

14 Janvier 2018
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Les associations ont durci le ton le 10 janvier dernier sur le projet de loi "asile et immigration": elles vont contester devant le Conseil d'Etat une circulaire de Gérard Collomb très controversée sur le recensement des personnes migrantes. Vingt-six associations actives dans l'hébergement et l'aide aux personnes étrangères (dont la Fédération des acteurs de la solidarité, Emmaüs, le Secours catholique, Médecins sans frontières, la Fondation Abbé Pierre, etc.) ont annoncé qu'elles saisissaient le juge des référés du Conseil d'Etat pour obtenir la suspension de la circulaire du 12 décembre organisant le recensement des migrants dans les centres d'hébergement d'urgence, qu'elles dénoncent comme un "tri". Ce texte est présenté par le ministère de l'Intérieur comme le moyen de connaître les publics hébergés et de les orienter en fonction de leur situation (personnes réfugiées, personnes déboutées, etc.). Mais il "autorise, sans base légale, des équipes relevant du ministère de l'Intérieur à pénétrer dans des centres d'hébergement protégés pour y réaliser des contrôles", ont accusé les associations dans un communiqué commun. "On veut mettre un coup de pression pour montrer qu'on n'est pas dupes", a affirmé à l'AFP Florent Gueguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité (ex-Fnars). Quelques heures plus tôt, la Conférence des évêques de France (CEF) a pris part au débat, estimant que les centres d'hébergement d'urgence, qui accueillent migrants et SDF, "devraient être sanctuarisés".  "Ce sont les seuls lieux où ces gens peuvent avoir une protection. (...) Si les agents de l'Etat viennent non pas pour apporter des informations mais pour faire de la sélection", les migrant-e-s "ne viendront plus" et "se retrouveront dans la rue", a alerté le père Carlos Caetano. De plus, la "présentation des dispositions du projet de loi", que les associations ont reçue mercredi 10 janvier, n'a fait qu'alourdir le climat, indique l’AFP. Le texte aligne les mesures techniques, dont beaucoup sont déjà très contestées par les défenseurs des personnes étrangères pour leur caractère coercitif. La durée maximale de rétention est doublée à 90 jours, un alignement sur la moyenne européenne. Comme prévu, le gouvernement a renoncé au très polémique concept de "pays tiers sûr" où une personne demandeuse d'asile aurait, dans certains cas, pu être renvoyée. Pour le reste, le texte panache les mesures d'accueil (réduction des délais de traitement des demandes d'asile à six mois, extension de la réunification familiale pour les mineurs...) et de fermeté (augmentation de 16 à 24 heures de la retenue pour vérification du droit au séjour, durcissement de l'assignation à résidence, réduction des délais de recours pour les déboutés de l'asile, etc.). C'est une "vision technocratique et inhumaine des migrants", a dénoncé Malik Salemkour, président de la Ligue des droits de l'Homme, tandis que Françoise Sivignon, la présidente de Médecins du Monde, s'inquiétait de "vraies brèches dans le droit d'asile". C’est désormais le Premier ministre qui a la main sur le dossier. Il est prévu que le projet de loi "immigration et asile" soit présenté en conseil des ministres en février.