Préservatifs vs masques : ça ne passe pas

3 Septembre 2020
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Mardi 25 août 2020, un Conseil de défense sanitaire réunissant plusieurs ministres soulève la question de la gratuité des masques pour les élèves. Un-e des ministres présents-es justifie l’opposition à cette décision en comparant la Covid-19 avec le VIH. Le Monde rapporte ses propos sans nommer le-la ministre en question : « On ne paie pas des préservatifs à tout le monde, alors que le sida tue lui aussi ! Ce n’est pas à l’État de prendre en charge cette dépense, d’autant plus que la situation est amenée à durer ». Cette petite phrase ne manque pas de faire réagir les activistes de la lutte contre le VIH. Aurélien Beaucamp, président de AIDES, tweete : « Des propos franchement dégueulasses qui rappellent clairement l’aveuglement de l’État dans les années 80 dans la gestion du sida et dans la prévention au VIH ». De son côté, Florence Thune, directrice générale de Sidaction, ironise sur les carences de l’Éducation nationale en matière de prévention/éducation sexuelle : « Monsieur le ministre, qui que vous soyez, plutôt que de comparer le masque aux préservatifs, assurez-vous que tous les ados aient leurs trois heures d’éducation à la sexualité par an. Cela nous aidera au moins à combattre le VIH (l’autre virus...) ». Cette colère est légitime. D’abord les préservatifs sont remboursés par la Sécurité sociale depuis novembre 2018 et accessibles gratuitement depuis les années 80 dans de nombreuses structures (associations, planning familiaux, certaines infirmeries de lycées, etc.). La Prep, autre outil de protection très efficace contre le VIH, est également remboursée à 100 %. Ensuite, cette déclaration entretient l’amalgame entre VIH et sida. En France plus de 90 % des personnes vivant avec le VIH sont sous traitement, avec une charge virale indétectable, des défenses immunitaires stables et une espérance de vie normale. Elles n’ont pas raison de passer en stade sida et encore moins d’en mourir. En 2018, le nombre de diagnostics en stade sida en France était estimé à 1 205 selon Santé Publique France. Cependant, le stade sida n’est pas irréversible, grâce aux traitements antirétroviraux (ARV), la majorité des personnes retrouve une charge virale indétectable et des CD4 stabilisés. Les décès directement liés au sida sont donc très minoritaires en France et concernent principalement des personnes dépistées très tardivement, avec des années de vie avec le VIH sans accès aux ARV. Une telle méconnaissance de l’épidémie de VIH venant d’un-e membre du gouvernement a de quoi laisser perplexe. Espérons que la réponse du milieu associatif à cette phrase, plus que malheureuse, aura été entendue par ce-cette ministre mystérieux-se dont personne ne connait le nom.