Prostitution : le Sénat s'oppose à la pénalisation des clients

16 Octobre 2015
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Le Sénat a majorité de droite s'est opposé le 14 octobre dernier en deuxième lecture, à la pénalisation des clients des prostituées, comme il l'avait déjà fait en première lecture. 190 sénateurs ont voté contre un amendement du gouvernement rétablissant l'article de la proposition de loi renforçant la lutte contre la prostitution qui prévoit cette pénalisation. Cet article avait été supprimé lors du passage en commission avant même les débats. Se sont opposés à la pénalisation : l'ensemble du groupe les Républicains (lR), 16 UDI-UC, 14 RDSE (à majorité PRG), 9 PS et 7 écologistes. 117 ont voté pour, soit 91 PS, 11 UDI-UC, 11 CRC (communiste, républicain et citoyen), 2 écologistes, 1 sénateur lR et 1 sénateur RDSE. "Une loi qui protège les prostitutées et responsabilise les clients reste nécessaire", a réagi la ministre de la santé Marisol Touraine. "Avec Pascale Boistard", la secrétaire d'Etat chargée des droits des femmes, "je reste déterminée". Le texte devra faire l'objet d'une commission mixte paritaire (sept députés, sept sénateurs) chargée de trouver une version commune. En cas d'échec, c'est l'Assemblée, qui a voté par deux fois la pénalisation, qui aura le dernier mot, rappelle l’AFP. L'amendement gouvernemental prévoit "que l'achat d'acte sexuel soit sanctionné par une contravention de cinquième classe (1 500 euros maximum) et que la récidive soit punie d'une amende de 3 750 euros". "Il permet d'indiquer la responsabilité des personnes achetant un acte sexuel, alors que la prostitution est source de violences. Il vise à dissuader la demande, et ainsi à décourager les réseaux de traite et de proxénétisme en rendant le territoire français moins lucratif et donc moins attractif pour leurs trafics", a plaidé Pascale Boistard. "Il est temps que les clients comprennent la responsabilité qu'ils portent dans le phénomène", a déclaré de son côté le rapporteur, Michelle Meunier (PS). "L'argument selon lequel la répression des clients est inefficace ne tient pas", a jugé Chantal Jouanno (UDI-UC). "Sans demande, point d'offre ! La prostitution est un business. Les mêmes réseaux alimentent la prostitution et tous les trafics", a-t-elle ajouté. De leur côté les sénateurs hostiles à la pénalisation ont fait valoir qu'elle était combattue par des associations de travailleuses et travailleurs qui défendent leur activité comme volontaire et par certaines associations qui craignent une précarisation accrue. Pour sa part, Esther Benbassa (écologistes) a estimé que ce "texte aurait dû avoir pour autres objectifs d'instaurer un véritable accompagnement des personnes souhaitant sortir de la prostitution, une vraie lutte contre les réseaux, et une véritable éducation au respect du corps des femmes". "Dommage que ces sujets ne soient abordés que sous l'angle moral", a-t-elle ajouté. Par ailleurs, contrairement à ce qui s’était passé en première lecture, les sénateurs ont donné leur feu vert à la suppression du délit de racolage instauré par Nicolas Sarkozy lorsqu’il était ministre de l’Intérieur. Ils ont aussi autorisé l'autorité administrative à demander aux fournisseurs d'accès le blocage des sites qui auraient été identifiés comme permettant aux réseaux de traite et de proxénétisme d'organiser leur activité. Ils ont supprimé l'exigence de cessation de l'activité de prostitution pour la délivrance d'une carte de séjour temporaire "vie privée et familiale" délivrée à des victimes qui ont déposé plainte contre les réseaux et proxénétisme. L'ensemble du texte ainsi modifié a été approuvé par 172 sénateurs dont 141 LR, 15 UDI-UC, 14 RDSE. 31 ont voté contre parmi lesquels les 19 CRC et 10 UDI-UC. Les socialistes, les écologistes, 9 UDI-UC se sont abstenus.