Qui sont les bisexuels-les en France ?

23 Décembre 2018
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Alors qu’un certain nombre de personnes se déclarent bisexuelles, les enquêtes statistiques accordent peu de place à cette population, contribuant à faire de la bisexualité une sexualité secondaire, explique un article de l’Ined (Institut national d’études démographiques) publié le 12 décembre 2018 (1). S’appuyant sur l’enquête Violences et rapports de genre (Virage), Mathieu Trachman et Tania Lejbowicz présentent quelques caractéristiques sociales des personnes bisexuelles en France et montrent en quoi ces dernières se distinguent des personnes homosexuelles ou hétérosexuelles. « En France, 0,9 % des femmes et 0,6 % des hommes se déclarent bisexuels. La majorité d’entre eux ont eu des pratiques sexuelles avec des personnes des deux sexes (89 % des hommes et 76 % des femmes), et une grande partie se déclare attirée par l’autre sexe plus que par le même sexe (58 % des femmes et 47 % des hommes). Se dire bisexuel ne signifie donc pas nécessairement une attirance indifférenciée pour les deux sexes », explique l’article qui présente les résultats de cette étude. « L’identification bisexuelle recouvre une sexualité et une conjugalité plus souvent tournée vers l’autre sexe. Près de la moitié des femmes bisexuelles ont moins de 30 ans, tandis que les hommes bisexuels sont en revanche plutôt âgés ; les unes comme les autres sont nombreux à ne pas être en couple », expliquent les chercheurs-euses. « Si la majorité des personnes bisexuelles ont eu des partenaires des deux sexes au cours de leur vie, ces partenaires sont plus souvent de l’autre sexe. En ce qui concerne l’entrée dans la sexualité, 89 % des bisexuelles ont eu un premier rapport avec un homme, 77 % des bisexuels ont eu un premier rapport avec une femme. Pour les femmes et les hommes bisexuels, ce premier rapport avec une personne de même sexe a lieu en moyenne vers 22 ans », explique l’article. Et les chercheurs-euses de poursuivre : «  Cela ne distingue pas les bisexuelles des homosexuelles, qui ont une première expérience sexuelle avec une femme vers 21 ans. Par contre cela distingue les bisexuels des homosexuels, qui ont leur premier rapport avec un homme vers 19 ans. Si l’on s’intéresse au nombre médian de partenaires sexuels (moins sensible aux données aberrantes que le nombre moyen), les femmes et les hommes bisexuels déclarent des nombres de partenaire proches, et ces derniers sont plus souvent des partenaires de l’autre sexe, pour les femmes comme pour les hommes. Ces résultats remettent en cause l’idée d’une bisexualité qui devrait être pensée par rapport à l’homosexualité, comme une période transitoire vers l’homosexualité ou comme une homosexualité déniée. C’est aussi par rapport à l’hétérosexualité et à ses normes que la bisexualité peut être envisagée : d’un point de vue sexuel, l’identification bisexuelle peut être conçue comme une sexualité élargie aux partenaires de même sexe, mais restant souvent centrée sur les partenaires de sexe différent ».

(1) : Population & Sociétés n° 561 – décembre 2018. Mathieu Trachman, Tania Lejbowicz et l’équipe de l’enquête Virage.