Suivi gynéco : le HCE fait des propositions

18 Juillet 2018
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Les actes sexistes subis par les femmes (examens brutaux, paroles déplacées, etc.) durant le suivi gynécologique et obstétrical ne sont "pas des faits isolés" et appellent à une "prise de conscience" des pouvoirs publics. Telle est la conclusion d’un rapport du Haut conseil à l'Égalité entre les femmes et les hommes remis (29 juin) à la secrétaire d'État à l’égalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa, qui en avait fait la commande. "La meilleure contraception, c'est de fermer les cuisses", "Si je vous fais mal, c'est parce que vous êtes trop grosse", "Un stérilet à 28 ans ? Il serait plutôt temps de penser à un enfant" : au cours des derniers mois, de nombreux témoignages de femmes ont fait émerger la question des "violences obstétricales et gynécologiques" subies dans l'intimité d'une consultation médicale ou lors de l'accouchement. L’été dernier, Marlène Schiappa avait commandé un rapport pour "objectiver ce phénomène". Comme on pouvait s’y attendre, plutôt que d’entendre les témoignages, une majorité de médecins avait eu un réflexe corporatiste dénonçant un "gynéco-bashing". "Bien que, à l'évidence, tous les professionnels-les de santé ne sont pas auteurs d'actes sexistes, les chiffres et les témoignages attestent d'un phénomène relativement courant dans le suivi gynécologique et obstétrical des femmes", a déclaré à l'AFP Danielle Bousquet, la présidente du HCE, avant la remise du rapport au gouvernement. Pour ce rapport, le HCE a réalisé des auditions de sages-femmes, de gynécologues, de chercheuses et chercheurs, militantes ou directrices d'hôpital, etc. Voici des chiffres que le rapport du HCE indique : un accouchement sur cinq donne lieu à une épisiotomie (incision du périnée afin de laisser passer le bébé) : une femme sur deux sur laquelle une épisiotomie a été réalisée déplore un manque ou l’absence totale d’explication sur le motif de l’épisiotomie ; les taux d’épisiotomie – toutes grossesses confondues - sont très variables d’une maternité à l’autre : de 0,3 % (dans telle maternité de type 3 – accueillant les grossesses pathologiques et à grands risques) à 45 % (dans telle maternité de type 1 – accueillant des grossesses normales ou à bas risque) ; 6 % des femmes se déclarent "pas du tout" ou "plutôt pas" satisfaites du suivi de leur grossesse ou de leur accouchement, ce qui représente environ 50 000 femmes pour l’année 2016 ; 3,4 % des plaintes déposées auprès des instances disciplinaires de l’Ordre des médecins en 2016 concernent des agressions sexuelles et des viols commis par des médecins. Selon le rapport du HCE, une femme aura en moyenne une cinquantaine de consultations gynécologiques et obstétricales (frottis, renouvellement de contraception, interruption volontaire de grossesse, consultation pré et post accouchement...) entre ses 15 et 45 ans, soit plus que pour d'autres suivis médicaux. Or, le caractère particulièrement intime de ces consultations est "souvent insuffisamment pris en compte", note le rapport. "La formation des professionnels est centrée sur la technique au détriment de la relation humaine, et l'obligation légale d'une formation sur les violences sexistes insuffisamment déployée", pointe-t-il. Citée dans le rapport, la ministre de la Santé Agnès Buzyn estime d'ailleurs que la "formation médicale est encore très paternaliste et autoritaire". Mais pour que les pratiques changent, encore faut-il "allouer des moyens humains et financiers au secteur de la santé, et en particulier dans les maternités", estime le HCE. En 40 ans, alors que le nombre de naissances annuelles reste stable autour de 800.000, le nombre de maternités est passé de 1 747 à 517. Cette très forte diminution a eu des conséquences sur a qualité du suivi. Pour faire du suivi gynécologique et obstétrical des femmes un parcours qui n’entrave ni leurs droits, ni leur autonomie, le Haut Conseil à l’Egalité formule dans son rapport 26 recommandations, articulées autour de trois axes : reconnaître les faits, c’est-à-dire l’existence et l’ampleur des actes sexistes dans le suivi gynécologique et obstétrical ; prévenir les actes sexistes, via la formation des professionnels-les de santé, l’inscription de l’interdiction des actes sexistes dans le code de déontologie médicale, et la mise en œuvre des recommandations de bonnes pratiques existantes ; faciliter les procédures de signalement et condamner sans détour les pratiques sanctionnées par la loi, via l’information des femmes sur leurs droits, l’implication des ordres professionnels et la formation des personnels en contact avec les femmes.