Tabac, VIH et mon argent en volutes

19 Septembre 2017
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D’interview en interview, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, rappelle qu’elle s’est engagée à une forte augmentation des prix du tabac en France pour atteindre le seuil symbolique du paquet à 10 euros. Cette augmentation, du point de vue des pouvoirs publics, est le moyen le plus rapide et le plus efficace de faire baisser la consommation. Aujourd’hui, le prix d’un paquet est d’environ 7 euros. Le passage du prix à 10 euros serait une révolution. Pour une personne qui fume un paquet par jour, la facture annuelle pourrait alors s’élever à quelque 3 360 euros ; ce qui fait une somme. On peut avoir une idée assez précise de ses dépenses de tabac sur le site du CNCT (Centre national contre le tabagisme). On y explique que le coût journalier du tabac est d’environ 6 euros, de 183 euros par mois et de 2 190 euros pour une année. Si je suis fumeur (20 clopes par jour) depuis 10 ans, j’ai dépensé en tabac la somme colossale de presque 22 000 euros. On aurait déjà de quoi largement gamberger, mais à cela s’ajoutent d’autres chiffres. Celui de 78 000, par exemple. C’est celui du nombre de décès prématurés occasionnés en France par le tabac. Cela représente un coût social évalué à plus de 100 milliards d'euros ! Les chiffres permettent aussi de battre en brèche une idée reçue : le tabac rapporterait à l’Etat. La dernière évaluation faite par les économistes pour l'année 2010 et citée par le CNCT, indique que le tabac aggrave le déficit des finances publiques de près de 15 milliards d'euros par an, soit plus de 40 millions d'euros par jour. Il coûte chaque année pour la collectivité 120 milliards d'euros, soit un impôt indirect annuel pour chaque concitoyen d'une valeur de 1 846 euros. Et cela, pour quelques volutes qui vont devenir un luxe. L’augmentation régulière du prix a-t-elle changé votre consommation de tabac ? De quelle façon ? Que pensez-vous du passage du prix du paquet à 10 euros ? Est-ce susceptible de vous faire diminuer, arrêter ? Si le tabac augmentait à quoi devrait servir les sommes ainsi récupérées ? Connaissez-vous le montant annuel des aides financières pour un sevrage tabagique ? C’est autour de ces questions que l’on vous propose d’échanger mardi 19 septembre à partir de 21 heures sur le chat thématique en compagnie de Diane-Seronet.

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Portrait de Diane-seronet

Mardi 19 septembre, une petite dizaine de séronautes a échangé autour de la thématique du tabac, abordée une fois n’est pas coutume non pas sous l’angle de la santé mais sous celui du prix.

 

Au niveau individuel, combien ça (vous) coûte ?

Un des participants qui fume 3 cigarettes par jour « une après chaque repas, en gros », les achète « au détail ». Il en a pour 30 euros par mois, en moyenne (soit 360 euros l’année environ). Il pense que, même en cas d’augmentation du paquet, le prix ne bougera pas. Pour un autre, c’est un peu différent « j’aurais pu acheter une maison depuis presque 40 piges que je fume » assure-t-il, détaillant « Un paquet par jour c’est 300 euros par mois… ». Une dernière épréfère ne pas calculer », il est vrai que ça peut donner le tournis de voir les sommes dépensées sur plusieurs années…

Vous souhaitez calculer combien vous coûte votre consommation ? Il y a une calculatrice sur le site de Tabac Info Service  : http://www.tabac-info-service.fr/

 

Comment réduisez-vous vos dépenses liées au tabac ?

Que l’on débourse 30 ou 300 euros par mois pour les cigarettes, on peut avoir envie d’utiliser cet argent autrement, et donc de réduire ses dépenses liées au tabac. Pour cela, nos séronautes ont plusieurs stratégies : « je suis passé au tabac à rouler c’est moins cher (-30 à -40%) et je fume moins » explique ainsi l’un d’eux, alors qu’une autre économise 10 euros par cartouche en s’approvisionnant en Belgique. Un troisième explique « Je suis passé à la cigarette électronique et une petite clope de temps en temps: beaucoup moins cher de 49 euros la semaine à 15 aujourd’hui ». Autre solution imaginée ? Passer du tabac au cannabis « tu fumes moins, logiquement », mais même en éliminant le tabac que la plupart des Français-es mélangent au cannabis, et en produisant soi-même, il y a des coûts liés à l’installation (sans compter les risques de pénalités, cette substance étant illicite en France).

 

Que pensez-vous du paquet à 10 euros annoncé pour 2020 par la ministre de la Santé?

« C’est fou » , « c’est cher », « trop cher », « c’est 600 francs » ou plutôt 60, ou 650 ? le moins qu’on puisse dire c’est que de prime abord, la mesure fait l’unanimité contre elle, surtout quand on tente la conversion des euros au franc, et qu’on multiplie le résultat par 10 ! En fait, un paquet de cigarettes à 10 euros, cela ferait environ 65 francs. Mais à raison d’un paquet par jour, par exemple, on arrive vite à la somme astronomique de 3600 euros par an, soit 23 400 francs pour celles et ceux qui voudraient se référer à l’ancienne monnaie. Non seulement ce serait cher, mais, pense un séronaute, cela ne fonctionnerait pas : « Le fait de rendre les paquets anonymes n’empêche pas les gens de fumer, ni d’augmenter les prix. Un-e vrai-e fumeur-euse n’arrêtera pas de fumer même si on augmente les prix ». Une prévision que renforce une autre participante un peu en rogne : « Je n’arrêterai pas à cause du prix mais fout les boules de payer aussi cher le paquet de clopes ».

 

A qui profite le tabagisme massif des Français-es ?

Pour de nombreux-ses séronautes, cela ne fait aucun doute, c’est à l’état que profiterait cette manne : « il faut pas que les gens arrêtent de fumer sinon ça va coûter plus cher en retraite mais il faut pas le dire » affirme l’un, « On parle du coût pour la société mais on ne parle jamais de combien ça rapporte à l’état » avance une autre alors qu’un troisième dénonce « l’état a un discours hypocrite sur le tabac, et sous couvert de protéger notre santé il taxe et retaxe et se remplis les poches ». Un dernier avance une théorie plus précise : « Je pense que le discours anti tabac c’est plutôt un moyen pour l’état de réduire les dépenses grandissantes dans les soins que représentent les maladies liées (cancer etc) ». Le tabac rapporterait gros à l’état ? Pas vraiment si on en croit le contradiction avec le CNCT (Comité national contre le tabagisme, une association) « Même en prenant en compte les taxes (10,5 milliards d’euros), qui en tant que telles ne créent aucune richesse mais sont de simples prélèvements, ainsi que les retraites non versées du fait de la mort prématurée des personnes (environ 0,85 milliard), le coût net du tabagisme en 2010 représentait en France plus de 120 milliards d’euros, [1]. En somme, le tabac coûte l’équivalent d’un impôt indirect annuel de 1 846  euros à chaque concitoyen.

Les finances publiques sont très affectées par le tabac avec un déficit net attribuable à celui-ci de près de 15 milliards d'euros annuels. » : http://www.cnct.fr/combien-ca-coute-77/le-tabac-coute-cher-a-la-societe-1-24.html

 

Mais alors, comment devrait être dépensé l’argent supplémentaire récolté grâce à cette surtaxe? A qui devrait-il revenir ?

Pour dépenser (leur) argent supplémentaire, les fumeurs et fumeuses regorgent de bonnes idées solidaires : il faudrait que ces sommes reviennent aux plus démuni-e-s en relevant les minimas sociaux (et écrire « Utopie » sur les paquets), ou à celles et ceux qui veulent arrêter de fumer sous la forme d’une aide. Cette seconde proposition a remporté un large enthousiasme : « si on utilise l’argent en plus pour soigner les gens qui veulent s’arrêter, le problème est réglé ». Un cercle vertueux presque parfait… A part pour celles et ceux qui ne souhaitent pas arrêter !