TPE et travailleuses du sexe : une étude à Nairobi

11 Janvier 2016
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Une équipe de chercheurs a cherché à comprendre quels étaient les obstacles à l'utilisation de la prophylaxie post-exposition (TPE ou PEP, parfois appelé "traitement d’urgence") chez les travailleuses du sexe de Nairobi au Kenya (1). Les travailleuses du sexe en Afrique subsaharienne sont particulièrement exposées au VIH. Le TPE (traitement post-exposition) est disponible dans des centres de soins réservés aux travailleuses du sexe à Nairobi. Mais il semble sous-utilisé. Dans cette étude, les chercheurs voulaient évaluer la connaissance, l'accès et l'adhérence au TPE parmi les personnes bénéficiaires des centres de soins. L’étude a été réalisée au moyen d’un questionnaire anonyme proposé à des travailleuses du sexe séronégatives sans sélection préalable. En fonction des informations qu’elles ont données sur les pratiques sexuelles, les participantes ont été réparties dans des catégories de risque élevé ou faible d’exposition au VIH. L'utilisation antérieure du TPE, les connaissances et l'adhérence à cette prophylaxie ont ensuite été évaluées. 134 travailleuses du sexe séronégatives ont participé à cette étude. 64 d’entre elles (48 %) ont été classées dans la catégorie à haut risque d'acquisition du VIH. Les travailleuses du sexe à haut risque étaient moins susceptibles d'avoir entendu parler du TPE ou d'y avoir eu accès que celles à faible risque d'acquisition du VIH : respectivement 37,5 % contre 58,6 %. Parmi les travailleuses du sexe à haut risque, celles ayant eu accès à un TPE déclaraient plus aisément un traitement préalable pour une infection génitale (71,4 % contre 42 %) ou des rapports sexuels avec un homme séropositif (62,5 % contre 37,5 %) durant les six derniers mois. Cependant, seules 35,7 % des femmes à haut risque ayant accès à un TPE sont allées au bout du traitement (un mois). Celles qui ne sont pas allées jusqu'au bout, déclaraient plus aisément un précédent rapport sexuel non protégé avec un homme séropositif. En conclusion, les chercheurs notent que malgré la disponibilité du TPE pour les travailleuses du sexe de Nairobi, les femmes à plus haut risque étaient moins susceptibles d'avoir entendu parler du TPE, d'y accéder ou d'aller jusqu'au bout du traitement une fois celui-ci instauré. Les chercheurs recommandent de modifier le programme TPE dans ces centres de santé pour garantir que les travailleuses du sexe les plus à risque soient capables de bénéficier de cet outil de prévention. "La prophylaxie post-exposition (…) existe depuis près de deux décennies. Pourtant, malgré les nouvelles directives de l'Organisation mondiale de la santé (OM) publiées en 2014, elle est difficile à mettre en œuvre avec succès dans les cas d'exposition sexuelle suspectée", rappellent les commentaires de la lettre d’information "Unaids science now" (octobre 2015) concernant cette étude. "La PEP pourrait être un outil puissant de la boîte à outils de prévention par les antirétroviraux et des stratégies de prévention combinées au sens large dans les pays. Cependant, il est clair que les efforts visant à améliorer l'accès et l'utilisation nécessiteront une attention et un enthousiasme ciblés, en même temps que le soutien aux autres options de prévention arrivant sur le marché".

(1) : Olsthoorn AV, Sivachandran N, Bogoch I, Kwantampora J, Kimani M, Kimani J, Kaul R. "AIDS". 13 sept 2015.