Une personne sur deux en Afrique ignore son statut

31 Décembre 2017
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Trente-cinq ans après le début de l'épidémie, une personne sur deux en Afrique subsaharienne "ne connaît pas son statut VIH", a souligné Joseph Larmarange, démographe en santé publique à l'Institut de recherche pour le développement (IRD). Le chercheur a présenté une étude (1) sur ce sujet à l’occasion de la 19e conférence Icasa (conférence internationale sur le sida et les infections sexuellement transmissibles en Afrique). Interviewé par l’AFP, Joseph Larmarange a donc expliqué qu’aujourd’hui "plus d'une personne sur deux en Afrique subsaharienne et surtout en Afrique de l'Ouest et centrale ne connait pas son statut VIH. On sait qu'en Côte d'Ivoire 40 % des femmes et 60 % des hommes n'ont jamais encore fait de test au cours de leur vie". Comment expliquez ce retard ? "Parce que l'Afrique de l'Ouest a reçu moins d'attention que l'Afrique de l'Est et australe, où l'épidémie est plus importante. En Afrique de l'Ouest, l'épidémie est limitée dans la population générale, avec une prévalence de 1 à 2,5 %, mais concentrée sur des groupes à risques, les travailleurs et travailleuses du sexe, les hommes qui ont des rapports sexuels avec d'autres hommes et les personnes usagères de drogue. La difficulté, c'est comment toucher les personnes les plus à risque", a avancé Joseph Larmarange. Interrogé sur les nouvelles stratégies de dépistage à adopter. Le démographe a expliqué : "Il va falloir rendre le dépistage accessible de plein de manières différentes. Il faut d'une part toujours garantir le dépistage volontaire qui est à la traine aujourd'hui, c'est-à-dire que, quand quelqu'un veut faire un test, il puisse le faire facilement. On sait qu'il va falloir améliorer la proposition de test dans les consultations médicales, mais peut être en ciblant sur des consultations spécifiques. Par ailleurs il faut toujours renforcer l'activité communautaire pour les populations plus difficiles d'accès, mais même là il y a plein de gens qu'on ne voit pas. Et, là, des nouveaux outils comme l'autotest ont une place à prendre dans le dispositif en Afrique de l'ouest et centrale. L'autotest peut être proposé de différentes manières : par la "distribution secondaire", c'est-à-dire en donnant les tests à des personnes qui les redonnent ensuite à leur entourage, pour atteindre des populations cachées, comme des travailleuses du sexe occasionnelles, des homosexuels hors milieu. Et par la distribution en pharmacie, y compris dans des zones rurales et reculées. C'est la multiplication des stratégies qui va permettre d'avancer.

(1) : Etude sur les stratégies de dépistage du VIH en Côte d’Ivoire (projet ANRS DOD-CI), se basant sur une enquête nationale conduite auprès de 4 000 personnes, coordonnée par Mariatou Koné (Institut d’ethnosociologie de l’Université Félix Houphouët Boigny d’Abidjan) et Joseph Larmarange (IRD) en partenariat avec le site ANRS de Côte d’Ivoire (programme PACCI) et l’École Nationale Supérieure de Statistique et d'Économie Appliquée d’Abidjan.