Vers une carte vitale biométrique ?

10 Août 2022
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Jeu parlementaire. Le projet de loi de finances rectificative qui comprend le second volet des mesures en faveur du pouvoir d'achat voulues par le gouvernement a été adopté par le Sénat. Les sénateurs-rices l'ont voté par 225 voix contre 101. Parmi les mesures adoptées dans le texte, on trouve le lancement de la mise en place d'une carte Vitale biométrique. Les sénateurs-rices ont adopté par 242 voix contre 95 un amendement porté par Philippe Mouiller (LR) prévoyant « les premiers crédits [20 millions d’euros ont été voyés, ndlr] permettant de lancer dès l'automne 2022 le chantier de la mise en place d'une carte Vitale biométrique ». L'objectif, selon le député Philippe Mouiller, est de lutter contre la fraude, qui atteindrait « 6 milliards d'euros, selon l'estimation la plus basse ». C'est une demande forte du chef de file des sénateurs-rices Les Républicains Bruno Retailleau. Cet amendement « va accélérer les choses », a concédé le ministre délégué aux Comptes publics, Gabriel Attal, qui ne s’est pas opposé à l’amendement. Il a toutefois souligné que « l'enjeu essentiel est de recueillir l'adhésion des professionnels de santé ». Cette décision n’est pas passée inaperçue. Elle a suscité (3 août) de fortes réserves chez les professionnels-les de santé et les représentants-es des patients-es.  « C'est de l'affichage politique », a commenté, auprès de l'AFP, Agnès Giannotti, présidente de MG France, premier syndicat de médecins généralistes. « La fraude sociale est souvent mise au premier plan alors que l'essentiel du problème n'est pas là, il est dans le ciblage de la pertinence des dépenses de santé ».  « Cela revient toujours à penser que ce sont les pauvres qui font le trou dans les dépenses alors que les grosses dépenses ne sont pas là », a ajouté la Dre Giannotti. « Cela va embêter tout le monde avec un gain totalement marginal par rapport aux dépenses de santé », explique-t-elle. « Le Sénat gaspille 20 millions pour une mesure inutile et passéiste qui peut faire perdre du temps médical », a renchéri sur Twitter Philippe Besset, président de la Fédération des pharmaciens d'officine (FSPF).  Pour Arthur Dauphin, chargé de mission numérique en santé au sein de France Assos Santé, principale fédération des personnes usagères du système de soins, cette mesure « est un serpent de mer et une disposition sensationnaliste qui nous paraît en décalage avec tous les efforts réalisés depuis le Ségur de la santé, de manière concertée avec pouvoirs publics, professionnels et patients, pour sécuriser les prises en charge et faire bouger notre modèle, lui faire digérer le numérique ». La majorité présidentielle avait rejeté, fin 2020, une précédente proposition de loi des sénateurs-rices LR sur le même sujet, notamment au nom de la « protection de la vie privée et des données personnelles ».  De son côté, le ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun, a proposé, en juillet, la mise en place d'une « mission parlementaire » sur cette carte Vitale biométrique, réclamée de longue date par la droite et l'extrême droite.