VIH : du nouveau sur les réservoirs

29 Juillet 2017
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Le virus du VIH-1 provoque une infection principalement sexuellement transmissible : les épithéliums couvrant les muqueuses génitales et rectales, sont des portes d’entrée du virus dans l’organisme. En effet, lors de contacts étroits et spécifiques entre une cellule infectée et les cellules de l’épithélium, des synapses virales se mettent en place induisant la production locale de virus qui pénètrent ensuite à travers la muqueuse et l’infectent. Morgane Bomsel, directrice de recherche CNRS, et son équipe à l’institut Cochin (CNRS/Inserm/Université Paris Descartes), soutenues par l’ANRS, ont mis au point un modèle d'épithélium, comparable à celui de l'urètre du pénis, afin d’observer par imagerie en temps réel le fonctionnement de ces synapses virales. Ce modèle leur permet d'étudier ex vivo, par imagerie en temps réel, les interactions entre les cellules de l'épithélium de l’urètre et les cellules infectées (des lymphocytes CD4+) présentes dans tous les fluides corporels infectieux : sang, sperme, etc.. Les chercheurs ont ainsi pu observer qu’au cours de la première heure de contact, les cellules infectées forment une synapse virale avec l'épithélium, entraînant la production de virus à la surface épithéliale. Les virus sont ensuite transportés au travers de l'épithélium par un mécanisme de transport transcellulaire. L’établissement de ces synapses virales à la surface de la muqueuse permet un recrutement des macrophages dans l’épithélium par des signaux qui restent encore à déterminer. Les macrophages capturent ensuite le virus, s’infectent puis produisent à leur tour des virus infectieux dans le tissu, expliquent les chercheurs. Après une semaine, la production virale s’interrompt, laissant penser que des réservoirs viraux se forment dans les macrophages au sein de la muqueuse reconstruite in vitro. "Nos travaux montrent que des réservoirs viraux se forment très tôt pendant la première semaine d'infection, non seulement au niveau des cellules TCD4+ circulantes, comme on le sait depuis longtemps, mais aussi dans les tissus au niveau des macrophages tissulaires", explique Morgane Bomsel. Une deuxième étude menée par la même équipe vient confirmer ces résultats. Celle-ci a été menée sur des prélèvements de tissus de l’urètre humain, obtenus à la suite d’actes de chirurgie pour personnes trans : celles-ci étaient séropositives pour le VIH sous traitement antirétroviral et avec une charge virale dans le sang indétectable. A la suite de l’étude de ces tissus, les chercheurs ont pu observer que seuls les macrophages tissulaires contenaient du virus VIH contrairement aux lymphocytes T tissulaires qui ne sont pas infectés. L’équipe a mis en évidence pour la première fois que le VIH persiste dans les macrophages urétraux, et ce, en dépit d’un traitement antirétroviral efficace. Ces macrophages sont aussi capables, après stimulation par un traitement avec un lipopolysaccharide (mimant une infection bactérienne qui active les macrophages), de se réactiver et produire des virus infectieux, confirmant ainsi leur statut de cellule réservoir. "Les réservoirs viraux dans lesquels le virus est inaccessible au système immunitaire, sont un obstacle majeur à l'éradication du VIH chez l'Homme. Ces travaux décrivant la séquence rapide de la formation de réservoirs viraux macrophagiques au sein des tissus muqueux montrent qu'il faut également cibler très rapidement les macrophages lors de l'infection, et pas seulement les lymphocytes TCD4+, si l'on veut réussir à empêcher l'établissement de ces réservoirs", conclut Morgane Bomsel.