VIH et inflammation : nouvelle piste

30 Janvier 2023
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Recherche. Malgré le succès des traitements antirétroviraux (ARV) dans le contrôle de l’infection à VIH et la possibilité pour les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) de vivre longtemps et en bonne santé, beaucoup d'entre elles (en particulier celles qui commencent un traitement ARV après l'apparition d'une infection chronique) ont un système immunitaire stimulé qui entraîne une inflammation persistante dans l'organisme. Les chercheurs-ses ont établi un lien entre cette réponse inflammatoire et une incidence plus élevée de diverses comorbidités non liées au VIH, notamment les maladies cardiovasculaires, le diabète et certains cancers, ainsi que la mortalité. Les résultats d'une étude récente offrent une nouvelle piste pour élucider une partie du mystère de l'inflammation persistante chez certaines PVVIH, rapporte le site Aidsmap. Bien que ces résultats ne permettent pas de découvrir une cause, ils appuient l'hypothèse selon laquelle l'inflammation durable est due aux effets hérités de l'infection chronique chez les PVVIH non traitées. Pour faire simple, plus on attend avant de commencer un traitement ARV suite à une infection VIH, plus on aurait des risques d’avoir une inflammation persistante dans l'organisme et donc, en vieillissant, des comorbidités non liées au VIH. Accrochez-vous, la suite n’est pas simple : les interférons sont des protéines produites par l’organisme suite à une infection virale. En se fixant sur leurs cellules cibles, ces cytokines déclenchent  diverses réactions permettant la mise en place d'un état de résistance aux virus. Un mécanisme potentiel qui pourrait expliquer comment l'immunité spécifique au VIH favoriserait l'inflammation implique l'interféron-gamma, une cytokine antivirale. Lorsque les lymphocytes T répondent à des menaces pathogènes, ils libèrent cette cytokine, qui semble activer les macrophages — de grandes cellules dotées de multiples fonctions immunitaires, notamment la libération d'autres cytokines qui favorisent l'inflammation. Pour arriver à cette conclusion, le Dr Adam Ward et ses collègues du Weill Medical College (New York, États-Unis) ont analysé les données d'une cohorte de 99 personnes vivant avec le VIH ayant participé à l'étude A5321 de l'Aids Clinical Trial Group (ACTG), qui a étudié les réservoirs de VIH chez les personnes sous traitement ARV depuis longtemps. Tous-les les participants-es avaient connu un VIH virémique et chronique avant de commencer un traitement antirétroviral. Cela veut dire, qu’à l’époque où ils-elles n’étaient pas sous traitement, ils-elles ont connu une réactivation de la réplication virale du VIH, à la suite de l'épuisement des capacités de contrôle du système immunitaire. Cette hausse de la virémie induit une chute plus rapide des lymphocytes CD4. Au moment de leur entrée dans l'étude, les participants-es étaient sous traitement et avaient maintenu une charge virale inférieure à 50 copies/ml pendant une période moyenne de sept ans. Les chercheurs-ses soulignent que leur analyse s'est limitée à la production d'interféron-gamma et n'a pas pris en compte d'autres réponses des cellules T spécifiques au VIH, qui pourraient jouer un rôle important dans l'inflammation et l'activation immunitaire. Les auteurs-rices de l'étude concluent que leurs résultats renforcent la théorie selon laquelle les mécanismes pathogènes qui se produisent avant qu'une personne ne commence un traitement antirétroviral sont les principaux moteurs de la dérégulation immunitaire et donc de l’inflammation. Si cette théorie s'avère exacte, cela constituerait un argument supplémentaire pour permettre aux personnes vivant avec le VIH d'accéder à un traitement antirétroviral le plus tôt possible après l'infection. Par ailleurs, la compréhension des mécanismes en jeu pourrait conduire à des traitements qui préviennent ou minimisent l'inflammation, améliorant ainsi la qualité et la durée de vie des PVVIH.