Désintox - le vaccin thérapeutique anti-VIH espagnol expliqué par son investigateur
"Un vaccin permettant de ralentir le VIH élaboré en Espagne". Depuis la semaine dernière, l’info fait le tour du web, s’étalant en caractères gras : "Aussi efficace que les ARV" ; "Permet de se passer de traitements pendant un an" ; "Un vaccin contre le sida efficace à 90 %". Une couverture médiatique un poil exagérée par rapport à la réalité des résultats ? Pour le savoir, nous avons interrogé l’auteur principal de l’étude, le Dr Felipe Garcia, du service des maladies infectieuses de l’Hospital Clinic de Barcelone.

Comme souvent, tout est parti d’une dépêche de l'agence de presse AFP, suite à la publication d’une étude scientifique dans la prestigieuse revue "Science Translational Medecine". Une étude certes encourageante pour cette piste de recherche relativement nouvelle, qui implique un certain type de cellules immunitaires, les cellules dendritiques. Mais certainement pas révolutionnaire.
D'abord, ce n’est pas la première fois qu’un candidat vaccin thérapeutique cible les cellules dendritiques, dont le rôle est de présenter les antigènes (des fragments d’agents pathogènes) aux différentes cellules du système immunitaire afin de déclencher les réponses immunes. Les auteurs rappellent d'ailleurs que 12 essais impliquant au total 191 personnes ont été publiés à ce jour.
Dans cette étude, il ne s’agit pas à proprement d’un vaccin tel qu’on les conçoit classiquement, mais plutôt d’une immunothérapie nécessitant une série d’interventions en laboratoire afin d’élaborer une préparation spécifique à chaque personne, sur la base de ses propres cellules dendritiques. De façon schématique, la procédure commence par un prélèvement sanguin dont sont extraites des cellules immunitaires. Celles-ci sont mises en cultures en laboratoire, puis subissent une série de préparations avant d’être mises, in vitro, en présence de virus inactivés par la chaleur, afin de les rendre fonctionnelles (dans le jargon, on dit qu’elles sont "pulsées"). Une série de nouvelles étapes permet ensuite d’arriver à une préparation injectable sûre et utilisable chez l’humain.
Le résultat ? Modeste : le chiffre de 90 % de baisse de la charge virale VIH est trompeur, il correspond peu ou prou à une baisse d’un log de charge virale. Or, une baisse de 1 log, c’est une division par 10 de la charge virale (par exemple, de 500 000 copies à 50 000 copies, ou de 2000 à 200 copies). Pas mal, mais insuffisant pour espérer se passer des antirétroviraux, d’autant que les chercheurs n’ont pas observé cette baisse chez toutes les personnes participant à l’essai.
Enfin, plusieurs candidats vaccins ont déjà eu des résultats de cet ordre dans des essais de ce type, en phase 1. Ce ne sont que les premières données chez l’humain, qui visent à avoir une idée de la sûreté du vaccin (il a l’air bien toléré pour l’instant) et de son immunogénéicité (sa capacité à produire des réactions immunitaires). Mais certainement pas à mesurer l’efficacité précise de ce candidat-vaccin. A la lecture de la publication, il nous semblait qu’il n’y avait aucune raison de s’exciter outre-mesure. Mais simplement de saluer ce beau résultat scientifique, et de suivre les résultats ultérieurs de cette voie de recherche. Nous avons donc posé la question au principal investigateur de l’étude, le Dr Felipe Garcia, du service des maladies infectieuses de l’Hospital Clinic de Barcelone.
Vos résultats sont très encourageants, mais les medias français ne sont-ils pas trop enthousiastes ? Ils traitent le sujet comme si vous aviez "LE" vaccin thérapeutique dès maintenant. Vous semblez plus prudents...
Dr Felipe Garcia : Vous avez raison. En fait, nous avons dit que ce vaccin ne pourrait pas être commercialisé en l’état. Il a démontré l’intérêt d’un concept, mais nous n’avons pu "guérir fonctionnellement" [permettre un contrôle du virus sans prise d’antirétroviraux, avec une charge virale indétectable] aucun des participants. Or, un vaccin, pour arriver sur le marché, devra être capable de "guérir fonctionnellement" les patients. Cependant, il a été capable de produire une réponse immunitaire spécifique du VIH, qui a modifié de façon significative et durable le niveau de charge virale. En d’autres termes, notre vaccin a changé l’équilibre entre le patient et le virus. A l’issue de cette phase 1, on ne peut pas parler d’efficacité, mais simplement de preuve de concept. On sait désormais qu’obtenir un effet sur la charge virale est possible avec cette préparation. Cela mérite de nouvelles recherches, qui aboutiront peut-être, finalement à des stratégies un peu différentes. C’est ce qu’explique un commentaire à la fin de l’article.
Vous mentionnez dans le communiqué de presse une réduction de 90 % de la charge virale. Cela semble impressionnant, mais cela représente à peine une baisse d’un log, qui d’ailleurs n’a pas été observée chez les 24 participants ayant reçu le candidat-vaccin.
En fait, la baisse maximale de charge virale a été de 1,2 log (93 % de réduction de la charge virale). La baisse moyenne de charge virale au troisième mois après l’interruption des antirétrovirauxde était de 0,9 log . Trois mois après l’interruption des trithérapies antirétrovirales, une baisse du niveau de charge virale inférieure ou égale à 1 log a été observée chez 55 % (12 des 22) participants ayant reçu le candidat-vaccin, contre 9 % (1 sur 11) des participants ayant reçu le placebo. Au bout de 6 mois, la réduction n’était plus observée que chez 35 % (7 des 20) des participants ayant reçu le candidat et chez aucun des participants ayant reçu le placebo.
Ce n’est clairement pas suffisant pour permettre aux personnes de ne pas prendre leurs médicaments.
En effet. Aucun patient ne devrait arrêter le traitement antirétroviral et croire que le vaccin est une alternative aux traitements. Mais nos résultats ouvrent la porte à l’utilisation des vaccins thérapeutiques comme une stratégie qui pourrait être une alternative aux trithérapies antirétrovirales si on atteint notre objectif final, la guérison fonctionnelle des personnes séropositives. En d’autres termes, nous proposons que les vaccins thérapeutiques fassent partie du "plan de développement" des investigations sur la guérison fonctionnelle. Si une combinaison, éventuellement avec d’autres stratégies, pouvait permettre une guérison fonctionnelle pour un temps prolongé, même si cela arrivait chez une faible proportion des personnes (20 %), cela pourrait être utile à employer.
Est-il correct de dire, comme le font les journaux, que l’effet est similaire à celui des antirétroviraux et que les personnes peuvent retarder la prise de traitement antirétroviral d’un an ?
La première partie est correcte, la deuxième non. Les antirétroviraux, en monothérapie, font baisser la charge virale de 90 %, soit plus ou moins ce qu’on obtient avec le vaccin. Mais les antirétroviraux ne doivent pas être utilisés en monothérapie [sauf dans certains cas, comme les monothérapies d’antiprotéases en maintenance. Cela pourrait être la même chose avec le vaccin. Il pourrait devoir être combiné avec d’autres stratégies pour atteindre une charge virale indétectable. Si on se rappelle l’histoire des antirétroviraux, le premier à avoir été étudié a été l’AZT [en 1986] et il était capable de réduire la charge virale de 50 à 60 % en monothérapie. C’était une grande avancée, mais pas suffisante, et l’AZT a du être combiné avec d’autres médicaments [en 1996] pour atteindre une charge virale indétectable. Nous pensons que cela sera la même chose avec ce vaccin. Il est capable de changer le niveau de charge virale, mais seul il n’est pas capable de guérir les patients. Aussi, il ne pourra pas être utilisé en pratique clinique, mais ouvre la porte à de nouvelles recherches. Aussi, je suis d’accord avec vous : nous ne pourrons pas remplacer les trithérapies avec notre vaccin, même pour une seule année. Nous n’avons jamais rien dit de tel.
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Commentaires
et chica chica chic aie aie aie
Ce n'est pas un vaccin mais ça y ressemble,
tout seul il ne peut pas mais il peut quand même
mais pas trop longtemps..car il n'est pas fonctionnel
oh la la j'ai mal à la tête,
c'est pas du chinois pourtant !
on joue avec les mots, on n'a jamais rien dit de tel
allooo docteur un tel?
Pourquoi cette langue de bois en Espagne?
Ole
Viva España :-)
Merci de ces précisions
L'article et les propos du Dr Garcia sont clairs et montrent à quel point les médias et certains d'entre nous s'emballent à la moindre annonce d'un "miracle thérapeutique".
Ce que je retiens en priorité, c'est que le "vaccin" dont il est ici question, terme impropre d'ailleurs, n'est pas suffisant pour, à lui seul, réduire l'infection de façon suffisante pour arrêter les ARV.
Je retiens également dans le dernier paragraphe le fait qu'en l'état il n'est pas utilisable mais qu'il permet d'approfondir la recherche sur cette piste néanmoins intéressante, même si c'est en combinaison avec le traitement.
Bref ! Comme à chaque fois, annonce prématurée et déformée et essai à suivre...
l'espoir est permis
Mais on sait lire et chacun est libre d'interpreter l'info comme bon lui semble, non mais!
Pasteur a bien commencé de la même manière en désactivant le virus de la rage par du formol, là c'est par la chaleur qu'on rend le vih inactif et bientôt inch allah on maîtrisera la méthode pour enfin avoir le vaccin fait avec nos propres cellules ! Les pro labos n'ont qu'à bien se tenir !
le vaccin espagnol: une vache la presse oui! et pas qu'espagnol!
Un bien beau rêve! comme fabro l'a dit pas de fausse joie il est bon d'avoir ces precision car nous avons la chance de lire cet article mais d'autres ne sont pas inscris sur seronet et l'on joue de leur credulité c'est surement pire que tous.La bise à tous
encouregement
Celui qui sous-estime ce vaccin n'a qu'à arrèter même les ARV.parceque leurs histoires avaient toujours commencé ainsi et à présent, on en a une centaine au point 'ou les médecins ont l'ambara. plutôt encourageons ce cherheur afin que même si ce n'est pas le cas mais peu-être par lui d'autres chercheurs puissent se guider
arrêté vos connerie
vraiment erreté des donné des faux espoirs a longue echele au persnonne qui sont infecté par la maladie et les mieux serait plus tot des donné la solution final
bingo
j arrete pas de le suriner sur tous les tons
du recul par rapport a toutes ces annonces de pseudo vaccins
depuis 30 ans chaque année "on" (qui est un con) découvre le vaccin miracle
une bonne fois pour toutes
RAISON GARDER
une avancée pour le traitement en tout cas
Bon... on commence par nous parler de vaccin pour finalement dire qu'on ne pourra même pas jeter les ARV à la poubelle.....
Je crois cela dit dur comme fer qu'avant ce vaccin thérapeutique qui n'arrive jamais on arrivera d'abord à un traitement peut-etre par injection qqs fois par an...cette news est tout de même très encourageante pour les séropos non?