Drogues : A Paris, l'UMP est accro au mensonge

Publié par jfl-seronet le 08.01.2010
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salle de shootpiquerie
Il y a quelques semaines, le député PS de Paris Jean-Marie Le Guen a proposé au Conseil de Paris de mettre en place des salles de consommation de drogue dans la capitale, afin de "placer les toxicomanes dans un environnement sécurisé". Cette proposition a été vivement attaquée par les pouvoirs publics ainsi que la droite municipale, dont le patron Jean-François Lamour, député UMP de Paris, a publié, fin décembre, une tribune particulièrement virulente. Explications.

Pas précisément mobilisés sur les questions de prévention pour les personnes consommatrices de drogues, les élus socialistes parisiens ont voulu, ces derniers temps, mettre les bouchées doubles. Sans doute histoire de rattraper ce que les socialistes (ceux qui ont été ministres ou députés) n'ont jamais voulu (ou pu ?) faire lorsqu'ils étaient en situation comme on dit. Ces tentatives rapprochées ont connu des bonheurs divers.
Pas terrible dans la forme comme dans l'impact, la sortie de Daniel Vaillant, député PS de Paris, prônant la dépénalisation du cannabis. Et pas très crédible lorsqu'on a, soi-même, été ministre de l'Intérieur (2000-2002) et pas fait avancer d'un seul poil le débat. Mal préparée, mal pensée, la sortie de l'ex ministre est, par ailleurs,  tombée au moment où l'Etat lançait une campagne contre les drogues. Du coup, elle était inaudible et, plus grave, elle est passée pour une provocation au lieu d'une invitation à débattre.

Plus courageuse (l'enjeu est bien plus important) et plus intelligente est la proposition de Jean-Marie Le Guen, lui aussi député PS de Paris et adjoint chargé de la Santé à la mairie de Paris, d'ouvrir des salles de consommation supervisée. D'abord parce qu'elle avance des arguments de santé publique (largement vérifiés dans les expériences étrangères) et parce qu'elle prolonge sur le terrain politique des revendications portées depuis fort longtemps par des associations (Asud, notamment). "Dans ces salles, on peut mettre [les personnes usagères de drogues] dans un environnement sécurisé, établir un premier contact et essayer de les faire rentrer dans les circuits de soin et de prévention qui existent", expliquait le député de Paris en décembre dernier sur Europe 1. "L'idée, c'est de leur fournir un certain nombre d'informations, par exemple les protocoles pour faire des échanges de seringue", expliquait-il. L'objectif étant d'une part "d'éviter des attitudes qui viennent aggraver des situations déjà très graves". Et d'autre part, de limiter au maximum les risques d'exposition au VIH et à l'hépatite C. Bref, une argumentation solide et classique qui emprunte largement à ce que disent les associations depuis des années et qui entérine ce que l'on sait des expériences étrangères (il y a près de 80 salles d'injection supervisée dans vingt-cinq grandes villes européennes). A savoir que ce dispositif marche, qu'il réduit les risques de transmission du VIH et du VHC et d'overdoses, qu'il a même un impact en matière de délinquance.

Manifestement, ces arguments n'ont pas convaincu les pouvoirs publics et la droite parisienne. La première salve a été tirée par la Mildt (Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie), mi décembre. Son président, Etienne Appaire, s'est prononcé contre l'ouverture en France de salles de consommation supervisée. Selon lui, cela reviendrait "à baisser les bras" face à la drogue et surtout cela "consisterait à faire une croix sur le destin des gens". Ce qui lui pose problème, c'est qu'un tel dispositif instaure "une situation où l'on accepterait la dépendance au lieu de lutter contre". Il craint même une démobilisation des troupes. "Plus personne n'aura d'ambition pour sortir [les personnes consommatrices] de leurs difficultés" assène t-il. En fait, la philosophie des salles d'injection, c'est plutôt de proposer un cadre sanitaire et sécurisé d'injections à des personnes qui sont dans l'impossibilité (qu'elle soit temporaire ou constante) de stopper leur consommation. C'est le courage de reconnaître qu'on ne peut pas faire changer les gens si ils n'en ont pas envie ou ne le peuvent pas tout en assurant des risques moindres dans le cadre de leur consommation.

Cette ligne n'est assurément  pas celle de la droite parisienne. En témoigne la tribune publiée le 21 décembre dernier dans Le Monde par Jean-François Lamour et Philippe Goujon (députés UMP de Paris et conseillers de Paris) et Anne-Constance Onghena (conseillère de Paris). D'emblée, les signataires se demandent pourquoi de telles salles d'injection existent. Cela donne : "De quoi s'agit-il en réalité ? De cacher les toxicomanes dans des centres, sous couvert de prise en charge médicale ? D'imposer, au nom d'une soi-disant réduction des risques, l'implantation de lieux permettant aux "accros" de venir se piquer dans un espace réservé, financé par la collectivité et géré par des travailleurs sociaux ? C'est cela, la grande idée de M. Le Guen, médecin, parlementaire (…) pour améliorer la santé de nos concitoyens : leur proposer des lieux afin que les drogués puissent continuer à se détruire, dans la discrétion et rester entre eux, dans un espace qui leur serait dédié."


Puis les trois élus parisiens sortent l'artillerie lourde : "Sous prétexte de lutter contre les overdoses, le sida, l'hépatite C, les partisans de ces salles en appellent clairement à la reconnaissance du statut "d'usager de drogues" plutôt qu'à un objectif de sevrage qui seul devrait être poursuivi". Ils vont même jusqu'à qualifier les salles d'injection d'"anti-chambres de la mort". Les arguments, outranciers, ne sont pas nouveaux. C'est même un grand classique des positions conservatrices. C'est gênant (lorsqu'on ne partage pas cet avis), mais cela devient très problématique lorsque les trois signataires, non contents de faire la morale dans leur tribune, mentent. Cela donne : "Toutes les expériences menées à travers le monde, notamment en Suisse et en Allemagne, démontrent que l'ouverture de ces salles de consommation, bien loin d'aider les toxicomanes, aggrave le problème à plusieurs titres. Elles encouragent l'augmentation de la consommation voire même l'initiation de nouveaux usagers qui, rassurés par la présence de personnel médical, vont oser prendre plus de risques avec des doses plus fortes. Elles contribuent au maintien d'une habitude, au lieu d'inciter l'utilisateur à arrêter (…) Enfin, les risques de troubles à l'ordre public, à proximité de ces salles, qui attirent dealers et usagers, sont évidents." Bref, l'exact contraire de ce qui se passe. A ce niveau de sottise, ce n'est plus de la mauvaise foi, mais de la grosse manip'.
De son côté, le Conseil de Paris a voté une subvention de 26 000 euros à une association qui sera chargée de réaliser une expertise sur les salles de consommation de drogues supervisée. Une chose est sûre avec une UMP parisienne qui est plus raide et plus dogmatique encore que la Mildt sur ce sujet, la RDR ne passera pas par elle !

Commentaires

Portrait de altelia

ça me fait penser aux prisons: on traite les gens comme des bêêêêêêêêêêêtes et après on s'étonne qu'elles deviennent enragées...ce dimanche qui vient sur Inter l'émission "Interceptions" de 9h à 10h, parlera d'une prison "où les matons serrent la main des détenus", et où moins de violence, moins de suicide, ...et ça fait toujours pas réfléchir les politiques. Faut être sérieux: la répression, y a que ça de vrai ma brave dame!
Portrait de maya

j'ai toujours trouvé sidérant que les lois sur le sujet passent par des gens qui s'y connaissent en drogues comme moi en course à pied... quand y aura t il une écoute des gens qui bossent la dessus depuis 20 ans (asud pour ne pas les citer) une salle de shoot ce serait toujours mieux que de retrouver une mamie qui sort faire ses courses confrontée à un mec en manque dans son escalier en train de se trouer les bras parce que ses veines sont sclérosées, le spectacle est édifiant pour ceux qui connaissent et rien n'empêchera un mec en manque de se shooter dès qu'il a sa dope. la france s'illustre depuis 20 ans par son archaïsme en matière de sexualités et de drogues, notre seul avantage 'envié par tous est la sécu) , ça suffit comme arguments pour se donner  donner bonne conscience à nos gouvernements successifs. et la droite ne fera jamais un pas vers les "galériens", les sdf, les miséreux et les malades leur boulot consiste à continuer d'alimenter le portefeuille des nantis.
Portrait de youyou

tout ceci ne relève pas d'un seul et unique parti. que ce soit la droite pur et dur ou le sois disant parti de gauche que l'on nomme le socialiste et la gauche pur et dur chacun en a rien a secoué des problèmes sociaux, des malades en tout genre (irrécupérables) les taulards, même les vieux ont les met de côté alors.....faut se réveiller chacun veut le pouvoir, et une fois qu'il l'a basta! C'est le fric qui commande le monde, point barre. Enfin c'est ma pensée. Une exception fait que de temps en temps un individu parmi tant d'autres réfléchisse un petit peu et ça bouge un chouia grâce a lui ou elle. Comme ce jean-marie le guen. Bien que cette "utopie" nouvelle n'est pas prête d'être réalisée. J'ai comme l'impression, je peux me tromper bien sûr; que lorsque la petite gauche est au pouvoir un droitier émet une bonne idée et vis et versa. C'est peut-être pour ça qu'en france on n'arrête pas de dinguer. une fois le pied gauche une fois le pied droit Oui altelia, ce matin sur inter l'émission interception, toujours très interessant de tendre ses 2 oreilles. En l'occurrence ce matin j'ai trouvé cela très rafraichissant de voir qu'il est possible de faire un lieu de détention sans rendre les gens plus tarés qu'à leur entrée! Cette prison en corse, "casabiande" Pas un barreau, les détenus bossent sont payés, ont des conditions décentes de détentions pour ne pas sombrer dans la connerie mais au contraire les faire réfléchir. Voilà un bel exemple de société pour que le monde tourne un peu plus rond......a commencer par là! Pour celles et ceux qui veulent voir le cadre de vie de ces détenus: rdv sur france inter programme et voila voili