"Qu'à jamais soit maudite l'étoile sous laquelle je suis né,
qu'aucun ciel ne veuille la protéger,
qu'elle s'effrite dans l'espace comme une poussière sans honneur !
Et l'instant traître qui me précipita parmi les créatures,
qu'il soit pour toujours rayé des listes du Temps !
Mes désirs ne sauraient plus composer avec ce mélange de vie et de mort où s'avilit quotidiennement l'éternité.
Las du futur, j'en ai traversé les jours, et cependant je suis tourmenté par l'intempérance de je ne sais quelles soifs.
Comme un sage enragé, mort au monde et déchaîné contre lui,
je n'invalide mes illusions que pour mieux les irriter.
Cette exaspération dans un univers imprévisible- où pourtant tout se répète- n'aura donc jamais une fin?
Jusque à quand se redire à soi-même: "J'exècre cette vie que j'idolâtre"?
La nullité de nos délires fait de nous tous autant de dieux soumis à une insipide fatalité.
Pourquoi nous insurger contre la symétrie de ce monde quand le Chaos lui-même ne saurait être qu'un système de désordres?
Notre destin étant de pourrir avec les continents et les étoiles, nous promènerons, ainsi que des malades résignés,
et jusqu'à la conclusion des âges,
la curiosité d'un dénouement prévu, effroyable et vain."
Précis de décomposition - E. Ciorian
- Blog de eris
- Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour publier un commentaire
- 1196 lectures
- Envoyer par mail
Commentaires
J'ai fait une faute...
Et c'est en plus dans le nom de l'auteur ...
Il faut lire E. Cioran
Le philosophe...
« Le but est le chemin lui-même. L'éternité est ici. » Soyons nous-mêmes, en toute circonstance.
waouww
Le fruit amer
"La nullité de nos délires fait de nous tous autant de dieux soumis à une insipide fatalité."
Quel beau texte!
Pourquoi me suis-je mis à délirer l'autre jour? Délire à propos duquel tu m'as justement interpellé.
Je vis depuis toujours dans la schizophrénie, déchiré entre les attitudes contradictoires que m'imposent les autres , "dieu" soumis à une fatalité peu insipide car j'en goûte souvent le fruit amer
Tropik, Jean-René
Bonsoir à toi Tropik tout d'abord, j'espère que tu vas bien au passage ! Depuis notre "folle nuit" parisienne avec nos acolytes d'un soir ( j'ai pas dit alcooliques, hein? ;-) )
Merci à toi de t'inquiéter, mais tu sais, j'ai parfois des "errances nocturnes" car j'ai un mauvais sommeil, cela ne veut pas forcément dire que je sois au bord du gouffre.
C'est plus une pensée, une réflexion, qu'à travers les textes de Cioran, j'arrive à mettre des mots sur des états d'âme du moment, de l'instant.
Parfois, ils me paraissent si vrais...!
Mais je reste encore bien vivant, je compte bien encore profiter de cette "chienne de vie" , et tenter de tordre le coup à ces mauvaises pensées qui nous prennent parfois !
Jena-René, je te comprends mieux désormais avec ce que tu viens de me dire juste en haut, pourquoi on s'est accroché l'autre jour...
Je ne pouvais pas savoir tu imagines bien, et j'en suis désolé.
Désolé non pas des mots, car ils ont une vertu, mais plutôt de tes maux, qui eux, n'en ont pas forcément...
Merci en tous cas à tous deux d'avoir posté ces paroles nécessaires !
C'est ce qui fait avancer, je suis donc heureux que vous existiez rien que pour le fait de vous être exprimé ici, dans mes errances...
Et pour le reste !
« Le but est le chemin lui-même. L'éternité est ici. » Soyons nous-mêmes, en toute circonstance.