Retraites : non aux inégalités chroniques !

Notre propos présent n'est pas de discuter la légitimité et l'opportunité de cette mesure dans l'absolu pour l'ensemble de la population bénéficiant (semble-t-il) d'un espoir de vivre longtemps et en bonne santé après l'âge de la retraite, ou si l'on veut voir les choses sous un autre prisme: de bénéficier d'un droit acquis après de longues années de cotisations et de travail. Néanmoins, il y a bien un public pour lequel cet argument est inopérant, et donc, pour qui la réforme fondée sur le report de l'âge devrait être inopposable si l'on s'en tient à la logique (ou la cohérence voire l'honnêteté intellectuelle, c'est selon...). Ce public est constitué des personnes souffrant de maladies chroniques et invalidantes.
En effet, pour les personnes que nous représentons au sein de la plupart des associations membres des Chroniques associés, l'espérance de vie et donc la possibilité de bénéficier de la retraite (pour laquelle elles ont pourtant cotisé!) est souvent réduite. A cela s’ajoute parfois que l'espérance de vie en bonne santé à l'âge de la retraite est ipso facto nulle . Voilà une réalité qui a très curieusement été oubliée (ou écartée, c'est selon...) lorsque le gouvernement actuel a mis en avant l'argument majeur légitimant (ou justifiant, c'est selon...) le report de l'âge de la retraite.
Ainsi, la réforme reposant sur la justification que désormais les Français vivent mieux et plus longtemps ne s'applique pas (ou ne devrait pas s’appliquer) à ceux que nos associations représentent. Ceux-ci sont dès lors doublement pénalisés en somme, mais nous craignons que l'euphémisme se situe à "doublement"...
Nous disons doublement car les malades chroniques cotisent également (ce qui est normal) mais au final ne bénéficient pas de cette retraite en bonne santé pour plusieurs raisons déjà maintes fois exposées. Mais un autre facteur nous conduit à penser que c'est plutôt de « triplement pénalisées » que l'on pourrait qualifier les personnes malades chroniques vis-à-vis de ce paramètre majeur du report de l'âge. En effet, les malades chroniques souffrant de maladies invalidantes, au même titre que les personnes handicapées, connaissent des parcours professionnels ponctués par la maladie, les traitements et donc également par les conséquences socioprofessionnelles habituelles: périodes longues de chômage, d'arrêt maladie et aussi de grandes difficultés à retrouver un emploi du fait de la maladie elle-même, certes, mais très souvent aussi du fait du rejet de la personne malade ou handicapée dans le monde du travail, etc. Est-il besoin d’accentuer cette inégalité?
Ainsi, à la pénalisation des malades chroniques viendrait s'ajouter la difficulté croissante pour un malade chronique de réunir le nombre de trimestres suffisants ouvrant droit à la retraite (de plus, à temps et en heure d'en profiter). Au-delà de la pauvreté souvent induite par la maladie (le fameux reste-à-charge grignotant progressivement le reste-à-vivre) viendra s'ajouter le prévisible manque de revenus pour bon nombre de malades chroniques... si toutefois l'âge de la retraite arrivait.
Nous avons pourtant entendu parler d'un autre paramètre à inclure dans cette réforme qui pourrait être utile pour la rendre plus juste (ou équitable, c'est selon...). Il s'agit en effet et en son temps d'ouvrir le débat sur la pénibilité du travail. Or, la pénibilité du travail induite par les effets de la maladie ou les effets secondaires des traitements, c'est bien le quotidien des malades chroniques qui pourtant souhaitent travailler (quand on veut bien le leur permettre)... ne serait-il pas bienvenu d’intégrer ce facteur dans une réforme qui se veut (ou se prétend, c'est selon...) juste ?
Nous sommes ainsi confrontés à un silence assourdissant dans cette réforme vis-à-vis de ces enjeux pour la population présentant un handicap ou une maladie chronique... Mais notons que ce silence est en parfait accord avec l'aveuglement éblouissant qui conduit nos gouvernants à mener de nombreuses réformes afin de privatiser encore davantage le secteur de la santé. Ce silence est également en accord avec l'inaction qui préside le combat contre l'exclusion vécue par les personnes malades chroniques et/ou handicapées (afin de faciliter l'accès de ces personnes à des revenus décents ou à l'emploi par exemple). Par humanisme, nous vous épargnons d'autres oxymores que nous pourrions jeter aux oreilles grandement fermées des grands petits hommes qui nous gouvernent actuellement... mais sachez que le coeur y est !
M. Prats, Président de l’association Keratos (membre du collectif Chroniques associés)
Photo : Bluegum
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Commentaires
très bonne analyse, très bons arguments
M Prats, vous pourriez prétendre au ruban rouge (rire jaune, on est pas des bleus et il n'y a pas que les rubans qui font voir rouge...) !!!
Plus sérieusement,
comment faire pour que ces arguments si clairement exposés, si plein de bon sens puissent être entendu sur les grands média ???
Comment faire pour que ce ne soit pas que du lobbying de couloir, que chaque personne concernée, chaque malade chronique soit le relais de ces idées ?
Il faut obstinément et rapidement élargir la base dans l'opinion des personnes opposées à ce projet de loi inique. Il ne s'agit pas que de s'opposer à partir d'un "sentiment" mais bien à partir des valeurs d'injustices hurlantes .
Comment démasquer le double discours d'un gouvernement d'escrocs de menteurs prêt à tout pour se maintenir au pouvoir prêt à tout pour conserver leur richesse au dépend de millions de personnes.
Il n'y a pas qu'une seule réforme possible, les choix fait par la sarkobande bétancourrée sont ceux d'une idéologie extrêmement grave.
il y a un tel gâchis de vie singulière multiplié à l'extrême !!!
Mais vous les autres seronautes, qu'en pensez vous ???...
comment cela se traduit il dans vos vies ?
pourquoi êtes vous en majorité silencieux ?
Pier C./ecceomo
Positivement / / De passage avant compostage
le mal chronique
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