L’Eglise a le genre mauvais !

Publié par jfl-seronet le 02.08.2011
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L’Eglise n’a jamais fait bon ménage avec le sexe et ses rapports sont détestables avec l’orientation sexuelle. Ce n’est donc pas un hasard si cette question, dès lors qu’il s’agit par surcroît de programmes scolaires, provoque une polémique avec l'enseignement catholique. Objet du litige ? Les nouveaux programmes de biologie en première qui traite de l'orientation sexuelle. Pour faire court, c’est une nouvelle attaque de l’Eglise catholique contre l’homosexualité.
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La circulaire du ministère de l'Education nationale n’est pas neuve. Elle date très précisément du 30 septembre 2010. Elle prévoit que les programmes de sciences de première doivent, à la rentrée 2011, comporter un chapitre intitulé "Devenir homme ou femme". Celui-ci doit "affirmer que si l'identité sexuelle et les rôles sexuels dans la société avec leurs stéréotypes appartiennent à la sphère publique, l'orientation sexuelle fait partie, elle, de la sphère privée".
C’est une idée simple et juste qui devrait, ainsi abordée, soulager pas mal d’ados qui s’interrogent justement sur leur identité et leur orientation sexuelle. Mais voilà, rien n’est simple dans ce monde et les organisations catholiques ont décidé de mener campagne contre ces nouveaux programmes de biologie, une première. Les maisons d'édition ont évoqué selon des modalités variées ce chapitre, indique l’AFP qui a compulsé les dits manuels. Fin mai, la direction de l'enseignement catholique a écrit aux directeurs diocésains pour attirer leur attention sur "le discernement à apporter dans le choix des manuels pour cette discipline". Comprendre : utiliser les moins disant sur le sujet. Bien évidemment, histoire de faire bonne mesure, le courrier critique le chapitre incriminé car il fait "implicitement référence à la théorie du genre" qui a gagné ses dernières années ses galons de chiffon rouge…  "La "théorie du genre", c'est que chacun choisit son identité sexuelle. Nous, nous disons qu'il y a une norme : on naît garçon ou fille et on réfute qu'on ait le choix de son genre",  explique, de façon très dogmatique, à l’AFP Claude Berruer, adjoint au secrétaire général de l'enseignement catholique.

Il faudrait donc en rester au niveau des normes et des croyances, aux choux-fleurs et aux roses (avec option cigogne), sous la garde attentive de plusieurs associations catholiques, relayées par l’ancienne ministre Christine Boutin, présidente du Parti Chrétien-Démocrate (c’est le deuxième mot qui compte…) et désormais candidate à la présidentielle 2012. Cette dernière, jamais en retard d’un combat d’avant-garde, et des associations catholiques (tendance : "Darwin au poteau… les cathos auront ta peau !") ont lancé une pétition qui aurait recueilli "près de 32 500 signatures". Elle demande au ministre de l’Education Luc Chatel, d'apporter des "correctifs" ou d'"interdire l'usage des manuels incriminés". Il n’est pas encore question de soumettre les auteurs à la question… mais manifestement il suffirait de demander. Vu l’ampleur du barouf… l’AFP a interrogé les maisons d'édition. Ces dernières n'ont pas réagi, à l'exception de Bordas qui indique avoir "respecté le cahier des charges très strict fixé par le ministère, lors d'une réunion avec les éditeurs". Le ministre non plus n’a pas répondu. Crainte des foudres divines ? Chez les enseignants, en revanche, on s’agace.  Le syndicat Snes-FSU dénonce une "croisade contre l'homosexualité" et l'UNSA Education juge que "les Eglises n'ont pas à donner leur avis sur des programmes scolaires qui visent à la formation de "citoyens" et non de "croyants". Bien vu, après tout le catéchisme, ça sert à ça.
Evidemment, comme souvent dans ces cas-là… l’Eglise ne voit que le soleil depuis sa fenêtre. Elle ne se préoccupe pas de savoir si ce choix pédagogique est fait dans l’intérêt des élèves. Le Groupe national information et éducation sexuelle en fait valoir un : lorsqu’il souligne que les personnels scolaires sont "confrontés au désarroi de jeunes en difficulté avec leur orientation sexuelle". Comme toujours, elle considère la moindre avancée sur l’orientation sexuelle comme du prosélytisme homosexuel. Interrogé par l’AFP (9 juillet), le sociologue Eric Fassin a une analyse des raisons de cette polémique. Il y voit "une dimension religieuse importante qui est explicite. L'Eglise catholique, du moins dans sa hiérarchie, s'est mobilisée contre le genre depuis 1995, c'est-à-dire depuis la Conférence de Pékin sur les femmes, en ayant compris que si l'on entre dans la logique du genre, cela veut dire effectivement que les rôles ne sont pas naturels. Et si les rôles ne sont pas naturels, ce que certains théologiens du Vatican ont compris, c'est que ça ne posait pas seulement la question de la place des hommes et des femmes, mais aussi la question des sexualités, par exemple la question du mariage homosexuel. Le lien entre théorie du genre et revendication homosexuelle a donc été fait très rapidement par l'Eglise, ou du moins par le Vatican". Et Eric Fassin de poursuivre : La "théorie du genre dit qu'il y a des normes. Simplement, comme ces normes sont sociales, elles sont discutables. Elles ont une histoire qui est politique, elles sont donc politiquement transformables". Généralement, ça s’appelle le progrès… lequel, contrairement au dogmatisme, n’est pas la chose la mieux partagée au monde. Evidemment, on comprend clairement ce qui panique l’Eglise catholique qui n’a qu’un rapport très lointain à la démocratie (il n’y a qu’à voir comment elle fonctionne). "L'inquiétude, c'est que si l'ordre des sexualités n'est pas fixé une fois pour toutes par Dieu ou la nature, cela veut dire que rien n'est fixé une fois pour toutes, et donc qu'il n'y a pas de limite à la logique démocratique. La logique démocratique, c'est qu'il y a des lois, des règles, des normes et que l'on peut les discuter", précise le sociologue. Evidemment, se placer dans cette perspective demande plus de travail… c’est plus difficile et plus exigeant que de faire croire que la théorie du genre est la nouvelle tenue de Lucifer !

Commentaires

Portrait de romainparis

"l'UNSA Education juge que "les Eglises n'ont pas à donner leur avis sur des programmes scolaires qui visent à la formation de "citoyens" et non de "croyants". " Dossier clos.
Portrait de jeanlouis

Romain tu as raison sur le principe mais je crois qu'il faut faire pression néanmoins pour que ce type d'intervention n'ait plus lieu.... Je voudrais souligner quand même des pratiques un peu divergentes : Dans un collège catholique de Rennes, un garçon qui subissait de l'homophobie rampante puis plus manifeste a eu l'appui de la direction et du corps enseignant pour une démarche générale de lutte contre l'homophobie qui a été un succès......... Un autre collège l'année dernière a eu un enseignant en transition. Les professeurs et parents d'élèves ont accompagné la personne et à la rentrée, le changement , Monsieur devenu Madame, n'a posé aucun problème au sein de l'école concernée. je sais bien il s'agit de cas isolés.....néanmoins, ils existent....En même temps que l'éducation des enfants, il faut faire évoluer les mentalités des parents ce qui est moins simple....
Portrait de romainparis

un océan, mais je les aime car j'en suis une. C'est l'une de mes rares victoires.
Portrait de Paulan

Un peu facile de taper toujours sur l'eglise catholique. Facile et sans risque : elle ne mord pas LOL Mais essayez de commenter l'attitude et la position des musulmans ou des israélites sur le même sujet. Leur position est la même, voir pire ! Mais le sociologue bien que courageux n'est pas téméraire et ne s'attaque qu'au curés qui, comme on le sait, sont par ailleurs tous pédophiles. Un peu de calme et de zen pendant l'été nous ferait du bien à tous Amicalement Paulan
Portrait de jeremie

Tout au long de l'Histoire l'église catholique a démontré par les actes de certains de ses plus hauts dignitaires qu'en matière de sexualité le mot d'ordre est faites ce que je dis pas ce que je fais. Ramenons donc la sincérité à l'individu avant la sincérité du dogme
Portrait de jeanlouis

On parle des catholiques, des juifs et des musulmans comme des corps monolithique au comportement standardisés. Il y a nombre d'humanistes porteurs de liberté et de respect de chacun quelque soit son orientation sexuelle. Sauf erreur, les gays musulmans se réunissent tous les ans autour d'un imam et j'avais en mémoire un rassemblement de ce type en Afrique du Sud. Encourageons ceux qui sortent du rang pour dire les cris d'amour de ces religions et veulent sortir les dogmes destructeurs....ils prennent parfois des risques et refusent de nier une partie d'eux mêmes....