Le meilleur du VHC en 2011 : retour sur un an de résultats (4/4)

Publié par Renaud Persiaux le 06.01.2012
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Suite et fin de notre série de rétrospectives 2011. Cette fois, on passe au VHC, avec une année 2011 marquée par l’arrivée des nouvelles anti-protéases de VHC, qui augmentent les chances de guérison. Voici les 11 faits marquants que nous avons retenus. Par Renaud Persiaux

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1. Le "1996" des hépatites
L’année 2011 a constitué un tournant en matière de traitements contre le virus de l’hépatite C. Un tournant relativement proche de celui de 1996, avec l’arrivée des premières trithérapies anti-VIH. Deux nouveaux médicaments efficaces contre le VHC de génotype 1 (le plus courant, mais aussi le plus difficile à traiter), Incivo (télaprévir) et Victrelis (bocéprévir), ont été récemment approuvés par l’Union Européenne. S’utilisant (l’une ou l’autre) en association avec les traitements standards (ribavirine + interféron), ils font passer les chances de guérison de l’infection de 50 à 80% environ. Les cliniciens s'attendent à un engorgement des services. Mais leur protocole d’utilisation est complexe, et ils provoquent fréquemment des effets indésirables importants. C’est donc doublement le 1996 des hépatites. Car les futures molécules devraient être plus efficaces, plus simples à prendre, mieux tolérées (ça doit vous rappeler quelque chose). Une différence, cependant : dans les tuyaux de développement, il y a une cinquantaine de molécules anti-VHC nouvelles ! C’est énorme, même si certaines seront, en fonction de leurs résultats, abandonnées. Incivo et Victrelis auront donc une durée de vie (en termes de part de marché, s’entend) relativement courte. Et ceux qui peuvent attendre ont tout intérêt à le faire, en accord avec le médecin !

2. Les personnes co-infectées par le VIH et le VHC cruellement négligées par l’industrie
2011, c’est aussi l’arrivée des premières données chez les premières personnes co-infectées. L’enjeu est d’importance : c’est chez les personnes co-infectées que l’hépatite C a le moins bon pronostic : elle évolue plus souvent et plus vite vers des complications graves. Elle est aussi plus difficile à traiter, avec des taux de succès tournant autour de 30% contre 50% chez les personnes uniquement infectées par l’hépatite C (mono-infectées). Au final, Incivo et Victrelis semblent marcher aussi bien, et sans produire plus d’effets indésirables, que chez les personnes mono-infectées. Cette bonne nouvelle a un arrière-goût amer : celui de l’arrivée beaucoup trop tardive de ces données. Au Canada : le bocéprévir n'est pas approuvé chez les personnes co-infectées par le VHC et le VIH. En Europe, c’est le flou. L’AMM (autorisation de mise sur le marché) européenne ne fait pas mention de la co-infection. Mais la faiblesse des données fait que de nombreux médecins se sentent démunis et que la Société clinique européenne sur le sida n’a pas pu inclure cette question dans ses recommandations d’octobre 2011. Les associations demandent depuis longtemps que les recherches soient menées de manière équitable pour les personnes mono-infectées et les personnes co-infectées (VIH et hépatite C). C’est un combat permanent face à l’industrie pharmaceutique. Résultat : c’est l’Agence nationale de recherche contre le sida et les hépatites virales (ANRS), qui s’y colle, depuis le printemps dernier (essais Télaprévih et Bocéprévih). C’est notamment parce qu’en dépit des demandes répétées des associations, l’utilisation de ces molécules chez les personnes co-infectées par le VIH et le VHC a fait l’objet de trop peu d’études cliniques de la part des firmes pharmaceutiques, pour permettre la mise au point de recommandations. Du 2 au 5 juin 2011, AIDES participait à une réunion d’activistes européens, à Sitgès en Espagne, avec le TRT-5, le Collectif Hépatites virales et l’EATG (European aids treatment group) pour négocier avec les laboratoires. Au-delà des promesses, pas d’engagement ferme et définitif. Environ 40 000 personnes en France sont concernées.

3. De CUPIC à HEPATHER
Innovation en 2011 : la création d’un observatoire des personnes bénéficiant des ATU (autorisations temporaires d’utilisation), c’est CUPIC. Objectif : recueillir des données qui pourront servir à d’autres personnes. Le recrutement se fera jusqu’à la fin de l’année, il devrait y avoir 600 patients au total. Ces personnes seront intégrées à la future grande cohorte nationale HEPATHER. Décidée en 2011, c’est un des dossiers majeur de recherche de l’ANRS pour 2012. C’est l’équivalent pour les hépatites de ce qui existe déjà pour le VIH (la FHDH, base de données hospitalière française, qui regroupait en 2011 près de 60 000 personnes vivant avec le VIH). HEPATHER pourrait réunir à terme une trentaine de centres de prises en charge, en commençant par deux en avril 2012. Cette cohorte permettra de répondre à des questions majeures. Citons le suivi à très long-terme, le devenir après la guérison de l’infection (qui ne signifie pas guérison des dommages causés par le virus), les questions de sciences humaines et sociales… HEPATHER fait l’objet d’une demande de financement via le Grand Emprunt. Pour les personnes co-infectées, la cohorte Hepavih a rouvert.

4. Le rêve du sans interféron semble de plus en plus proche
Un traitement contre le VHC permettant de se passer des injections hebdomadaires d’interféron et leur cortège d’effets indésirables ? 2011 a vu de nouvelles études sur des stratégies de traitements anti-VHC sans interféron ! C’est un vieil espoir que de pouvoir éviter les injections hebdomadaires de cette molécule qui aide le système immunitaire à se débarrasser du virus au prix d’effets indésirables lourds (troubles de l’humeur, fatigue extrême, assèchement de la peau, etc.). Dans la course aux 50 molécules en développement contre le VHC, plusieurs firmes sont sur les rangs pour trouver celles qui permettront un traitement "tout oral". Il y a notamment le laboratoire Pharmasset et ses résultats de sa PSI-7977, en une prise par jour, avec de la ribavirine. Résultat, après 12 semaines de traitement : 100% de réponse virologique soutenue (signant la guérison de l’infection) chez 40 personnes infectées par le génotype 2 et 3 de l’hépatite C qui n’avaient jamais tenté le traitement anti-VHC, et avec un génotype IL28B favorable. Fin novembre, Gilead a racheté ses molécules à Pharmasset pour 11 milliards de dollars. Déjà très impliqué dans le traitement de l'hépatite B et menant ses propres recherches sur l'hépatite C, le groupe californien inclut à son portefeuille trois nouveaux candidats médicaments innovants. De quoi le mettre en position de développer dans le futur des comprimés anti-VHC "tout-en-un", comme il le fait déjà pour le VIH. Ces molécules "extrêmement prometteuses" selon Stanislas Pol, chef de service du pôle d'hépato-gastro-entérologie de l'hôpital Cochin, n'arriveront pas avant 2014.

5. De l’espoir pour les nuls
BMS a dévoilé le 7 novembre 2011, les bons résultats d’une association de deux des molécules qu’il développe, le datasclavir (BMS-052), et l’asunaprevir (BMS-032). Point fort, c’est chez des personnes de génotype 1B qui, par le passé, n’avaient pas du tout répondu à un premier traitement anti-VHC (les hépatologues parlent de "nul-répondeurs") qu’on constate ces bons résultats. Plus de 12 semaines après la fin du traitement, le virus n’était pas réapparu chez 9 personnes des 10 participants. Pas mal du tout !

6. Le Vaccin anti-VHC
Deux laboratoires, Inovio et Chron-Tech, ont lancé en Suède une étude clinique de phase II-b d’un candidat vaccin thérapeutique sur 32 personnes infectées par le VHC de génotype 1. Le but de ce "ChronVac-C", qui vient en complément de la bithérapie standard par interféron et ribavirine, pourrait augmenter les chances de succès tout en réduisant la durée du traitement. Première originalité de ce candidat-vaccin, son dispositif d’injection : la seringue est couplée à des électrodes qui envoient des micro-pulsations électriques dans le muscle au moment de l’injection (électroporation). Le champ électrique créé "ouvre" la membrane des cellules environnantes, ainsi plus à même de recevoir les éléments du vaccin (un vaccin à ADN), ce qui augmente la réponse immunitaire (aux antigènes) En phases I et II-a, le vaccin présentait un bon profil de sécurité. Six mois après la bithérapie, cinq des six personnes ayant reçu le vaccin (soit 83%) étaient guéries de l’infection (réponse virologique soutenue). Sans vaccin, c’est généralement 40 à 50%. Encourageant !

7. Fibrose : les tests non invasifs enfin remboursés
Avancée dans la prise en charge de l’hépatite C : depuis juin 2011, le remboursement du Fibroscan et du Fibrotest, deux alternatives à la biopsie (prélèvement d’un morceau de foie), est possible. Jusqu’alors, malgré un avantage thérapeutique ne faisant pas de doute, les structures qui les réalisaient le faisaient… à fonds perdus. Les associations réclamaient ce remboursement depuis plusieurs années. Fibroscan et Fibrotest sont validés par la Haute autorité de santé, y compris pour les personnes co-infectées par le VIH et  le VHC. La fibrose est le principal marqueur de l’évolution de l’hépatite, ce processus de cicatrisation du foie empêche le foie de se régénérer et d’assurer ses fonctions. Stade le plus grave, la cirrhose, susceptible d’évoluer vers un cancer du foie. Le Fibroscan est une échographie du foie qui mesure son élasticité en 10 minutes et établit un score de fibrose (de F1 à F4). Le Fibrotest est un test sanguin, qui évalue des marqueurs biochimiques standardisés de la fibrose.

8. Le vaccin anti-VHA remboursé pour les hépatants, mais pas pour les gays
Il y a la bonne nouvelle : le vaccin contre l’hépatite A (VHA) Havrix est désormais remboursé pour les personnes vivant avec le VHB ou le VHC (et aussi les personnes atteintes de mucoviscidose, chez qui la prévention des hépatites est "essentielle"). Et la mauvaise : il n’est, en revanche, toujours pas remboursé pour les gays. Et ce alors que le Haut conseil de santé publique recommande leur vaccination contre l’hépatite A. L’arrêté du 26 octobre (paru au "Journal officiel" du 15 novembre), est donc grandement décevant alors que les épidémies d’hépatite A, qui se transmet aisément par anulingus (contact bouche/anus), se succèdent depuis plusieurs années. Il faudra continuer à aller dans les centres de vaccination de la Ville de Paris qui, conscients de l’importance du problème, proposent gratuitement la vaccination contre l’hépatite A pour les populations recommandées par le HCSP (hors voyage, donc). Les adresses sont consultables ici. En attendant, les campagnes de vaccination anti-VHB restent insuffisantes. Mais le vaccin combiné TwinRix (anti-VHA, anti-VHB), n’est pas remboursé.

9. Accompagnement à l’injection : AERLI.
Préparer son produit, trouver une veine, s’injecter… l’usage de drogues injectables présente des risques. Pour accompagner les personnes qui en ont besoin, AIDES, Médecins du monde, l'Inserm et l'ANRS ont lancé en 2011 AERLI (accompagnement et éducation aux risques liés à l'injection). Si la transmission du VIH est devenue relativement rare en France chez les personnes injectrices, celle du virus de l'hépatite C, plus résistant et cent fois plus infectieux, est plus difficile à maîtriser. Résultat : le VHC continue de se propager chez les personnes injectrices ! Au-delà des débats plus ou moins idéologiques sur "pour ou contre" les "salles de shoot", "on parle de salle d’accompagnement à l’injection", les quatre partenaires ont choisi d’expérimenter et d’évaluer. Expérimenter et évaluer des dispositifs innovants de réduction des risques, c’est précisément ce que demandaient l'Inserm en 2010 et le Plan national de lutte contre les hépatites B et C 2009-2012. Objectif principal : apprendre aux personnes à s'injecter de façon plus sûre et à mieux gérer les risques associés.

10. Pour un "rapport Yeni" des hépatites
C’était une des recommandations des rencontres de Dourdan : obtenir un rapport sur la prise en charge globale des personnes vivant avec le VHC. La dernière conférence de consensus date de 2002 (la préhistoire des hépatites !), et malgré leur qualité, les seules recommandations actualisées se centrent sur l’utilisation des molécules, loin d’un cadre global de prise en charge pourtant indispensable aux médecins et aux malades. Or, c’est ce cadre global qui permettra d’optimiser la lutte contre l’épidémie à VHC, car les hépatites sont, comme le VIH, des épidémies "sociales". En décembre, le président de AIDES, Bruno Spire, a écrit au ministre et à la secrétaire d’Etat à la Santé pour le réclamer. Raisonnable, il met en avant l’efficacité et le coût réduit du modèle existant pour le VIH. Une proposition qui a déjà trouvé un soutien en la personne du directeur de l’ANRS, Jean-François Delfraissy.

11. Le café contre le VHC, le thé vert contre la transplantation
C’est un peu fort de café ! Et si le petit noir aidait à lutter contre les dégâts du foie ? Mois après mois, les études s’accumulent. Après les études sur le bénéfice sur l’inflammation et la fibrose, après celles sur une meilleure réponse virologique soutenue, voici le chaînon manquant concernant les effets indésirables sous bithérapie (interféron et ribavirine). Dans une étude portant sur 106 personnes de la cohorte française Hepavih (ANRS), les personnes co-infectées par le VIH et le VHC qui buvaient trois tasses de café au moins par jour ressentaient significativement moins d’effets indésirables liés à la bithérapie anti-VHC. Cela pourrait être lié à l’effet de la caféine, mais peut être aussi d’antioxydants et autres substances contenues dans le café. (Attention tout de même, une consommation excessive de café peut générer des effets indésirables, mieux vaut s’en tenir à des doses modérées et en parler à son médecin !). Quant au thé vert, il pourrait aider et prévenir la réinfection par le VHC après une greffe du foie, selon une étude de la revue "Hepatology". Le composé actif de Camellia Sinensis (nom scientifique du thé vert) est bien connu des amateurs, c’est l’EGCG ou épigallocatéchine galate. Si ça n’a pas montré d’effet particulier sur la réplication virale, ça semble avoir bloqué l’entrée de VHC de tous les génotypes dans des lignées de cellules du foie, en empêchant l’attachement du virus aux cellules saines et des cellules infectées aux cellules saines. Et té !LE bonus : QUE vive l’ANRSH !
Un petit "H" qui fera toute la différence ? En plus d’être intégrée dans l’Inserm comme agence autonome, notre bien-aimée Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales (ANRS) va changer de nom dans le courant de l’année 2012. Elle va devenir l’ANRSH, rendant ainsi visible son implication croissante sur les maladies du foie. Il y a de quoi : malgré un budget global de l’agence resté constant, la part hépatite est passée de 5% en 2005 à 22% en 2011 (11 millions). Malgré ses moyens modestes, la forte implication des cliniciens-chercheurs place la recherche française au 2e rang international, pour le VIH, comme pour les hépatites. Les associations hépatites demandaient cet ajout depuis un petit moment. Ce H visible fera peut-être du VHC une épidémie moins silencieuse, ce à quoi s’emploie d’ailleurs AIDES : "Faire plus de bruit sur les hépatites !". ANRSH... Si avant ça râlait dans les couloirs, maintenant ça va chuinter dans les colloques.

L'intégralité de notre dossier sur le meilleur du VIH et de l'hépatite C en 2011 :

1 - les molécules anti-VIH ;

2 - les stratégies anti-VIH ;

3 - la prévention du VIH;

4 - les résulats contre le VHC.

Commentaires

Portrait de lilit88

j'ai lu l'article avec attention,ayant été "nul repondeur" en 2000,mon foie s'est globalement amélioré "tout seul" (en fait avec la prise continue de desmodium);j'attends avec impatience ces nouvelles thérapies ,allez mon foie ,tient encore deux ans sans broncher après......peut ètre pourra t on te guérir(ce mot me fait presque peur ,je n'y crois tellement pas .....)
Portrait de fil

Un nouveau vaccin pour l'hépatite C a été développé par une équipe d'experts récemment. Le premier essai clinique pour tester l'efficacité du vaccin a donné des résultats positifs, tel que rapporté par les professionnels de l'Université d'Oxford Le vaccin a été développé par une collaboration de scientifiques de l'Université d'Oxford, l'Université de Birmingham et une société italienne de biotechnologie. Cette équipe vise à utiliser une nouvelle voie d'engager un bras distinct du mécanisme immunitaire de celle utilisée dans les études initiales. Cette injection est formulé pour permettre la réactivité des lymphocytes T vers les zones plus cohérente des virus de l'hépatite C, au lieu de frapper la couche externe du virus qui conserve différentes persistante. "La coque en dehors du virus de l'hépatite C est très variable, mais l'intérieur du virus est beaucoup plus stable. C'est là que le moteur du virus est, où l'on peut être en mesure de cibler avec succès de nombreuses pièces essentielles de la machine. Mais nous avons besoin de cellules T, et non des anticorps pour être en mesure de réagir à des composants internes du virus ", a expliqué le professeur Paul Klenerman du Département Nuffield de médecine clinique à l'Université Oxford. Dans cet essai préliminaire, environ 41 personnes en bonne santé ont été exposés au vaccin. Selon les résultats, le vaccin semble déclenché une réponse plus de cellules T de la lutte contre la maladie et les effets resté pendant un minimum de 1 an. La réponse a été similaire à l'impact chez les personnes lorsque le virus est éliminé après l'affliction. Des études complémentaires afin d'évaluer si le vaccin pourrait également travailler pour des personnes déjà infectées par l'hépatite C sont en cours. Considérant que les réponses des cellules T deviennent souvent faibles chez les personnes souffrant d'infections chroniques de l'hépatite C, ce vaccin peut être utilisé pour améliorer les réponses des cellules T et de stimuler le mécanisme immunitaire dans le processus. Les résultats sont publiés dans la revue Science Translational Medicine.