Notre 8éme passager nous unit-il ?

Publié par Unan le 26.02.2012
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(Dans 2 mois j’ai vingt ans….suite)

 

La nature a-t-elle horreur du vide ? Si plus aucun regard ne se porte sur moi, si personne ne peut plus être témoin de ce que je suis, ce que je deviens, vers quel univers puis-je me tourner ? Vers quelle lumière ? Vers quelles mers ? Vers mes pairs qui peut-être me ressemblent ? Je m’offre alors une toile, un tchat, une échappée belle, une ivresse. Telle Alice, je plonge et prends contact avec un étrange bestiaire multiethnique. Au milieu d’un vaste océan de couleurs, j’y côtois des animaux étranges ne parlant pas ma langue, des insectes lorgnant sur de tendres goûtés, des infusions jonglant avec chiffres ou bien lettres, des mots exotiques, anciens, nouveaux, confondus, confondant, venus d’autres cultures, des chimères et des réalités, des passés, des présents, toutes si proches, tous si loin. Ici, en fait, personne ne ressemble à personne. Si le sang a la même composition, la même équation, la même erreur… il n’a pas le même timbre. Il reste une différence.  Alors pour me faire adopter je me carapace. Pour eux je suis un crevette aventurier, ancien légionnaire, hypocondriaque, psycho-résistant, passant une retraite bien mérité dans un bocal ensoleillé, les globes constamment fixés sur son coffre à bulles, de peur qu’il ne s’arrête….Il est anxieux Crevette. Mais il s’amuse. Il m’amuse aussi. Je poisson clown, je déraisonne. Chaque soir, c’est une expiration, un souffle. Et sous mes yeux :

 

http://www.youtube.com/watch?v=YK2Pltm8ZsQ

 

J’y trouve des sourires, des rires, parfois de la compassion. Je mets des fois mon costume au clou, mes niaiseries au placard, quand au-delà de mes conneries, je sens qu’il faut que j’apporte un peu d’aide, de soutien, d’appui, d’attention, d’amitié, de réconfort. Un œil tendre à celui ou celle qui me le demande. Un peu de moi. Crevette c’est juste un déguisement, une bêtise, un fragment de ce que je suis. Au détour de rencontres, j’enlève mon masque à antennes pour mieux écouter, mieux entendre. C’est aussi, il me semble ce que je sais faire de mieux après le pitre. Je suis toujours ému de la force des autres. De cette peur de se battre, se débattre, pour finir par hurler en silence, chuter lourdement, pour enfin se relever…fort.

 

Pourtant le respect n’est pas toujours au rendez-vous. La solidarité vite vacille. Comme si parfois toutes les épreuves ne permettaient pas de dépasser ce qui fait notre nature profonde. Une nature d’homme, de femme, à vouloir dominer, écraser l’autre, le fouler du pied, à la moindre occasion. Être humain. Rester en guerre contre les autres, alors que souvent, c’est à nous même que nous devrions nous en prendre. Notre 8éme passager nous unis-t-il vraiment ? Le serpent enlacé est-il toujours à l’affut malgré nos écorchures ? Blessé, je m’octroie de longues vacances. Et quand je reviens, certains de mes anciens comparses de jeu ne sont plus là. J’en suis triste, même si d’autres vont prendre rapidement leur place. Tout cela m’a pourtant changé. L’arrivée de l’œil de Moscou va accélérer ma mutation. Je peux les voir. La réciproque s’engage. Je me rends compte qu’il va falloir que je sacrifie le crustacé à l’hôtel de la vérité, pour de nouveau ressembler à quelque chose, rassembler les morceaux, les verres brisés. Dépiauter le crevette. Etre moi. 68 et 92 sont pour moi des années de singeries. J’y suis à chaque fois mort et né. Des années de cendres et d’eaux. Ma rivière s’est pourtant écoulée plus loin qu’elle ne s’était prévue. Je vais bientôt avoir vécu plus longtemps « + » que « - ». Ma vingtième année je l’entame dans l’âme d’un dragon. Et si je la commencerais comme étant UN ?

Commentaires

Portrait de tessanne13

Pas facile pour toi, moi et les autres, je me suis bien retrouvée dans tes écrits, alors le(s) masque(s), je met, j'ote, amicalement, Thérèse-anne                                                                 P.S. : Je suis certaine que nous avons à peu pret le meme age
Portrait de RAINBOW75

...mais la vie n'est pas Seronet car Seronet n'est pas la vie.

Comprendre ça, je pense que ça aide à avoir un peu de recul pour décrypter et supporter les égos, les nombrilismes, les auto-satisfactions, les intellectualismes de comptoir et surfer entre les "gimaces" de tous bords.

Vive internet, vive le théâtre !Clin d'oeil

G.