J’ai décidé de devenir sérocombattant

Publié par Alexandre (Paris) le 19.05.2008
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C’est à 20 ans qu’Alexandre, parisien, a fait son coming out. Ouvertement gay, il pense avoir été contaminé en juin 1998 et sait qu’il est séropositif depuis 1999.
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"J’ai découvert que j’étais séropositif à l’occasion d’un bilan sanguin en janvier 1999. Ayant pris des risques sérieux quelques mois auparavant, j’ai tardé à aller chercher les résultats. Je me rappelle avoir réagi sereinement. Sans doute parce qu’à ce moment-là, je sortais de plusieurs années de volontariat à AIDES, que je savais ce qui se passait, que j’étais renseigné sur les traitements et les perspectives, mais surtout parce que je savais ce que j'avais fait. Je suis allé m’installer à une terrasse de café. J’ai appelé un ami pour lui dire et puis j’ai commencé à réfléchir : ma principale préoccupation a été de trouver le meilleur moyen pour l’annoncer à ma mère, déjà un peu âgée. Je n’avais pas envie qu’elle ait la douleur de me voir mourir. A ce moment-là, je ne pensais pas que je serais en vie aujourd'hui. Je lui en ai parlé plus tard. J’ai toujours eu de très bons rapports avec ma mère. J’avais fait mon coming out à 20 ans autour d'un chocolat chaud au moment de Noël. Pour la séropositivité, j’ai finalement pu lui en parler, lui expliquer. Je lui dis la vérité. Je la tiens informée de l’évolution, des traitements. Et surtout, ce qui est important pour moi : elle me pose des questions !


Je travaille comme assistant parlementaire. Je milite à HES (Homosexualités et Socialisme) où j’ai même créé une commission de travail sur le VIH/sida. Les Etats Généraux [des gays séropositifs à Paris en 2006] sont arrivés à un bon moment pour moi. Cette rencontre m’a ouvert les yeux sur beaucoup de choses. C’est là que j’ai décidé de devenir “sérocombattant”, de m’engager. Il m’est apparu comme une évidence qu’il ne fallait pas attendre d’être malade du sida pour s’investir, mais de le faire maintenant.
Du côté des traitements, j’ai connu quelques difficultés au début. En fait, je n’arrivais pas à déglutir, ce qui rendait impossible la prise des médicaments. Il a donc fallu que je suive une psychothérapie pour lever ce blocage. J’ai alors pu commencer un traitement qui a marché sans me provoquer d’effets secondaires importants, si ce n'est une certaine fatigue. J’ai même eu un arrêt thérapeutique d’environ un an et demi. Je suis aujourd’hui de nouveau sous traitements et je ne connais pas d’effets secondaires. J’ai la chance d’avoir un médecin avec qui cela se passe bien. C’est un médecin qui s’intéresse aussi à l’individu et pas seulement au VIH. Lors des consultations, nous parlons aussi de mon état d’esprit, de ma vie. Elle tient compte de mes demandes, du fait que je fasse des allergies et de mes besoins de traitements spécifiques. Sur ce plan, je suis chanceux, honnêtement.


Je suis célibataire. Mais ce n’est pas un choix volontaire de ne pas être en couple. D’ailleurs je souffre de ne pas l’être. J’ai l’impression que mes relations connaissent des difficultés parce que ce que je suis à l’intérieur ne correspond pas à ce que l’on voit à l’extérieur. Concernant ma séropositivité, ma dernière expérience de couple a été bizarre. Quand j’ai annoncé à mon dernier copain que j’étais séropositif, il n’a pas dit un mot, il m’a juste embrassé. Il n’a pas posé une seule question et n’en a jamais parlé en trois mois de vie commune. Je n’abordais pas le sujet moi-même parce que le VIH/sida n’est pas l’unique élément de ma vie et je souhaitais que cela vienne de lui. Cette attitude m’a mis mal à l’aise. Je ne sais pas si le pire, c’est d’être rejeté parce que l’on est séropo ou que son partenaire fasse comme si cela n’existait pas. J’y ai vu a posteriori le signe qu’il ne voulait pas réellement s’investir dans notre relation.”

 

Crédit photo : Orion-Delain