Pierre voulait tester l’intermittence. Son médecin l’accompagne

Publié par Pierre-Alain le 13.03.2012
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Suivi dans un grand hôpital parisien, Pierre était tenté par la prise de médicaments anti-VIH 4 jours sur 7, proposée dans le projet d’essai clinique Iccarre (pour "Intermittents en cycles courts les antirétroviraux restent efficaces").

Début juin, il consulte le Dr Jacques Leibowitch. Mais Pierre a trop de résistances, un parcours très long de séropositivité. Jacques Leibowitch pense qu’une interruption de deux jours sera pour lui le maximum. Depuis, Pierre s’est mis à l’interruption… en accord avec son infectiologue.

"Iccarre, j’en ai entendu parler par un patient du Dr Leibowitch qui fait du 4 jours sur 7. J’avais envie de tenter l’expérience Iccarre, pour réduire mon nombre de prises hebdomadaires. Alors, je suis allé voir le docteur Leibowitch en juin 2011. Hélas, il considérait que réduire d’un ou deux jours serait pour moi le maximum. Impossible donc de rentrer dans Iccarre. Et ceci, en raison de mes antécédents : 31 ans de séropositivité, 21 ans de traitements, un nadir (plus bas taux de CD4 atteint) de 66 en 1996, des résistances à certaines antiprotéases. Aujourd’hui, mes CD4 sont remontés à 700 et ma charge virale est indétectable. Je prends Kivexa, Viread et Prezista/Norvir. Cinq cachets chaque matin".

"Je préférais qu’elle m’accompagne"
En juillet 2011, je suis allé voir l’infectiologue qui me suit depuis dix ans. Je lui ai dit que je voulais le faire tout de suite, avec elle, pour ne pas changer d’hôpital, et devoir aller à celui de Garches [où consulte Jacques Leibowitch, ndlr]. Je lui ai dit que quelque soit sa réponse, je le ferais, bien que je préférerais qu’elle m’accompagne, pour plus de sécurité. Après avoir échangé avec Jacques Leibowitch au téléphone, elle a accepté. Mais à condition que je le fasse progressivement, avec un suivi tous les mois. Début septembre, j’ai commencé à raison de 6 jours sur 7. C’est resté indétectable. Je suis passé à 5 jours début décembre. Charge virale toujours indétectable à la mi-février. J’attends le prochain test. Je sais que mon infectiologue est avec moi.

"On se parle entre séropos"
Je trouve dommage que certains médecins soient réticents vis-à-vis du projet Iccarre, comme m’a expliqué mon médecin. On se parle d’Iccarre et de l’intermittence entre séropos, on échange à propos de nos expériences. J’ai envie de demander aux médecins d’être ouverts. A la Sécu, ils vont finir par le voir que l’on prend moins nos médocs. Je ne comprends pas que le projet Iccarre intéresse si peu, parce que pour moi c’est un élément essentiel de la stratégie pour arrêter l’épidémie. Il est important de se dépister le plus tôt possible, pour pouvoir prendre le traitement si on le souhaite et ne plus risquer de transmettre le virus. Iccarre, ça devrait rendre le traitement plus acceptable pour les personnes pas encore sous traitement, si en effet on prouve que c’est simplement au début du traitement, quelques mois après que le temps que la charge virale soit indétectable, qu’il faut prendre le traitement tous les jours. Et aussi plus supportable sur le long terme pour nous. Sans compter que ça réduirait les coûts supportés par la société. Ce que nous ne prenons plus pourrait servir au traitement des personnes nouvellement dépistées. Allons-nous passer à côté d’Iccarre, à coté de la baisse de l’épidémie et de l’amélioration de la qualité de nos vies ?

Propos recueillis par Renaud Persiaux.