"Rien pour nous, sans nous", VRAIMENT !

Publié par Caroline Andoum le 31.08.2017
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Du 23 au 26 juillet 2017, Paris accueillait la 9e conférence scientifique de l’International AIDS Society, "HIV Science". Comme à Vancouver en 2015, cette conférence était principalement orientée vers la recherche scientifique, mais les organisations communautaires et les activistes de la lutte contre le sida y étaient également présents, pour y porter une "Déclaration communautaire" visant à remettre les populations clés au cœur de la recherche et de la lutte contre le VIH. Le Raac-sida y était aussi !

La candidature de Paris pour accueillir cet événement avait été retenue notamment car la France s’appuie sur un réseau associatif fort et dynamique depuis le début de l’épidémie de VIH. Plusieurs mois avant la conférence, un comité associatif local s’était constitué sous la présidence de Bruno Spire (médecin, chercheur, ancien président de AIDES et membre du Community engagement board de l'IAS) afin d’envisager l’ensemble des actions associatives et communautaires pouvant être organisées à l’occasion de cette conférence internationale. Les initiatives proposées par ce comité visaient notamment à poursuivre et développer les échanges entre les associations communautaires, la communauté scientifique et les décideurs institutionnels internationaux, afin de remettre les populations clés (1) au cœur de la recherche et de la lutte contre le VIH. Le Raac-sida a contribué activement aux travaux du comité associatif local, afin d'y porter plus particulièrement les préoccupations des populations migrantes africaines et caribéennes, largement touchées en France et en Europe par l'épidémie de VIH/sida.

Les Principes de Denver de 1985 sont à l'origine du fameux "Nothing for us, without  us!" ("Rien pour nous, sans nous !"). Ils ont inspiré les principes de Gipa (participation accrue des personnes vivant avec le VIH et le sida) adoptés à Paris en 1994 par 42 pays. Aujourd'hui, sur la base des derniers développements scientifiques et d'un consensus croissant autour de nouveaux outils de prévention dans nos communautés, il est temps d'étendre ces principes à l'ensemble des populations concernées (les populations clefs qu’elles vivent ou non avec le VIH) et d'exiger leur participation active à la recherche et aux décisions qui les concernent.

Avec d'autres organisations françaises nous avons ainsi pris l'initiative de lancer un consensus communautaire international qui a conduit à une Déclaration des acteurs communautaires pour mieux inclure et respecter les besoins et les souhaits des populations clefs du VIH/sida par la communauté scientifique et les décideurs politiques et institutionnels. Afin d'accompagner cette déclaration, un symposium communautaire a été organisé le samedi 22 juillet. Il a accueilli plusieurs dizaines de participant-e-s du monde entier reflétant la diversité des communautés et régions du monde concernées par les épidémies de VIH, VHB et VHC.

Ce symposium nous aura permis d'échanger sur les différentes réalités locales de l'implication des populations clefs dans la recherche et la lutte contre le sida, de présenter la Déclaration communautaire de Paris et de réfléchir ensemble à comment en imposer les revendications partout à travers le monde. Cette déclaration et ce symposium espèrent également ouvrir la voie à un engagement encore plus important des personnes concernées dans la recherche et les décisions qui les concernent, à l'occasion de la prochaine conférence IAS à Amsterdam en 2018.

Pour le Raac-sida ce symposium constituait aussi une occasion de rendre visible la mobilisation des communautés migrantes africaines et caribéennes dans la lutte contre le sida en France. Nous avons pu y porter la voix et défendre l'accès aux soins et aux droits des populations migrantes, en nous rapprochant d'autres réseaux internationaux comme l’African black diaspora global network (ABDGN) qui participait également au symposium. Les associations du Raac-sida ont ainsi pu échanger avec l'ABDGN à propos des stratégies à mettre en place autour du plaidoyer pour nos communautés sur des thématiques qui nous préoccupent : l'accès à la PrEP, les actions spécifiques pour les femmes, les hommes, les jeunes des quartiers, les minorités sexuelles, etc.

Nous savons bien l'importance de placer nos communautés au cœur de la lutte contre le sida et des décisions qui nous concernent, et le Raac-sida est fier d'avoir participé à ce travail collectif indispensable si on veut atteindre l'objectif de fin des épidémies !

(1) : Hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes, personnes trans, personnes migrantes, travailleuses et travailleurs du sexe, personnes consommatrices de drogues, etc.