Stupeur et tremblements

Publié par jfl-seronet le 29.08.2018
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D’un œil rapide, on pourrait croire en lisant le titre du roman que l’on est en présence d’un récit policier : "Péril en demeure". Pas du tout !

Le péril, en l’occurrence, n’est pas un quelconque criminel ou une empoisonneuse retorse qui réduirait la liste de ses concurrents à l’héritage… en décimant son entourage. Non, le péril, c’est l’homosexualité. Poète et professeur des universités, Prosper Mugaruka, explique avoir voulu tirer une "sonnette d’alarme face à l’homosexualité". Bah oui, ça mérite au moins cela". D’ailleurs, dans une interview à "Africa News", le romancier explique sa croisade : "Il est très important de passer de la phase du tabou (sic !) à une autre plus précise et plus claire pour remédier à ce fléau qui est également à la base de la destruction de la famille, plus vieille institution sociale à protéger jalousement". Et celui qui est doyen de la faculté des sciences de l’information et de la communication à Kinshasa —  comme quoi on peut faire une belle carrière universitaire tout en étant homophobe —  de poursuivre : "J’ai posé un problème de nation qui se pose avec acquitté [c’est sans doute d’acuité, dont veut parler l’auteur, ndlr]. Suite à la mondialisation, les jeunes se transforment et vont à des déviations sexuelles". Décidément, on prête beaucoup à la mondialisation. Pour ne pas avoir à lire ce roman (qui n’a que peu de chances d’être édité en France) disons que la thèse (mince et sordide) est que l’homosexualité est une "fausse note dans l’harmonie de la famille" et un "phénomène nouveau". Oui, je sais, c’est toujours surprenant de lire que l’homosexualité est une mode de l’année et guère promise à un avenir. Heureusement, Prosper Mugaruka a une piste pour corriger cela : "Il faut apprendre comment faire usage de la liberté en vue d’une nécessité de préserver l’équilibre familial et conjugal". Pas plus compliqué que cela !
Je voudrais rassurer celles et ceux qui lisent cette nouvelle Turbulence. Cette rubrique n’a pas vocation à devenir celle de la dénonciation permanente de l’homophobie, mais difficile de ne pas réagir aux sorties, hélas, nombreuses et mondiales contre l’homosexualité ; sorties qui marquent un état d’esprit et sont le signe d’une sale époque.

On croyait l’épisode homophobe estival clos… quand on a découvert, au fil des dépêches, les propos de la députée japonaise Mio Sugita. Mi juillet, l’élue du Parti libéral démocrate (PLD) accorde une interview au magazine "Shincho". Elle y explique que les personnes LGBT ne sont pas "productives" puisqu’elles ne peuvent pas se reproduire". Et de sa fausse candeur homophobe de se demander si, du coup, il y a lieu "d’utiliser l’argent des contribuables pour elles". Et puis, comme la députée en a manifestement sous le pied, elle se demande au passage (genre : tout cela m’inquiète !) si tout cela ne serait pas la faute des médias qui encouragent les personnes "capables de vivre une romance normale et de se marier" à "devenir homosexuelles". Pour une fois, la mondialisation ne serait pas dans le coup.

On ne va pas ici balayer les arguments qui permettent de démonter les ressorts d’une pensée aussi étroite que stupide. On peut juste dire que la sortie de la députée a suscité de très vives réactions, des critiques à la pelle, y compris de la classe politique. Stupeur et tremblements !