On va tous vieillir

Bonne nouvelle : grâce aux antirétroviraux l’espérance de vie s’allonge et tend à rejoindre celle de la population générale. Mais la vie avec les virus et les parcours parfois difficiles exposent à des difficultés. Faisons le point pour vieillir le mieux possible.

Vivre avec le VIH fait-il vieillir plus vite ?

Les choses ne sont pas si simples. Chez les personnes séropositives depuis longtemps avec une histoire thérapeutique complexe, certaines études suggèrent que les troubles liés au vieillissement (certains cancers, ostéoporose, etc.) pourraient survenir plus tôt que dans la population générale. Mais cela ne veut pas dire qu’on est vieux à 50 ou 55 ans quand on est séropositif-ve, malgré une fatigue parfois importante. D’autant plus que selon d’autres études, le vieillissement (du point de vue de la santé physique) surviendrait seulement trois à cinq ans plus tôt.

De quel âge tenir compte ?

Du nombre d’années de vie, de l’ancienneté de la vie avec le VIH ou du parcours thérapeutique et social ? Il est probable que le vieillissement précoce ne surviendra pas chez les personnes récemment séropositives et ayant bénéficié très tôt des nouveaux traitements, et que dans ce cas on vieillira comme les autres. Si tant est qu’on ait un bon suivi médical pour détecter et prendre en charge rapidement les éventuels problèmes.

Prendre soin de soi compense en partie le désavantage

Dans certaines études, l’espérance de vie des personnes vivant avec le VIH pouvait même dépasser celle de la population générale, lorsqu’elles avaient un suivi médical de qualité. Une sacrée motivation ! Vieillir avec le VIH, c’est aussi prendre des traitements au long cours, ce qui n’est pas évident et nécessite un accompagnement. Surtout lorsque s’ajoutent les médicaments pour soigner d’autres pathologies liées au vieillissement (hypertension, diabète, maladies cardiaques, etc.).

Pouvoir vieillir, c’était inimaginable avant 1996, et c’est une sacrée bonne nouvelle !

Mais cela ne doit pas faire oublier que la vie avec le VIH a pu affecter de nombreux aspects de la vie, dont la capacité de travail. Et donc morceler voire interrompre la vie professionnelle, avec pour conséquence une réduction des revenus. Une carrière en dents de scie n’a pas toujours permis de mettre de l’argent de côté pour ses vieux jours... que parfois on n’imaginait pas pouvoir vivre. Une enquête de AIDES révèle, chez les personnes fréquentant l’association, des difficultés financières qui se compliquent avec l’âge. Or, désormais en France, près de la moitié des personnes vivant avec le VIH ont plus de 50 ans.

Construire des recommandations pour bien vieillir avec le VIH. AIDES s’est attaqué au sujet « Vieillir avec le VIH » dans le cadre d’un projet (2011- 2013), aboutissant à une conférence du consensus organisée en 2013. Il s’agissait de mieux connaître la qualité de vie et les besoins des personnes vivant avec le VIH de 50 ans et plus, qui étaient en contact avec l’association, ainsi que d’envisager des solutions adéquates en mobilisant les personnes concernées. Une étude nationale a également été commandée par les pouvoirs publics pour réaliser un état des lieux. Le projet de AIDES a réuni des personnes concernées, des militants-tes, des médecins, des décideurs-ses politiques et des chercheurs-ses pour prioriser les problématiques identifiées dans l’enquête. Des pistes d’actions, des bonnes pratiques de prise en charge globale et des recommandations ont été imaginées, co-construites et adressées à la ministre déléguée aux personnes âgées et à l’autonomie. Les recommandations sont disponibles dans le journal de la conférence et sur Seronet.

« J’ai été contaminé en 1985.Les médecins m’ont dit : « Vous avez le sida, c’est fini pour vous ». J’ai pensé qu’ils n’en savaient rien. Je me suis juré que je crèveraià 102 ans et que je mènerai une vie normale. Après 33 ans avec le VIH, je suis un peu vidé, mais je compte bien rebondir sur les 25 prochaines années. Car non, ce n’est pas fini pour moi. Les 102 ans, je vaisy arriver ! »

« Il y a vingt ans, quand on m’a annoncé que j’étais séropositive, je ne croyais pas que je vieillirais avec le VIH. Affaiblie, amaigrie, émaciée, j’étais convaincue de ne pas voir mes cinquante ans, ni grandir mes trois enfantset encore moins mes petits-enfants. Toutes ces années m’ont appris que c’est possible de bien vivre et de vieillir avec le VIH. J’ai appris à profiter pleinement de la vie,à croire au futur et à vivre pleinement le moment présent. Après l’hiver blanc viendrale printemps vert, il y aura un été fleuri, un automne de repos et l’hiver reviendra. »

« Pour moi, la mort est une finde partie et, plus j'en approche,plus j'ai envie de vivre intensément, saisissant toutes les occasionsde faire de nouvelles expériences. Je me demande si une telle attitude ne me prémunit pas contrela déchéance mentale. Si on se laisse aller à se dire que c'est bientôt la fin, qu'il n'y a plus rien à faire, on invite notre cerveau et notre corpsà démissionner. Il est possible que je me trompe et que, demain,je perçoive les premiers signes d'un Alzheimer, mais je préfère faire le pari qu'en continuant à vivre intensément, j'éviterai la déchéance et profiterai pleinement des prochaines années. »