La téléconsultation fait débat

12 Juillet 2023
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Très utilisée durant la période de la Covid-19, la téléconsultation semble désormais bien installée dans le paysage médical français. Environ un million de téléconsultations sont actuellement remboursées chaque mois, ce qui représente 2 à 3 % des consultations remboursées totales, selon les chiffres de la Caisse nationale d'Assurance Maladie. Un volume limité par rapport aux pics atteints pendant la pandémie : jusqu'à 4,5 millions de téléconsultations par mois vers avril 2020, avec de nouveaux pics au moment des retours du virus, 2 millions fin 2020 et 1,5 million début 2022. Une grande partie de ces téléconsultations sont réalisées par des médecins que connaissent déjà les personnes qui les sollicitent : médecins traitants ou spécialistes effectuant un suivi régulier. La Covid a aussi favorisé le décollage des plateformes qui proposent des rendez-vous de médecins en ligne sept jours sur sept, en général sur des horaires étendus, explique l’AFP. Dans ce cas, la personne put obtenir son rendez-vous sans délai ou en quelques heures, mais avec un-e médecin qui peut être situé-e à des centaines de kilomètres de chez elle et qu’elle n’est pas certaine de revoir un jour. Par exemple, chez Doctolib, qui revendique 500 000 téléconsultations par mois aujourd'hui, 20 % des téléconsultations interviennent avec des patients-es que le-la praticien-ne ne connaît pas. Selon un sondage BVA publié en juin et réalisé à la demande du LET, l'association des entreprises de télémédecine, 22 % des patients-es qui ont déjà téléconsulté l'ont fait avec un-e médecin qu'ils-elles ne connaissaient pas en présentiel. L’usage des plateformes qui permettent ces consultations « hors-sol » interroge professionnels-les de santé et pouvoirs publics. Ils-elles entendent éviter la dérive vers une médecine « ubérisée » où le-la praticien enchaine les consultations sur écran de personnes qu'il n'a jamais vues, avec les limites de l’exercice médical que cela crée. Le gouvernement a tenté d'interdire le remboursement des arrêts de travail prescrits en téléconsultation (sauf par le médecin traitant). Il n'a pas eu gain de cause. L’article de la loi concerné a été censuré par le Conseil constitutionnel, mais il compte bien revenir à la charge avec une autre proposition. Pour sa part, la Cnam surveille notamment le développement des cabines de téléconsultations implantées dans des lieux publics (y compris des supermarchés). « Je ne crois pas qu'il y ait une place justifiée à des télécabines de consultation dans des supermarchés, ou dans des lieux qui ne correspondent pas à un exercice normal des soins », a clairement expliqué le directeur général de la Sécurité sociale, Thomas Fatôme. Le problème, c’est que ces mises en garde ou tentatives de contrôle se télescopent à la réalité : celle des difficultés croissantes d'accès aux médecins, du fait, entre autres, des déserts médicaux. Du côté des plateformes de télé-rendez-vous médicaux accessibles sept jours sur sept, on affirme qu’il ne s’agit pas de supplanter la consultation en présentiel, mais d’une offre complémentaire, mais l’équilibre sera délicat à trouver. « Il ne faut pas opposer télémédecine et médecine présentielle », estimait récemment le docteur Pierre Simon, fondateur et ancien président de la société française de télémédecine, qui entrevoit l'arrivée d'une médecine « hybride », mêlant distanciel et présentiel. À suivre.