Un pas en avant… trois pas en arrière ?

Publié par Costa le 17.10.2008
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Déception lors des rencontres organisées par l'Association française de réduction de risques. La ministre de la santé avance à pas comptés sur la prévention du VHC chez les usagers de produits. Explications.
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Elle l’avait annoncé en juin au centre d’accueil de l’association Charonne à Paris, elle devait le confirmer jeudi. Exit les programmes d’éducation aux risques liés à l’injection qui devaient voir le jour dans certains Caarud* ? Intervenant lors des rencontres organisées sous l’égide de l’Association française de réduction des risques (AFR), la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot n’aura, en effet, parlé que d’évaluation. Évaluation des dites méthodes d’éducation aux risques liés à l’injection, évaluation des stratégies de réduction des risques, évaluation du rôle de pharmaciens dans la mise en œuvre des politiques de réduction des risques ou encore évaluation des traitements proposés pour la prise en charge des usagers de cocaïne.

Tiraillements au sein du gouvernement ? Après s’être vantée de vouloir élaborer une “politique innovante“ et d’en faire “un des axes majeurs“ de son action à la tête du ministère de la Santé, difficile, en effet, de voir dans tant d’évaluations la moindre innovation. Le virus de l’hépatite C (VHC) constituant désormais une “vraie menace“ pour les usagers de drogues, Roselyne Bachelot avait pourtant affirmé qu’elle saurait “prendre les mesures nécessaires“ comme Michèle Barzach l’avait fait en son temps (1987) en autorisant la vente libre de seringues pour lutter contre la transmission du VIH parmi les usagers. Et la ministre de saluer aussitôt après – sous les sifflets des intervenants réunis dans la salle – “le travail du président de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les toxicomanies (Mildt)“ dont le plan triennal (2008-2011) inquiète plus qu’il ne rassure les acteurs de la réduction des risques. Une intervention qui n’aura sans doute pas non plus rassuré l’assistance en faisant la part belle à l’interdit. Car s’il importe de “lutter pour la vie et la liberté“, pour la ministre il n’est pas non “interdit d’interdire, dès lors qu’il s’agit de protéger.“ L’interdit qui n’est donc, selon elle, “pas en soi une mesure répressive“ puisqu’un “interdit qui structure est un interdit responsable“.

Réformer la loi de 70 pour pouvoir évoquer librement les drogues sans risquer la condamnation ne semble décidément pas à l’ordre du jour. Comme l’avait auparavant fait remarquer Valère Rogissart, le vice-président de l’AFR, “les incohérences induites par la pénalisation“ constituent pourtant “un frein majeur“ à la réduction des risques. Valère Rogissart espérait pouvoir aller plus vite et développer d’autres outils comme les pipes à crack ou l’accompagnement à l’injection pour lutter contre le VHC. “C’est prêt, ça peut se faire demain, nous n’avons plus besoin d’expertise. Ce n’est pas la peine d’en discuter pendant 5 ans." Roselyne Bachelot, qui ne l’entend apparemment pas de cette oreille ne rentrera donc pas de si tôt, comme il l’espérait, aux côtés des “grandes dames de la RdR“ que sont Michèle Barzach, Simone Veil, Anne Coppel ou Nicole Maestracci.

Caarud : centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues

Illustration : Estherase