Etonnante « guérison » d'un jeune séropositif

«JE NE SUIS PAS CROYANT, mais j'ai l'impression d'être béni des dieux » : Andrew Stimpson, 25 ans,
avait été testé séropositif deux fois, mais, quatorze mois plus tard, de nouveaux tests n'ont
plus décelé de trace du virus du sida dans son organisme. Ce résultat a tellement stupéfait
ses médecins qu'ils ont refait deux fois les tests.Ils ont aussi recherché son ADN sur les
premiers tests pour vérifier qu'il n'y avait pas eu d'erreur d'échantillonnage. Il y avait déjà
eu, dans les années 1980, deux cas de « guérison spontanée » jamais confirmés. Cette fois, la
Grande-Bretagne retient son souffle en espérant tenir le premier cas avéré. Le plus grand scepticisme
prévaut dans l'Hexagone, où les associations redoutent qu'une énième « bonne nouvelle » ruine
les efforts de prévention.
Le jeune Andrew, homosexuel, avait été testé séropositif en août
2002 après avoir eu des rapports sexuels non protégés avec son ami espagnol âgé de 44 ans, séropositif
depuis plusieurs années. Son taux de virus HIV était bas, « ce qui n'est pas inhabituel chez
les patients qui viennent de contracter le virus », avaient noté ses médecins. Mais, en octobre
2003, alors qu'il n'avait suivi aucun traitement, un nouveau test indiquait qu'il était devenu
séronégatif. Ce résultat extraordinaire avait incité Andrew Stimpson à lancer une action contre
l'hôpital de Westminster et Chelsea où avaient été effectués les tests.
«
Ce cas doit
être éclairci
pour le bien des autres »

Dans le cadre de cette procédure, de nouveaux
tests, effectués le 8 mars 2004, avaient confirmé qu'il était bien toujours séronégatif et,
le 10 octobre dernier, les autorités médicales lui ont demandé de reprendre contact avec eux
en raison de ce résultat « exceptionnellement et médicalement remarquable ».
« Personne n'a
jamais guéri spontanément de sa séropositivité », explique Lisa Power, du Terence Higgins Trust,
une association d'aide aux malades du
sida
. C'est comme si on arrivait sur la
Lune sans vaisseau spatial. Si le virus n'est effectivement plus là, ce cas doit être éclairci
pour le bien des autres séropositifs. »
Pour le Dr Kinghorn, spécialiste du
sida
à l'hôpital de Sheffield, « l'histoire de cette guérison remarquable pourrait donner des indices
capitaux pour vaincre la maladie... Le secret pourrait résider dans la force exceptionnelle du
système immunitaire du patient », dit-il. Le professeur Jonathan Weber, responsable du département
médecine à Imperial College, le meilleur collège scientifique britannique, rappelle qu'il y
a déjà eu des cas semblables qui se sont révélés faux, mais souligne que si l'organisme de ce
patient a effectivement expulsé le virus, les chercheurs seront prodigieusement intéressés de
savoir quel type de réponse a développé son organisme et comment le virus a été attaqué. Mais,
pour le moment, ajoute-t-il, « la seule protection contre le virus HIV est encore d'avoir des
relations sexuelles protégées et de soigner rapidement les maladies sexuellement transmissibles.
»
En France,
l'association
Act Up a d'ailleurs vivement réagi, dès hier. « Ce
genre de nouvelle spectaculaire - et pour l'heure invérifiable - me terrifie, car elle peut
abattre tous nos efforts de prévention sur l'utilisation indispensable du préservatif », s'alarme
Jérôme Martin, président de
l'association
à Paris. « Il faut craindre, même
s'il s'agissait d'une guérison spontanée - ce que je ne crois pas -, qu'un seul cas escamote
les vrais problèmes. Car la réalité aujourd'hui est que nous sommes face à un regain de mortalité.
»

Le Parisien