L'été sera tiède et mou

La grande nouvelle du jour, c'est bien entendu l'arrivée de l'été, saison propice aux coups de foudre et aux coups de soleil, avec quelques bémols inhérents à la paupérisation croissante de la population française qui partira moins loin, moins longtemps, pour goûter aux joies du camping ou aux retrouvailles programmées chez des ancêtres retranchés dans des zones rurales afin d'y savourer l'air pur.

Au chapitre de la dégustation, il s'agit là de l'aspiration la plus légitime qui cadre avec le budget vacances, car pour le shopping ce sera Auchan ou Carrefour, comme à la maison, depuis que tous les petits commerces de proximité ont mis la clé sous la porte, les produits du terroir, selon la région retenue, offriront sous un emballage pittoresque, nostalgique d'un artisanat moribond, des promotions exceptionnelles nécessaires à la réussite d'un barbecue convivial où l'homme moderne s'improvise chef-cuisto, persuadé de sa supériorité sur les autres convives dans la maîtrise du feu, des braises et de la cuisson aléatoire. Redécouverte des joies simples, apéro, salades, sieste ou, pour les plus téméraires, visite d'un bâtiment classé au patrimoine historique local, au sommet duquel le panorama de champs de colza ou de maïs impressionnera par sa régularité et aussi par son étendue.

Pour ceux qui auront opté pour le séjour éco-familial, les rapports inter-générationnels seront parfois tendus, dès lors que des habitudes acquises de longue date se trouvent soudainement chamboulées. Au camping, il faudra s'habituer aux soirées festives du voisinage de jeunes européens portés sur l'alcool et la fumée pourtant illicite, mélomanes jusqu'à l'aube. 

Pour le retour, même en partant à 5 h du mat' (comme presque tout le monde), les nomades se retrouveront de péages en péages. De leur QG climatisés, les spécialistes en sécurité routière annonceront des ralentissements sur plusieurs centaines de kilomètres d'autoroutes diverses, des déviations recommandées et de nombreux secteurs stratégiques à éviter. Ca sera aussi un peu la pagaille dans les aéroports et à la sncf, car notre beau pays ne se trouve jamais à l'abri d'une grève estivale qui préfigure, en miniature, des mouvements sociaux attendus pour la rentrée. Cette année, la réforme des retraites a le vent en poupe, mais pas que.

Il ne manquerait plus qu'une bonne canicule. Ah ! non, là, je m'égare. Il doit bien exister des trucs qui donnent encore envie d'y croire et d'espérer, même sous le règne d'un truand. 

Alors, ce soir, ce sera le concert géant obligatoire et j'espère qu'il sera encore plus bruyant, plus dysharmonieux que jamais, afin de marquer l'attachement ancestral de ce peuple à se faire entendre, même et surtout lorsqu'on ne parvient plus à comprendre tout ce qu'il dit.