L’Onusida a plaidé à Davos

19 Février 2020
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Mi-janvier, au forum de Davos, l’Onusida a appelé les gouvernements à concrétiser le droit à la santé pour tous-tes en « canalisant les investissements publics vers le secteur de la santé ». Aujourd’hui, la moitié, au moins, de la population mondiale n’a pas accès aux services essentiels de santé. Toutes les deux minutes, une femme meurt en couches. Parmi les populations défavorisées, on retrouve les femmes, les adolescents-es, les personnes vivant avec le VIH, les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, les personnes travailleuses du sexe, celles qui sont consommatrices de drogues injectables, les personnes transgenres, les migrants-es et les réfugiés-es et les personnes précaires. « Les « pauvres » voient le droit à la santé leur échapper et les personnes essayant de sortir de la pauvreté sont écrasées par des frais de santé d’un niveau inacceptable. Les 1 % les plus riches bénéficient de soins à la pointe de la science, alors que les « pauvres » luttent rien que pour avoir accès aux soins de base », a développé, à cette occasion, Winnie Byanyima, directrice exécutive de l’Onusida. Près de 100 millions de personnes tombent dans l’extrême pauvreté (qui correspond à moins de 1,9 dollar par jour pour vivre), car elles doivent s’acquitter de soins de santé et plus de 930 millions de personnes (12 % environ de la population mondiale) dépensent 10 % de leur budget au moins pour des soins de santé, indique l’agence onusienne. Dans de nombreux pays, des personnes n’ont pas accès aux soins de santé ou ces derniers sont de mauvaise qualité à cause de redevances qu’ils ne peuvent pas se permettre. De plus, la stigmatisation et la discrimination bafouent le droit à la santé des « pauvres » et des personnes vulnérables, en particulier les femmes. Chaque semaine, dans le monde entier, 6 000 jeunes femmes sont infectées par le VIH. En Afrique subsaharienne, quatre nouvelles infections sur cinq chez les adolescents touchent une fille et, dans la région, les maladies opportunistes sont la première cause de décès des femmes en âge de procréer. Malgré des progrès importants pour réduire la mortalité imputable au sida et les nouvelles infections au VIH, 1,7 million de personnes ont été contaminées en 2018 et près de 15 millions attendent toujours de recevoir un traitement. « Un secteur de la santé financé par des fonds publics est le meilleur moyen de réduire les inégalités sociales », a indiqué Winnie Byanyima. « Lorsque l’enveloppe allouée au secteur de la santé est supprimée ou inadaptée, les « pauvres » et les personnes en marge de la société, en particulier les femmes et les filles, sont les premiers à perdre leur droit à la santé et ils doivent assumer seuls les soins pour leur famille. » Fournir à tout le monde des soins de santé est un choix politique que trop de gouvernements ne font pas. Dans son communiqué, l’Onusida souligne, par exemple, que la Thaïlande a réduit le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans à 9,1 pour 1 000 naissances vivantes. Ce taux est de 6,3 pour 1 000 aux États-Unis, alors que le produit intérieur brut par habitant de la Thaïlande est 90 % inférieur à celui des États-Unis. La Thaïlande a réussi cette prouesse en mettant en place un système de santé reposant sur des financements publics.  En Afrique du Sud, seules 90 personnes avaient accès à une thérapie antirétrovirale en 2000 ! Elles étaient plus de cinq millions en 2019. Le pays dispose à présent du plus grand programme de traitement anti-VIH au monde. Dans de nombreux pays, les investissements en matière de santé restent très faibles par rapport au produit intérieur brut, note l’agence onusienne. « La Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement estime que l’évasion fiscale et le transfert de bénéfices par les grandes entreprises font perdre tous les ans entre 150 et 500 milliards de dollars aux pays en voie de développement. Si cet argent était investi dans la santé, le budget de la santé triplerait dans les pays à faible revenu et doublerait dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure ». « Il est inacceptable que les riches et les grandes entreprises se soustraient à l’impôt et que le commun des mortels le paye de leur santé », s’est indignée Winnie Byanyima. Enfin, l’Onusida souligne que le « spectre de la dette menace l’économie, la santé et le développement en Afrique ». Il se traduit aujourd’hui par un recul important des dépenses sociales afin d’assurer le remboursement de la dette. Selon le Fonds monétaire international, en avril 2019, la moitié des pays à faible revenu en Afrique étaient surendettés ou proches du surendettement. Parmi eux, la Zambie a réduit de 27 % ses investissements dans le domaine de la santé et a augmenté de 790 % le service de sa dette entre 2015 et 2018. On assiste à une évolution similaire au Kenya où le service de la dette a augmenté de 176 % et les investissements de santé ont baissé de 9 % entre 2015 et 2018. Cette année, l’Onusida a participé à plusieurs points du programme du forum de Davos. Elle a mis en avant l’urgence pour les gouvernements de remplir leurs engagements afin de faire de la couverture sanitaire universelle une réalité tout en n’oubliant personne.