Criminalisation du VIH : que dit la déclaration d’Oslo ?

Publié par jfl-seronet le 19.06.2012
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pénalisation
Des représentants de la société civile internationale se sont réunis en février à Oslo en Norvège. Pour être précis, il s’agit de vingt personnalités qualifiées et organismes de la société civile internationale qui ont une expertise d’enjeux liés au recours au droit criminel en réponse au VIH. Ils ont travaillé à une déclaration qu’ils ont rendue publique et qu’on connaît désormais sous le nom de Déclaration d’Oslo sur la criminalisation du VIH. Que dit-elle ?
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La Déclaration d’Oslo est un document riche (passionnant même) puisqu’il recense l’ensemble des points qui plaident contre une criminalisation du VIH. Il ne s’agit pas d’une position morale, mais bien du fruit d’une réflexion qui se fonde sur des arguments juridiques, scientifiques et des études. Le document prend comme point de départ le recours trop large au droit criminel contre les personnes vivant avec le VIH. Il rappelle aussi des évidences, prouvées scientifiquement, par un "nombre croissant d’études". Quelles sont-elles ? Que "criminaliser la non-divulgation du statut sérologique [ne pas dire son statut], l’exposition au risque de transmission ainsi que la transmission non intentionnelle du VIH font plus de mal que de bien en termes d’impact sur la santé publique et les droits humains". "Les mesures permettant de créer un environnement encourageant le dépistage du VIH et les personnes concernées à rechercher du soutien, à prendre un traitement en temps utile ainsi qu’à dévoiler leur statut sérologique en toute sécurité représentent une meilleure alternative que l’usage du droit pénal", indique le point N°2 de la Déclaration d’Oslo. Le document prend aussi appui sur les recommandations de l’ONUSIDA, celles-ci demandent aux pays qui se sont dotés de tels dispositifs pénaux de les abroger.
 
Pour autant, la Déclaration d’Oslo envisage bien que la criminalisation puisse exister en cas de transmission intentionnelle. On peut d’ailleurs lire dans le texte : "Si le recours au droit pénal peut jouer un rôle, bien que limité, dans les rares cas de transmission intentionnelle et malveillante du VIH, nous préférons que l’accent soit mis sur le soutien aux personnes vivant avec le VIH et leur autonomisation dès l’annonce du diagnostic, afin que même ces rares cas puissent être évités. L’atteinte d’un tel objectif requiert une approche non punitive et non pénale de la prévention du VIH, centrée sur les communautés affectées qui possèdent une réelle expertise et compréhension des problématiques liées au VIH/sida". Et la Déclaration de préciser : "Si, après un réexamen au niveau national fondé sur des données probantes, les poursuites pénales en lien avec le VIH sont tout de même jugées nécessaires, elles devraient respecter les principes de proportionnalité, de prévisibilité, d’intentionnalité, de causalité et de non-discrimination. De surcroît, elles devraient toujours reposer sur les connaissances scientifiques et médicales les plus récentes dans le domaine du VIH/sida, être fondées sur un préjudice effectif et non sur un simple risque de préjudice et, enfin, être en adéquation avec les objectifs de santé publique et les obligations internationales en matière de droits humains". Autrement, un cadre bien plus strict que ce qui est mis en place aujourd’hui dans les pays qui criminalisent.
 
La Déclaration d’Oslo rappelle aussi que : "L‘épidémie de VIH est essentiellement répandue par des infections non diagnostiquées et non par les personnes connaissant leur statut sérologique. Une relation sexuelle non protégée peut avoir de nombreuses conséquences, certaines positives et d’autres négatives, y compris la transmission d’infections sexuellement transmissibles telles que le VIH. Se fier à la divulgation comme moyen de protection – et poursuivre les personnes qui ne divulguent pas – engendre un faux sentiment de sécurité vu le nombre élevé d’infections au VIH qui ne sont pas diagnostiquées." Il note, par ailleurs, que "Le VIH n’est qu’une des nombreuses infections sexuellement transmissibles ou contagieuses qui peuvent causer un préjudice à long terme. Cibler exclusivement le VIH par des lois spécifiques ou par des poursuites pénales contribue à la stigmatisation des personnes vivant avec ou affectées par le VIH. La stigmatisation liée au VIH est le principal obstacle au dépistage, au recours à un traitement, à la divulgation de la séropositivité ainsi qu’à la possibilité pour un pays d’atteindre l’objectif "zéro nouvelle infection à VIH, zéro discrimination et zéro décès lié au sida".
 
"L’objectif de cette initiative était de réunir les décideurs politiques et les acteurs concernés en un forum global afin de réexaminer les législations et politiques existantes sur la criminalisation de la non-divulgation de la séropositivité au VIH, de l’exposition au VIH ainsi que de sa transmission à la lumière des plus récentes et pertinentes connaissances scientifiques, médicales, juridiques et de santé publique", rappelle le Réseau juridique VIH canadien. La Déclaration d’Oslo indique enfin que le "droit pénal ne modifie pas les comportements issus de facteurs sociaux complexes, en particulier les comportements basés sur le désir et fortement influencés par la stigmatisation liée au VIH. Ces comportements sont modifiés par le biais d’un accompagnement et d’un soutien en faveur de la santé, la dignité et l’autonomisation des personnes vivant avec le VIH".
Pour lire l’intégralité de cette Déclaration.