Commode............ jupiter .... allé chercher !

Publié par jl06 le 16.09.2018
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Commode : l'empereur qui se rêvait gladiateur

Une nouvelle biographie revient sur la folle passion qu'entretenait l'empereur Commode pour la gladiature. Jusqu'à y perdre son trône…

Par Publié le 16/09/2018 à 09:09 | Le Point.fr  Sculpture de l'empereur Commode, qui se revait gladiateur.

Sculpture de l'empereur Commode, qui se rêvait gladiateur.

 

Immortalisé par Ridley Scott dans son film Gladiator, l'empereur Commode est bien descendu dans l'arène pour y livrer des combats truqués. Une nouvelle biographie, signée par l'historien Éric Teyssier (éditions Perrin), décrit en détail l'incroyable passion qu'a eue le fils de Marc Aurèle pour la gladiature pendant sa courte vie – une addiction qui entraînera sa perte.

Dès son enfance, raconte Éric Teyssier, Commode est pris en main par une armada de professeurs et précepteurs recrutés dans tout l'empire pour lui apprendre les lettres, la rhétorique, la philosophie, etc. Mais le jeune héritier est surtout fasciné par le pugilat et la lutte, enseignés par d'anciens gladiateurs devenus entraîneurs. Du vivant de son père, il va totaliser 365 combats, qui s'apparentent plus à des exercices militaires avec des armes émoussées. Les affrontements ont lieu dans des arènes où prennent place Marc Aurèle et ses proches, ainsi que des légionnaires – Commode accompagne son père dans ses campagnes, notamment près du Danube.

Devenu empereur, il poursuit les combats, toujours en privé – il en cumulera plus de 700 sous son règne. Mais les simples exercices virils du début, appréciés des soldats, deviennent peu à peu des jeux cruels et malsains, donnés devant les courtisans du nouveau monarque, eunuques, affranchis, concubines et mignons… Les armes légères cèdent la place aux glaives acérés et Commode l'emporte toujours : pas question de voir l'empereur mordre la poussière… Vêtu de la panoplie du secutor, son armatura préférée, il combat des rétiaires inexpérimentés avec des armes émoussées, adversaires sur mesure qu'il n'hésite pas à mettre à mort dans ses propres amphithéâtres...

Cour débauchée

Le conflit latent avec le Sénat et les complots contre le trône altèrent fortement le caractère de Commode, qui cumule les névroses et s'enferme dans ses palais, entouré d'une cour débauchée. Lorsqu'un incendie dévaste Rome, en 192 après Jésus-Christ, la coupe est pleine, le peuple gronde… Pour calmer sa capitale et provoquer un électrochoc, Commode décide d'organiser en fin d'année des jeux au Colisée, où il combattra lui-même dans l'arène. « Pour les Romains, c'est la stupéfaction, explique l'historien Éric Teyssier. En résonnance, ce serait aujourd'hui l'équivalent de la finale de la Coupe du monde de football, mais avec en plus un côté hors norme, car le cas est unique. Pour la première fois, le plus grand personnage de l'empire rejoint les parias : il abandonne son aura sacrée pour devenir un homme public. »

Une fois de plus, le combat est truqué : ses opposants ont des armes factices et l'empereur lutte entouré du préfet du prétoire et de son chambellan, tous deux en armes – on ne sait jamais… Quand les gladiateurs demandent grâce, le jeu est complètement faussé : leur vie dépend de l'empereur, qui se trouve être en même temps leur adversaire. Malaise dans les gradins : les codes traditionnels, très respectés des Romains, se trouvent largement bafoués…

Boucherie criminelle

Pendant les quatorze jours que durent les jeux, Commode va aggraver son cas : il se fait accorder une prime d'un million de sesterces – quand les grands vainqueurs en touchent quinze mille –, puis fait mettre à mort un nombre impressionnant de gladiateurs professionnels, une boucherie criminelle. Pour finir, il décide d'incarner le héros Hercule en chassant des animaux sauvages, qu'il tire à l'arc comme des lapins depuis des tribunes surélevées : hippopotames, éléphants, girafes, une centaine de lions et d'ours…

Les cadavres et les trophées s'accumulent sur le sable du Colisée, mais ces massacres en règle finissent par lasser le public... « C'est comme si un torero descendait dans l'arène pour tirer à la kalachnikov, relève Éric Teyssier. La foule est très déçue : elle s'attendait à voir un héros, elle découvre un tricheur, assoiffé de sang. » Quelques jours plus tard, Commode est lâché par ses propres courtisans et finit étranglé par un lutteur dans son école de gladiateurs, qu'il ne quittait plus. La veille, il avait émis le projet de célébrer la nouvelle année en paradant sur la Voie sacrée vêtu en secutor et entouré de tous les combattants professionnels de Rome… Un ultime sacrilège qui aurait définitivement souillé la pourpre impériale.

 

  À lire : Commode, l'empereur gladiateur, par Éric Teyssier, éditions Perrin.