Pied de nez a TRUMP

Publié par jl06 le 02.10.2019
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La France ne devrait pas avoir peur d'accueillir Edward Snowden

Nathalie Devillier — 24 septembre 2019 à 12h03

Interrogé le 16 septembre par France Inter, le lanceur d'alerte américain a exprimé sa volonté d'obtenir l'asile en France.

 Conférence vidéo d'Edward Snowden à Berlin, le 17 septembre 2019. | Jörg Carstensen / DPA / AFP Conférence vidéo d'Edward Snowden à Berlin, le 17 septembre 2019. | Jörg Carstensen / DPA / AFPAlors qu'il publie Mémoires vives, le lanceur d'alerte Edward Snowden vient de demander l'asile politique en France.

Le résultat de cette requête est porteur de conséquences lourdes pour les libertés et la démocratie, et c'est bien cette démocratie que Snowden a décidé de défendre au péril de sa vie depuis maintenant six longues années.

Inertie incompréhensible

Après ses révélations mettant en lumière l'ampleur des renseignements collectés par les services secrets américains et britanniques, Edward Snowden a essuyé de multiples refus à ses demandes d'asile politique en 2013 (en France notamment, celui de Manuel Valls).

Finalement accueilli en Russie, où il bénéficie d'un droit de résidence limité qui expire en 2020, il a récemment réitéré son souhait de rejoindre la France. Cette demande doit se faire à l'ambassade de France en Russie, dont le personnel consultera ensuite le ministère de l'Intérieur.

Une fois sur le territoire national, Edward Snowden pourrait néanmoins être extradé vers les États-Unis, au titre des infractions poursuivies. Le droit français pourrait ainsi ne pas aider l'informaticien.

Inutile de faire une étude approfondie des conséquences de l'action de Snowden, son retentissement se fait ressentir quotidiennement pour des milliards de personnes.

À la question «la société a-t-elle changé grâce à Snowden?», chacun·e est en position de répondre par l'affirmative: n'avez-vous pas obturé la caméra de votre ordinateur?

C'est donc l'incompréhension qui règne face à l'inertie des autorités nationales et au sein de l'Union européenne, qui ont été les premières bénéficiaires de ces révélations et en ont tiré les leçons à la fois pour leur sécurité intérieure et du point de vue des libertés fondamentales, en renforçant la protection des données à caractère personnel.

L'annulation du Safe Harbor, l'adoption du RGPD, les multiples poursuites contre les géants du net pour violation du droit de la concurrence jusqu'à la taxe sur les GAFAM: les retombées de l'action de Snowden se font sentir à l'échelle européenne, mais aussi aux États-Unis.

Même si le Congrès américain a limité cette collecte automatique, massive et indiscriminée avec le Freedom Act de 2015, les États poursuivent l'espionnage des conversations, qui se trouve normalisé avec par exemple l'adoption en France de la loi renseignement.

Quant aux entreprises, les plus grandes d'entre elles font encore l'objet d'enquêtes pour violation de la vie privée.

Les déséquilibres s'exacerbent sur le plan des cadres juridiques, des acteurs qui monopolisent la collecte des données et maintenant sur le rôle des machines (intelligence artificielle, supercalculateurs). Les données sont plus que jamais au cœur de la bataille.

Décision d'intérêt général

Inculpé aux États-Unis pour espionnage et vol de secrets d'État, l'ancien agent de la CIA s'était caché treize jours parmi des réfugié·es sri-lankais·es de Hong Kong en 2013.
Aucun statut juridique uniforme et suffisamment solide n'existe pour protéger un lanceur d'alerte de cette envergure, véritable fugitif international.
Edward Snowden n'est pas un lanceur d'alerte comme les autres. Citizenfour –son premier pseudonyme– a été menacé de peine de mort par le secrétaire d'État américain Michael Pompeo.

Parmi les options possibles, la demande d'Edward Snowden pourrait être entendue par le président Emmanuel Macron au titre du droit de séjour, pouvoir régalien.
En effet, seule une décision politique, telle que celle prise par François Mitterrand en faveur des Brigades rouges italiennes ou plus récemment par Nicolas Sarkozy pour accueillir des membres des Farc, les rebelles colombiens, pourrait servir de fondement juridique à son entrée sur le territoire. Or ce statut est révocable à tout moment en cas d'alternance politique.

Sans user de ce pouvoir, la France pourrait accorder une protection à Snowden en tant que défenseur des droits de l'homme au titre de la déclaration des Nations unies éponyme, car le lanceur d'alerte a rendu service à l'humanité et œuvre à la promotion ou à la protection des droits humains partout et pour tout le monde. L'homme le plus dangereux selon les États-Unis est-il aussi le plus héroïque?

Pour finir, quelques réminiscences de l'internet qui fut un temps espace de liberté, rêvé par quelques geeks de la Silicon Valley. C'était avant… Devenir qui tu es, échouer et recommencer grâce à internet? Oui, c'était possible à une époque pas si lointaine.

Aujourd'hui, vous n'avez plus le droit à l'erreur: tout est archivé, référencé et retweeté. À ce propos, lisez ce qu'en dit Chris Wetherell, inventeur du bouton «retweeter». Il nous explique comment cette fonction a ruiné internet. Initialement prévue pour relayer la voix de communautés sous-représentées, elle a été détournée au moment du Gamergate, jusqu'aux scandales de désinformation durant la campagne américaine de 2016.

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l'article original.

 

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Lorsqu'on commande un VTC, mieux vaut ne pas être une personne noire ou LGBT+

Le simple fait d'afficher votre sympathie envers les personnes LGBT+ peut vous contraindre à vous rabattre sur les transports en commun pour échapper à la discrimination.  | why kei via Unsplash Le simple fait d'afficher votre sympathie envers les personnes LGBT+ peut vous contraindre à vous rabattre sur les transports en commun pour échapper à la discrimination.  | why kei via Unsplash 

Temps de lecture: 2 min — Repéré sur PinkNewsNBC News

Une étude intitulée «Quand la transparence échoue: préjugés et incitations financières chez les plateformes de VTC» révèle que les personnes assimilées ou faisant preuve de leur soutien à la communauté LGBT+, ainsi que les personnes noires, sont plus susceptibles de voir leur course annulée par les chauffeurs.

Chris Parker, professeur à la Kogod School of Business de l'American University of Washington et Jorge Meija, professeur à la Kelley School of Business à l'Indiana University, ont réuni un échantillon de conducteurs à Washington afin d'étudier leur réaction face à divers profils, auxquels les membres de l'équipe de recherche ont attribué différentes caractéristiques: femme ou homme, blanc⋅he ou noir⋅e, doté d'un filtre aux couleurs du drapeau arc-en-ciel ou non.

Les scientifiques se sont livrés à un choix méticuleux pour nommer ces profils. Selon une étude de 2003 sur laquelle ils se sont basés, les prénoms Emily et Greg évoquent des personnes blanches, tandis que Keisha et Jamal sont attribués à des individus noirs. Afin de contrôler le biais que pourrait constituer un physique désavantageux comme cause du rejet ou de l'annulation d'un trajet, les responsables de l'étude ont soumis toutes les photos à des tests d'intelligence artificielle. Une fois retenus les profils les plus attractifs, ils se sont mis à commander des courses via l'application.

 

Les chercheurs ont inclus le paramètre de l'heure de pointe dans leur étude. Ils ont commandé 1.600 courses à des horaires très demandés et 1.600 courses au moment des périodes creuses. Chaque conducteur disposait de trois minutes pour accepter ou refuser la course, soit le temps d'analyser rapidement le profil du passager. Passées les trois minutes, Parker et Meija annulaient eux-mêmes le trajet, toujours via l'application.

Les LGBT+ risquent de rentrer à pied

Après avoir analysé 3.200 courses, les chercheurs ont constaté que la clientèle qui affichait son soutien à la communauté LGBT+ subissait deux fois plus d'annulations que celle dont les profils restaient neutres. Les profils des personnes noires avaient trois fois plus de risque de se voir refuser une course que ceux des personnes blanches.

En revanche, à l'heure de pointe, les trajets des personnes noires n'étaient pas annulés, contrairement à ceux des personnes LGBT+. L'incitation financière faite aux chauffeurs à ces heures suffit à les convaincre d'accepter une course sollicitée par un individu noir –mais échoue selon eux encore à conduire les personnes gay-friendly.

Les chercheurs ont souhaité mener cette étude après que plusieurs incidents concernant des personnes LGBT+ et des compagnies de VTC ont émaillé l'actualité, à l'exemple de ce couple de femmes qui avaient été sommées de sortir d'une voiture Uber après s'être embrassées sur la joue.

 

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