Les archives communautaires

Lorsque j'ai appris être séropositif, en mars dernier, je me suis demandé de quelle façon, par qui et pourquoi j'avais été contaminé.

 

Quatre mois après, je n'ai pas les réponses à ces questions. Seulement des pistes, des hypothèses... et de nouvelles interrogations.

 

L'une d'elles est la suivante: "Aurais-je pu ne pas être contaminé?" Y chercher une réponse peut légitimement paraître inutile, en ce que j'ai le VIH et, donc, parce que c'est trop tard.

 

Mais je crois, au contraire, que cela peut être intéressant, car cela pose, notamment, la question de la pertinence et de l'efficacité des actions de prévention et de RDR de transmission du VIH, menées en France.

 

De ce que j'en ai vu, ces actions consistent le plus souvent en:

- la mise à disposition de matériel de prévention,

- la démonstration de l'utilisation de ce matériel,

- l'information (orale et par le biais de divers supports et médias).

 

Bien plus rarement - et c'est regrettable, je trouve, il s'agit d'échange, d'écoute et de soutien plutôt ponctuel.

 

Hélas, ces actions n'ont répondu que partiellement à mes problèmes. C'est ma tendance à l'auto-destruction qui m'a conduit vers la contamination, je pense. Ainsi, je me dis que des actions destinées à accroître mon estime pour moi et à développer mes compétences psychosociales, auraient peut-être été plus pertinentes et, par suite, potentiellement efficaces.

 

Quelle est votre opinion à ce propos? Les actions menées pour éviter de nouvelles transmissions du VIH, dans notre pays, vous semblent-elles satisfaisantes? Avez-vous des idées permettant de les améliorer ou de les compléter?

 

JU

Commentaires

Portrait de nathan

Pour ma part, je pense que les données à prendre en compte dans la RDR sont tellement nombreuses, subjectives, complexes et souvent insaisissables que la piste qui me semble la plus prometteuse est le dépistage précoce conduisant à un traitement au plus près de la contamination, avec un gain à la fois pour la pvvih et pour les autres également. Et alors le souci de soi se conciliera avec le souci des autres !
Portrait de skyline

Julian, je te renvoie à 2 forums (peut-être aux oublillettes) où l'on s'est déjà questionné sur cette question :

http://www.seronet.info/billet_forum/reduction-des-risques-dans-l-amour-entre-hommes-7495

http://www.seronet.info/billet_forum/rdr-pour-tous-7834

Nous avons pas encore abouti à la mission que nous nous étions fixée : arriver à des recommandations générales de prévention RDR alors que la RDR semble être souvent une pratique à individualiser, les diverses variables la structurant étant si nombreuses et dépendantes des comportements individuels. Je ne suis pas d'accord avec Nathan lorsqu'il parle de données subjectives. Déjà Act Up-New York expliquait en 1983 que selon le positionnement sexuel (actif ou passif), on avait pas les mêmes chances de contamination. La circoncision procède de la même logique (ONUSida et OMS l'a recommande pour réduire le risque de l'insertif de 60%). Faire attention aux muqueuses (en utilisant beaucoup de gel) n'est pas non plus une donnée subjective ; à l'inverse, l'utilisation de poppers qui provoque un afflux de sang dans les muqueuses ou de drogues qui assèchent les muqueuses, c'est scientifiquement documenté. Bref... c'est complexe car ces différents co-facteurs de risque de transmission ou de réduction du risque de transmission peuvent se cumuler, s'annuler, etc. Tout dépend de la situation donnée, mais je reste persuadé que l'on peut arriver à déconstruire cette complexité pour proposer un système RDR généraliste où chacun pourra y retrouver sa spécificité et se fabriquer sa RDR personnalisée.

Aujourd'hui, après des années de résistances de la part de certaines associations autistes et réactionnaires, et de secret de polichinelle dans les cabinets médicaux, la ministre de la Santé vient de mettre en place une commission sur la question (la commission Lert-Pialoux). Les auditions ont commencé, on verra sur quoi ça débouche... 

Bien à toi.

Portrait de vincent58

hello julian

je viens de voir ton billet et je lis que pour toi

''..C'est ma tendance à l'auto-destruction qui m'a conduit vers la contamination...''

Ne pense tu pas plus simplement que c'est la recherche d'un plaisir libre sans latex qui t'a conduit a ce fait ?

Sauf si tu t'es injecté une dose de sang contaminé je ne crois pas qu'il te faille avoir une vision si négative de toi et de ta contamination.

Parfois certains meks disent qu'ils prefereraient devenir seropo car ce serait plus facile de vivre leur sexualité et qu'ils n'auraient plus a vivre dans la peur ...

Bon juste pour que tu ne tombes pas ds le piège des écrits des psys qui ne font que nous faire croire que nos pratiques no latex sont liés a un mal être e une destruction de soi....peut être que tu aimes simplement la bite et le sperme !

as tu une si mauvaise image de toi ?

sinon pour la prevention je suis d'accord avec toi que l'efficacité est bien plus importante lorsque l'on parle avec les gens, que l'on s'interesse a eux et a leurs pratiques,  plutot que de leur distribuer des capotes et des soi disants bons conseils !!

biz

vincent58

"Jouir sans entrave"

Portrait de julian

Bonjour,

Merci de vos commentaires, qui me renvoient pas mal de choses...

D'abord, Nathan, je pense que le dépistage et le traitement précoces sont capitaux, mais ne peuvent pas constituer la clé de voûte du dispositif de prev/RDR de transmission du VIH. Oui, ça fait reposer toute la responsabilité des contaminations sur les séropos et les "séroignorants" et surtout, si ces derniers ne jouent pas le jeu, c'est mort, si je puis me permettre... (désolé pour l'humour noir...) A mes yeux, les séronegs doivent jouer un rôle primordial dans leur "non-contamination" et on doit leur en donner les moyens.

Ensuite, Skyline, je suis d'accord avec ce que tu écris ici, autour de la RDR. Je suis d'ailleurs positivement surpris par le changement qui se produit dans les assos, où - j'en ai l'impression - on commence progressivement à prendre conscience des limites et effets pervers du "tout kpote".

Enfin, Vincent58, j'ai une relation bien particulière au plaisir sexuel: je ne suis pas toujours sûr d'en prendre. Ce qui est très probable, c'est que la bite et le sperme ne m'attirent pas complètement en soi, mais parce qu'ils sont potentiellement dangereux. Il y a de nombreuses années, je multipliais les rapports et pratiques à risques, parce que j'ai toujours eu besoin de me mettre en danger, de me faire du mal. J'ai été presque fasciné par le VIH (l'une des raisons pour lesquelles j'ai été à AIDES)... C'est pour ça que je pense que si j'avais pu et si on m'avait aidé à sortir de ce mode de fonctionnement, je ne serais peut-être pas séropo, aujourd'hui.

Est-ce que je peux vous demander ce qui, selon vous, vous à conduit à la contamination? Si oui, je vous le demande... ;-)

A bientôt.

JU

Portrait de nathan

Julian, quand je parle du dépistage précoce et du traitement précoce, je ne me situe jamais sur le plan de la RDR ni de la prévention. J'ai écrit plusieurs billets sur différents forums à ce sujet. Je me situe uniquement sur le plan de l'intérêt thérapeutique égoïste de la pvvih. J'ai mis un lien plus haut sur ma position exprimée sur mon blog. Je reproche justement au CNS d'évoquer d'abord le traitement précoce (inévitablement corrélé au dépistage précoce) comme outil de la RDR et non pas en premier lieu dans l'intérêt thérapeutique du patient. Ce qui fait qu'on oublie l'enjeu principal des dépistage et traitement précoces. Or ce qui m'intéresse d'abord, c'est ma santé, ensuite celle des autres. Si accessoirement, le fait d'être traité au plus près de ma contamination me rend par ailleurs moins contaminant, alors tant mieux. Disons que cela constitue une valeur ajoutée du traitement. Mais je le répète, ce qui m'intéresse d'abord dans le traitement, ce n'est pas que je sois moins contaminant, c'est que mon cerveau, mes organes, mon corps... soient le moins longtemps possible soumis à un syndrome inflammatoire qui compromet mon espérance de vie à terme ou risque prématurément d'entraîner des incapacités qui feront de moi un boulet pour la société et gâcheront ma qualité de vie...Ma position vis-à-vis du traitement précoce est donc purement égoïste, totalement centrée sur l'intérêt de la pvvih pas des séronégatifs.

Portrait de julian

Je ne t'avais pas compris, Nathan, car tu as écrit "la piste qui me semble la plus prometteuse est le dépistage précoce conduisant à un traitement au plus près de la contamination", alors que le forum que j'avais ouvert concerne la prévention et la RDR de transmission du VIH...

Je suis donc tenté de me dire que tu n'as pas répondu à mes questions... Lol...

A plus tard.

JU

Portrait de nathan

Mais si julian : relis bien. D'abord, mon intérêt, le souci de moi ; ensuite, comme conséquence possible, peut-être le souci des autres. Mais on attend encore des preuves... scientifiques.
Portrait de nathan

Julian, pour répondre à ta question sur l'origine de la contamination, je pourrai trouver plein de raisons pour "justifier" ma contamination... Quelqu'un m'a même fait part récemment qu'il ne comprenait pas pourquoi, alors que je suivais des études, je m'étais fait "plomber" (c'est le mot qu'il employait) comme si les études pouvait préserver de la contamination... Je ne me risquerai donc pas à tenter une herméneutique des raisons de ma contamination. Ce serait rétrospectivement illusoire et je serai bien incapable de reconstituer toute la "vérité" de ma contamination.

En tout cas, il y a un fait dont je suis sûr : pour être contaminé, il a fallu que je n'utilise pas de préservatifs. Je ne suis pas l'immaculée contamination.

Portrait de skyline

@Julian : moi ma contamination c'est un manque de bol - rupture de préso avec un mec que j'enculais et qui était séro-ignorant (CV sûrement explosive) et syphilitique (contagiosité accrue)... ou alors fellation (mais c'est moins probable). en tout cas ils m'ont tous affirmé être séronegs après que j'ai contacté tous les mecs avec qui j'avais baisé (qui ont fait aussitôt un test)... sauf le mec avec la rupture de préso qui disait : "je ne suis pas séropo, je ne suis pas malade" (déni, ignorance, inconscience?). la colère a vite fait place à la résignation...

@Nat : tu n'es pas "égoïste", tu es juste "individualiste"... et comme tu partages ici tes connaissances, cela compense largement puisqu'ainsi tu entres dans une logique "communautaire"... y a encore du boulot sur l'estime de soi chouchou ?

Portrait de vincent58

hello julian

Tu souhaitais connaitre notre rencontre avec le vih...

Seropo depuis 22 ans...les années 80 tu sais la capote c'était pas un truc que l'on trouvais comme aujourd'hui...le vih pour un campagnard comme moi ne fréquantant pas le milieu gay était quelque chose n'existant qu'au delà de l'Océan ...le cancer gay...je l'ai vu au travers d'un magazine et puis premiers amours, la vie de couple en se croyant protégé par la fidélité mais sans savoir que le virus était déjà là...puis découverte au bout de 5 ans par hasard du vih et la mort de mon compagnon...

Manque de bol, innattention, amour, sexe sans latex, ou même victime d'un mensonge par omission...De toute façon il ne me servirait à rien d'en vouloir a qui que ce soit cela ne permettra pas de revenir en arrière...je ne saurai même pas dire si revenir en arrière est quelque chose que je souhaiterai ...passer son temps à prendre son pied en ayant peur du vih cela doit être vraiment flippant  !!

aujourd'hui il y a la vie avec des traitements et il faut toujours se dire que la recherche avance et que demain sera peut être meilleur !

Portrait de frabro

Cette question est : "Est-ce que je peux vous demander ce qui, selon vous, vous à conduit à la contamination? "

Bien difficile de répondre simplement.

D'abord parceque c'était pour moi il y a plus de vingt ans, au milieu des années 80. Je ne suis pas sur que mon souvenir de cette époque ne soit pas déformé par ce que je suis devenu après vingt ans de VIH et d'expériences de vies riches et diversifiées.

Ensuite parce qu'il n'y a pas une réponse, mais de multiples facteurs à prendre en compte.

On parlait beaucoup moins du VIH  dans ces années là, mais j'avais l'information, je connaissais les modes de transmission, je savais aussi que seul le préservatif pouvait me protéger, et qu'il n'y avait aucun traitement possible. Malgré celà, j'ai été suffisemment vulnérable sur le plan psychologique pour que ce savoir ne suffise pas à éviter es comportements à risques. Je venais de subir une séparation (la première...) que je vivais comme unterrible echec, et dans ce contexte vivre ou mourir du sida n'avaient guère d'importance. La vraie raison est sans doute celle là : je n'avais pas assez de projet de vie pour éviter la mort à tous prix (contexte des années sans traitement...)

La suite est tout le contraire : un incessant combat pour la vie, sous toutes ses formes et par tous les moyens.

Je ne suis pas loin de penser que le VIH a étté pour moi un révélateur et un facilitateur, mais à quel prix... 

Aujourd'hui la prévention est partout, les générations suivantes on accès au matériel de prévention facilement, elles savent depuis toujours. Et pourtant les contaminations continuent parmi les gay comme si il n'y avait pas eu 30 ans d'épidémie. Alors non je ne crois plus aux modes de prévention traditionnels, et oui je pense que c'est sur l'estime de soi et le projet de vie qu'il faut travailler contre l'instinct de mort. Mais pour être honnête, je ne me sens pas investi de cette mission. Ne pas transmettre est la seule règle que je m'impose. 

Portrait de julian

Bonjour Frabro,

Dans ton dernier com, tu as écrit: " La vraie raison est sans doute celle là : je n'avais pas assez de projet de vie pour éviter la mort à tous prix (contexte des années sans traitement...)

La suite est tout le contraire : un incessant combat pour la vie, sous toutes ses formes et par tous les moyens.

Je ne suis pas loin de penser que le VIH a étté pour moi un révélateur et un facilitateur, mais à quel prix... "

D'abord, ça me laisse à penser qu'il s'agissait de ton désir de prendre soin de toi qui s'est trouvé altéré, ce qui me conduit encore à penser qu'il faudrait travailler sur la question des compétences psychosociales et de l'estime de soi, pour éviter bon nombre de contaminations supplémentaires.

Ensuite, je me demande ce qui a fait que tu as changé de mode de fonctionnement (je peux le reformuler comme ça?): qu'est-ce qui a fait, avec l'arrivée du VIH, que tu t'es lancé dans cet "incessant combat pour la vie, sous toutes ses formes et par tous les moyens"? Qu'est-ce qui s'est produit en toi?

Merci, bises.

JU

Portrait de frabro

Julian, j'avais initié il y a fort longtemps deux forums sur ce thème : l'un s'intitule "survivant sans complexes", l'autre "Résilience". Je met les liens ci-dessous pour tous ceux que ce sujet peut interesser :

 http://www.seronet.info/billet_forum/resilience-11264

 http://www.seronet.info/billet_forum/survivant-sans-complexes-11453

 De plus mon blog livre pas mal de moments de ma vie qui expliquent comment cetet rage de vivre est apparue et s'est développée à partir du moment où je me suis su avec certitude séropositif.

 Tu as raison sur le fait que c'est le manque de désir de prendre soin de moi qui m'a conduit à prendre le risque de la contamination. C'est incontestablement ma séparation d'avec mon premier compagnon qui a  foutu ma vie en l'air, même si c'est moi qui en avait fait le choix. C'est la rencontre de mon second ami qui m'a redonné envie de me projeter dans l'avenir, de construire des choses avec lui. Curieusement, son décès n'a pas provoqué l'abandon mais le désir d'utiliser au mieux le temps disponible pour moi et pour les autres.

Je suis toujours dans cette démarche de recherche d'équilibre entre ce que je donne et ce que je reçois sur tous les plans : professionnel, amical, familial, amoureux. Etre séropositif est devenu secondaire dans cette démarche, sauf bien sur lorsque je suis sur séronet.

Bises

François 

Portrait de hozgor

Je pense,que le pire ,dans cette maladie,c'est l'image d'épinal caricaturisée qu'elle véhicule,et que ceux et celles qui sont concernés doivent se traîner,en plus de tout les combats qu'ils doivent mener.

le HIV...c'est la maladie des plaisirs défendus...le sexe la drogue....

Moi je dis que c'est la maladie de sa vie pour ne pas dire de son mode de vie.Elle te ronge encore plus...car ,bien souvent ,de la déclarer en société;tu affiches le Moi qui veille en Toi.

Pourquoi,c'est ainsi??? je sais pas...la société est pleine de tabous.

paradoxalement elle mettra tout en oeuvre pour réanimer, sauver ;soigner;rééduquer;appareiller;réinsérer...ect..."le brave type" qui avec 2,10g d'alcool en roulant à 150km/h;aurra buté une brave famille qui a croisé son chemin...

Alors que faire...en plus de tous les combats a mener sur tout les fronts de cette foutu maladie...

...Il faut Vivre pleinement ;être Vrai,aller à l'essentiel,Aimer encore plus qu'on ne l'a jamais fait pour que l'autre,soit grisé car il ne pourra jamais atteindre la puissance de ta rage de vivre.

Did.